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Affaire el-Masri

Aude Gensbittel15 décembre 2005

La presse allemande revient largement ce matin sur l’affaire el-Masri. Le ministre des affaires étrangères, Frank Walter Steinmeier, a affirmé hier devant une commission spéciale du parlement que les autorités allemandes n’étaient aucunement impliquées dans l’enlèvement de Khaled el-Masri, un Allemand d’origine libanaise, par les services secrets américains, la CIA.

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Le ministre des affaires étrangères Frank Walter Steinmeierau Bundestag
Le ministre des affaires étrangères Frank Walter Steinmeierau BundestagImage : AP

On reprochait au précédent gouvernement d’avoir été au courant, mais de n’avoir rien entrepris. Ce que le chef de la diplomatie a fermement démenti : selon lui les autorités n’ont été informées qu’après la libération de l’homme. Au lendemain de la réunion du Bundestag, les journaux sont plutôt mitigés quant à cette affaire.

Pour la Frankfurter Rundschau, beaucoup de questions restent ouvertes et la réunion du parlement n’a pas apporté de résultats vraiment concrets. Mais cela tient à la nature de la chose : il s’agit après tout de services secrets, et de surcroît étrangers. Les citoyens doivent parfois faire confiance à leurs représentants parlementaires, car ces derniers en savent plus qu’ils n’ont le droit de révéler. La lutte contre le terrorisme international ne peut après tout pas être menée au grand jour, poursuit le journal. Mais en ce qui concerne l’étroite frontière entre l’Etat de droit et les méthodes employées dans cette lutte, Washington et Berlin, malgré toutes leurs grandes déclarations de coopération, restent d’avis différents. Et ceux qui savent lire entre les lignes l’auront bien senti hier au Bundestag.

Le ton est radicalement différent dans la Süddeutsche Zeitung. Les terroristes islamistes ont réussi à réaliser ce qui n’aurait jamais dû être possible, écrit le journal, ils ont détourné l’esprit des lois et miné la confiance dans l’Etat de droit. Ils ont poussé les pays démocratiques à sacrifier leurs principes et à agir au-delà de la légalité. C’est sans doute jusqu’à aujourd’hui le plus grand succès des terroristes. Pour le quotidien, le cas de l’Allemand el-Masri, enlevé et conduit en Afghanistan, ainsi que la réaction indolente des autorités allemandes, donnent l’impression qu’aussi bien les organes d’Etat allemands que les ministres américains se comportent face aux violations du droit comme les célèbres trois singes : l’un se tient les mains sur les yeux, le deuxième sur la bouche et le troisième sur les oreilles. On ne veut rien voir, rien dire, rien entendre.

On peut comprendre que le gouvernement ne veuille pas désavouer publiquement la coopération nécessaire entre les services secrets de deux pays, estime quant à lui le journal die Welt. Mais il doit toutefois répondre à des questions essentielles : y a-t-il d’autres cas comme celui d’el-Masri ? Que fait par exemple le gouvernement pour le « taliban de Brême », Murat Kurnaz, détenu depuis 2002 à Guantanamo sans procès et sans statut légal ? Dans cette affaire, le gouvernement a encore des comptes à rendre, conclut le quotidien.