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Afropresse, l’Afrique à travers la presse allemande.

Marie-Ange Pioerron27 juillet 2007

RDC – Swaziland

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Le président Joseph Kabila
Le président Joseph KabilaImage : AP Photo

Nous commençons par la République démocratique du Congo. Un an après l’élection présidentielle du 30 juillet 2006, le bilan n’est guère positif si l’on en juge par les commentaires des journaux allemands.

Les réformes se font attendre, l’opposition est réprimée et une nouvelle guerre risque d’éclater – voilà comment la Frankfurter Allgemeine Zeitung résume l’action de Joseph Kabila, le premier président doté d’une légitimation démocratique. A Kinshasa, une question domine toutes les discussions: comment se débarrasser de Kabila? Certes, écrit le journal, cela n’a rien de nouveau dans la capitale de la RDC. Joseph Kabila y est très impopulaire. Ce qui est nouveau en revanche, c’est que, même des féticheurs renommés prédisent au président une fin prochaine et violente. Dans les ambassades européennes, poursuit notre confrère, rares sont ceux qui veulent encore parier sur Kabila. Les amis du "nouveau Congo" renvoient aux débats animés du parlement. Malgré l’absence de la figure de proue Jean-Pierre Bemba on semble y faire la démonstration d’une conception démocratique. Mais poursuit le journal, tous les sujets brûlants sont discutés à huis clos, et les opposants qui s’entretiennent avec des radios étrangères essuient très vite la colère du président. Qui plus est, dans l’est du Congo, une nouvelle guerre pourrait éclater entre l’armée congolaise et Laurent Nkunda, ce "général" réfractaire qui sème l’insécurité dans les deux provinces du Kivu. Or dans l’est les gens avaient voté à 90% pour Kabila parce qu’ils attendaient de lui qu’il leur apporte la paix. A Berlin, la Tageszeitung relève que le conseil de sécurité de l’ONU appelle le gouvernement de Kinshasa à trouver un règlement politique aux conflits dans l’est du pays. Les opérations militaires pour lesquelles le gouvernement a besoin de l’appui de la MONUC doivent être planifiées avec la mission onusienne, et ce en conformité avec le droit humanitaire, souligne le conseil de sécurité. Bref, écrit le journal, un avertissement à peine voilé alors que du côté gouvernemental à Kinshasa on s’apprête à lancer une offensive militaire unilatérale contre les groupes rebelles qui opèrent dans les deux Kivu.

Autre bilan cette semaine dans la presse allemande: celui de l’action menée par le successeur de Kofi Annan a la tête des Nations unies précisément.

Ban Ki-moon, un homme qui montre les dents mais qui ne sait pas mordre, écrit la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Concernant l’Afrique, le journal note que la naïveté avec laquelle Ban Ki-moon a tenté de présenter les problèmes environnementaux comme la cause du conflit au Darfour, sans évoquer le rôle de Khartoum dans l’armement des milices djandjawids, a été perçue comme une complaisance envers Omar el-Béchir, le président soudanais. Ban Ki-moon, souligne le journal, s’est pourtant attaqué au conflit du Darfour avec une détermination qui force le respect. Et il entend être jugé sur ses succès au Darfour. Que les Nations unies, en cette cinquième année de crise au Darfour, soient toujours à des lieues de maîtriser la catastrophe, que dans le meilleur des cas quelques bataillons de casques bleus iront renforcer la force de paix de l’Union africaine, tout cela, souligne le journal, est moins imputable à Ban Ki-moon qu’à Pékin, à Khartoum et à une rébellion divisée.

Une autre catastrophe, moins visible celle-là, alimente cette semaine un épais dossier dans l‘hebdomadaire allemand Die Zeit. Ce sont les ravages causés par le sida au Swaziland.

Ce petit royaume de l’Afrique australe affiche le taux de sida le plus élevé au monde, à savoir 39%, et même 56% chez les jeunes femmes enceintes. Cela fait longtemps, écrit Die Zeit, que le sida n’est plus une maladie d’homme en Afrique. Aujourd’hui ce sont principalement les femmes et les enfants qui souffrent. Au sud du Sahara l’épidémie a fait onze millions d’orphelins, une gigantesque armée de miséreux aux pieds nus. Mais souligne le journal, cette catastrophe au visage rural, discret, ne fait pas les grands titres. Le sida ne peut rivaliser avec l’Irak. Rien ici n’explose. Le Swaziland implose, il meurt en catimini. Le sida, note un peu plus loin le journal, bouffe l’éducation. Or l’éducation devrait être au contraire un outil contre le sida. Le petit Swaziland pourrait survivre si les écoles étaient pleines. Mais au Swaziland il importe surtout que les établissements scolaires présentent bien. L’enseignement doit être de niveau international. Raison pour laquelle le gouvernement a modifié le programme des collégiens. Les anciens livres scolaires ne sont plus valables. Tous les élèves ont besoin de livres flambant neufs, donc coûteux et inaccessibles pour la plupart des orphelins du sida.

Enfin la Süddeutsche Zeitung a ouvert ses colonnes à écrivain américain d’origine nigériane. Il s’agit d‘un jeune auteur de 24 ans, Uzodinma Iweala, qui lance donc aux occidentaux l’appel suivant: arrêtez de sauver l’Afrique!Sous le poids de sa culpabilité dans la crise humanitaire qu’il a provoquée au Moyen-Orient, l’occident semble vouloir faire pénitence en Afrique. Des célébrités comme Bob Geldof et des hommes politiques comme Tony Blair veulent apporter la lumière dans les ténèbres du continent. Ils viennent suivre des stages, faire de la recherche sur le terrain, ou chercher des enfants à adopter, un peu comme mes amis et moi à New York prenons le métro pour aller adopter des chiens errants au refuge pour animaux. Le mois dernier, souligne Uzodinwa Iweala, le G8 et un parterre de célébrités se sont réunis en Allemagne pour discuter entre autres du sauvetage de l’Afrique. J’espère qu’avant la prochaine réunion on aura compris que l’Afrique ne veut pas être sauvée. L’Afrique attend du monde l’aveu que nous sommes capables, grâce à des partenariats équitables avec d’autres membres de la communauté internationale, d’atteindre nous-mêmes une croissance encore jamais vue.