1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

Afropresse, l’Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron9 juin 2006

Somalie – Soudan

https://p.dw.com/p/C755
Milice islamiste à Mogadiscio
Milice islamiste à MogadiscioImage : AP

La Somalie domine, cette semaine, l’actualité africaine dans les journaux allemands.

La prise de la capitale somalienne par les milices islamistes inspire beaucoup d’articles à nos confrères. Folles journées à Mogadiscio, titre la Frankfurter Rundschau, qui parle des combats les plus sanglants depuis la chute du dictateur Siad Barré il y a quinze ans. Miliciens islamistes et unités des seigneurs de guerre se sont affrontés à coup de mortiers, de bazookas et des tristement célèbres « technicals », ces mitrailleuses lourdes montées sur des pickups. Près de quatre mois d’affrontements ont fait 350 morts, principalement des civils. Et puis poursuit le journal, ce qui semblait presque inimaginable s’est produit : les milices islamistes ont réussi à couper les voies d’approvisionnement des seigneurs de la guerre regroupés depuis janvier en alliance soutenue par les Etats-Unis. Les chefs de clans auto-proclamés ont pris la fuite. Et beaucoup de Somaliens s’en réjouissent. Anges pour les uns, démons pour les autres, les milices islamistes, écrit la Süddeutsche Zeitung, promettent des temps meilleurs pour la population martyre de Mogadiscio. Mais si, avec le triomphe des islamistes, les combats semblent faiblir, les fractures politiques qui déchirent la Somalie, demeurent. Elles pourraient même se creuser. Car même si la Somalie passe pour un terrain extrêmement dangereux, les milices rivales trouvent à l’étranger de puissants alliés. Peut-être est-il trop simple,estime le journal, de parler d’une guerre par combattants locaux interposés, mais la lutte pour Mogadiscio suggère que la guerre des Américains contre le terrorisme d’une part et l’agenda des djihadistes de l’autre déterminent en partie l’ordre de bataille en Somalie. Jour de chance pour Al-Qaida, titre à la une la Tageszeitung. Les Etats-Unis viennent de subir en Somalie leur première grande défaite dans la guerre globale contre le terrorisme. Cela dit, souligne le journal, présenter la victoire des milices islamistes comme une victoire d’al-Qaida serait une simplification inadmissible. Les milices islamistes en Somalie ne sont pas nées d’une soif de guerre sainte, mais du besoin d’ordre, tout à fait banal, d’une classe moyenne qui ne veut plus assister en spectateur impuissant à l’effondrement, depuis quinze ans, de l’Etat somalien.

La guerre au Darfour continue aussi de préoccuper la presse allemande. Un grand hebdomadaire allemand, le Spiegel, revient longuement sur la signature à Abuja d’un accord de paix entre le gouvernement soudanais et l’un des mouvements de la rébellion. Le Spiegel n’est pas optimiste, car l’accord de paix, précisément, n’a été signé que par un chef rebelle, Mini Arkou Minawi, qui dirige une aile de l’armée de libération du Soudan. Non seulement la guerre continue, écrit l’hebdomadaire, mais le carnage risque aussi de prendre une dimension fratricide. Le chef rebelle signataire pourrait devenir une proie facile pour ses rivaux au sein du mouvement de résistance. Loin d’apporter la paix, l’accord d’Abuja pourrait inaugurer une guerre entre Africains du Darfour, une guerre dans la guerre menée seulement jusqu’à présent contre les Arabes. Les fractions rebelles qui ne parviennent pas à s’entendre avec Khartoum sont en train de recruter des milliers de combattants dans les camps de réfugiés au Tchad. En échange de la signature de l’accord d’Abuja, relève Der Spiegel, Mini Arkou Minawi aurait obtenu la promesse d’être rayé de la liste des criminels de guerre établie par la Cour pénale internationale. Une cour engagée dans la traque laborieuse de ces criminels, lit-on dans la Süddeutsche Zeitung qui note que des voix s’élèvent pour critiquer la trop grande bonté du procureur de la CPI Luis Moreno Ocampo. La tâche des enquêteurs est difficile, souligne le journal. Dans les camps de toile du Tchad ils interrogent les réfugiés soudanais sur leurs bourreaux. Mais il est pratiquement impossible de protéger ces témoins de représailles. Sans compter qu’il est déjà très difficile de les suivre à la trace pour pouvoir les convoquer un jour devant la Cour.