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A qui profite le crime ?

Christophe LASCOMBES13 décembre 2004

La presse allemande de ce début de semaine se penche naturellement sur l’empoisonnement confirmé de Viktor Iouchtchenko, le candidat de l’opposition en Ukraine.

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C'est confirmé, Viktor Iouchtchenko a bel et bien été empoisonné à la dioxine
C'est confirmé, Viktor Iouchtchenko a bel et bien été empoisonné à la dioxineImage : AP

Die Welt

s'interroge : quelle haine et quelle crainte Iouchtchenko a-t-il bien pu faire naître au sein du pouvoir ukrainien, de quelle peur de perdre le pouvoir les marionnettes du Kremlin ont-elles pu être saisies pour recourir à l’empoisonnement. Heureusement, les Ukrainiens en ont eu assez de supporter les manipulations électorales et sont descendus dans la rue. Avec le résultat que l’on sait. Et Viktor Iouchtchenko avait bien raison de comparer ces manifestations avec la révolution de velours qui a submergé l’Europe centrale et de l’Est il y a 15 ans.

Pour la Frankfurter Rundschau, c’est comme au cinéma, dans un mauvais film d’espionnage. Les médecins viennois confirment les soupçons du chef de l’opposition ukrainienne : il a bel et bien été empoisonné à la dioxine. Iouchtchenko a survécu à l’attentat et à la première défaite électorale. Cette preuve objective de son empoisonnement devrait au moins faire réfléchir les plus acharnés de ses contradicteurs dans l’est du pays et renforcer encore ses chances de victoire lors de la répétition du second tour. Et si cette victoire se concrétisait, ce serait la preuve que le poison de l’ancien pouvoir aurait perdu de son efficacité.

Si le candidat du pouvoir en place qualifie la confirmation officielle de l’empoisonnement de son adversaire comme une déclaration particulièrement infâme, c’est bien parce que la soi-disant maladie du candidat de l’opposition, utilisée comme argument à charge par ses adversaires, risque fort de se retourner contre ces derniers, souligne la Frankfurter Rundschau. Et si cette réaction de Ianoukovitch est si forte, c’est bien parce que son camp a donné toutes les raisons d’être l’objet des plus terribles soupçons, insiste le quotidien.

La Süddeutsche Zeitung cite les cruels jeux de mots de la presse ukrainienne. Le pouvoir accuse son adversaire d’être un agent à la solde des Américains. Pour le quotidien, le père de la révolution orange a donc été victime du fameux « agent orange », ce défoliant rendu tristement célèbre par les épandages américains au Vietnam et qui contient de la dioxine. Comme dans toutes les enquêtes criminelles, le Procureur de Kiev va certainement poser la question cruciale : « à qui profite le crime » reprend le quotidien. Trois réponses sont possibles. Le président Koutchma, pour imposer son candidat, le candidat lui-même, Ianoukovitch, et finalement Poutine, au Kremlin, pour conserver son emprise sur le pays. Mais saura-t-on jamais le fin mot de cette affaire, s’interroge le journal.