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Afropresse, l’Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron12 octobre 2007

Soudan – Merkel/Afrique

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Avions de combat chinois au Darfour
Avions de combat chinois au DarfourImage : amnesty international

C’est encore une fois le Soudan qui retient cette semaine l’intérêt de nos confrères. Violents combats au Darfour avant la conférence de paix, titre la Frankfurter Allgemeine Zeitung, alors que pour la Tageszeitung de Berlin, le processus de paix pour le Darfour est en train de s’émietter. La dernière escalade militaire en date, écrit ce journal, a commencé fin septembre par une bataille entre troupes gouvernementales et rebelles pour la ville d’Haskanita, dans la province du Nord-Darfour. Le nouveau processus de paix prévu pour le Darfour risque donc d’échouer avant même d’avoir commencé. Sans compter, souligne la Tageszeitung, que nul ne sait qui participera aux discussions censées débuter le 27 octobre en Libye. Les deux principaux chefs rebelles, Abdelwahid al-Nour, de l’Armée de libération du Soudan, et Khalil Ibrahim, du Mouvement pour la justice et l’égalité, refusent pour l’instant d’y participer. Or sans nouvel accord de paix sur le Darfour c’est le préalable au stationnement des 26 000 hommes de la force hybride ONU-Union africaine qui disparait. La Frankfurter Allgemeine Zeitung relève que le gouvernement soudanais et la rébellion se rejettent mutuellement la responsabilité de la destruction d’Haskanita. Mais pour la Berliner Zeitung, il est clair que c’est l’armée soudanaise qui attise la guerre civile au Darfour. Lorsque l’armée soudanaise, lit-on dans ce journal, a mis fin à son offensive contre Haskanita, il ne restait plus que l’école et la mosquée. Toutes les autres maisons avaient été incendiées. Des milliers de personnes avaient pris la fuite. Selon les estimations de l’ONU, rappelle le journal, 200 000 personnes au moins sont mortes depuis le début du conflit au Darfour en 2003. C‘est le coût humain, effroyable, de cette guerre, alors que les médias restent muets sur son coût financier. Ce que l’on vient d’apprendre en revanche, et le quotidien Die Welt s’en fait l’écho, c’est que, de 1990 à 2005, selon une étude publiée cette semaine à New York, les guerres et les conflits en Afrique ont coûté 284 milliards de dollars aux économies africaines. Soit un montant à peu près équivalent à l’aide au développement allouée au continent africain pendant la même période. L’étude en question a été réalisée par trois ONG: Oxfam. Saferworld et le Réseau d’action international sur les armes légères. 23 pays africains ont été examinés et les auteurs de l’étude ont pris en compte aussi bien les coûts directs, comme les dépenses d’armement et la destruction des infrastructures, que les coûts indirects comme la montée de l’inflation, du chômage et de la mortalité. Cela dit, estime Die Welt, les estimations devraient être encore en-deça de la réalité, car l’étude ne tient compte ni des dépenses d’armement en temps de paix, ni des répercussions de la criminalité armée.

Le voyage d’Angela Merkel en Afrique inspire aussi nombre d’articles et de commentaires à la presse. La Tageszeitung note que l’opposition éthiopienne a salué l’exigence "d’un système politique ouvert en Ethiopie" formulée par la chancelière allemande à Addis Abeba. De fait, souligne de son côté la Süddeutsche Zeitung, aucun prédécesseur d’Angela Merkel en voyage à l’étranger ne s’est prononcé de manière aussi continue, et presque évidente, contre les violations des droits de l’homme. Ce voyage en Afrique en a été une nouvelle illustration. Devant l’Union africaine à Addis Abeba, mais aussi en Afrique du sud et au Libéria, Angela Merkel ne s’est pas tue pour apaiser, mais a critiqué pour clarifier des positions. De telles critiques bien sûr ne signifient pas la fin de la répression au Zimbabwe ni l’établissement de la liberté de la presse en Ethiopie. Mais qui dit publiquement à son hôte des vérités qui dérangent ne contribue pas au moins à le récompenser pour ses manquements. Tout cela est avant tout symbolique, comme bien des choses en politique étrangère, concède le journal. Mais cela peut prendre à l’improviste un caractère concret. La Frankfurter Allgemeine Zeitung titre sur le moment le plus émouvant, à ses yeux, de ce premier voyage d’Angela Merkel en Afrique: sa rencontre à Johannesburg avec Nelson Mandela. La Frankfurter Rundschau relève pour sa part qu’à l’inverse de bien des responsables politiques occidentaux, Angela Merkel a su éviter de se présenter en Afrique comme la blanche qui apporte le bonheur. La fille de pasteur ne veut pas être une missionnaire, souligne le journal. Cela tient à des raisons non seulement morales, mais aussi politiques. Angela Merkel veut empêcher que les fortes réticences anti-européennes de certains chefs d’Etat africains ne s’accentuent encore sous les coups de maîtres d’école occidentaux.

En plus bref, la presse allemande s’est fait l’écho cette semaine, mais plutôt sommairement, des combats dans l’est de la République démocratique du Congo. La Tageszeitung note que la guerre dans le Nord-Kivu prend de plus en plus un caractère ethnique. Dans les montagnes du Masisi, à l’ouest de Goma, Hutus et Bahunde ont formé des milices qui veulent combattre les rebelles de Laurent Nkunda, décriés comme Tutsis, et qui considèrent donc tous les Tutsis de la région comme des ennemis. Le Masisi, rappelle le journal, a déjà été dans les années 90 le théâtre de sanglants conflits ethniques. A l’époque presque tous les Tutsis de la région avaient été chassés, en grande partie vers le Rwanda. Leur rapatriement pacifique est l’une des principales revendications de la rébellion animée par Laurent Nkunda.

Enfin le même journal, la Tageszeitung, évoque le retrait du SPLM, l’ex-rébellion sudiste, du gouvernement central de Khartoum. Un retrait motivé par les retards dans l’application de l’accord de paix signé en 2005. De fait, écrit le journal, le tracé exact de la frontière du Sud-Soudan n’est toujours pas défini. La répartition des recettes pétrolières entre Khartoum et Juba ne fonctionne donc pas plus que le retrait de l’armée gouvernementale du Sud-Soudan. Et le journal doute fort que le référendum d’autodétermination au Sud-Soudan ait lieu comme prévu en 2011.