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Afropresse, l’Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron17 mars 2006

RDCongo

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S’il est un thème cette semaine qui éclipse le reste de l’actualité africaine, c’est bien la République démocratique du Congo. Entendons-nous bien, il ne s’agit pas tant de ce qui se passe actuellement en RDC que des atermoiements de l’Union européenne sur l’envoi d’une force de 1 500 hommes pour sécuriser les élections du 18 juin. Confusion, embrouillamini – les mêmes mots reviennent sous la plume des commentateurs pour qualifier l’incapacité des Européens à s’entendre sur cette mission pourtant bien modeste. L’Europe peut-elle faire ce qu’elle veut, s’interroge la Frankfurter Rundschau, ou ne veut-elle pas faire ce qu’elle peut ? A en juger par les lamentables chamailleries sur la mission au Congo, la réponse n’est pas évidente. Ce qui se joue entre Bruxelles et les capitales des Etats membres, écrit le journal, ressemble de plus en plus à une pièce du théâtre de l’absurde dans laquelle les acteurs affirment ne pas même connaître le texte. Dans cette pièce, renchérit la Süddeutsche Zeitung, aucun des acteurs n’a jusqu’à présent mérité une bonne critique. Pour Berlin le haut représentant de l’UE pour la politique extérieure, Javier Solana, fait piètre figure. Mais la chancelière allemande Angela Merkel et son ministre de la défense Franz-Josef Jung n’ont pas non plus été convaincants jusqu’à présent. Quant au président français Jacques Chirac, son rôle, comme bien souvent, reste opaque. L’affaire, souligne la Frankfurter Rundschau, se corse d’un problème de fonds avec cette opération au Congo qui doit inaugurer les nouvelles missions militaires, dites « intégrées », de l’Union européenne. En Allemagne l’armée est une armée « parlementaire ». Cela signifie qu’elle a besoin, pour ses missions à l’étranger, d’un mandat de la chambre des députés. Ce mandat, le gouvernement doit le demander. Mais, au niveau européen, il doit prendre des engagements fermes pour que l’UE puisse prendre une décision. Dans cette procédure le parlement n’entre donc en jeu qu’en tout dernier lieu. Pour l’instant, et pour des raisons de politique intérieure, note de son côté la Frankfurter Allgemeine Zeitung, Berlin joue la montre. Seule la ministre de la Coopération s’est prononcée pour une mission au Congo.

Cette mission, l’Allemand Albrecht Conze, chef politique de la mission de l’ONU au Congo, l’appelle de ses vœux dans les colonnes de la Süddeutsche Zeitung. Ce qu’il en attend ? Que les Européens dissuadent les perturbateurs, encouragent la population à voter sans crainte et sécurisent le processus électoral à Kinshasa. Non pas parce que des troubles seraient à redouter dans la capitale, mais parce que l’acceptation des résultats se décidera à Kinshasa et nulle part ailleurs. Albrecht Conze se veut optimiste. Il faudra, dit-il, intégrer les perdants. On pourra leur donner des postes de sénateurs ou les envoyer comme ambassadeurs dans des pays importants. J’ai l’impression, souligne-t-il encore, que toutes les parties aspirent plus à une solution pacifique qu’à une nouvelle guerre civile. La Tageszeitung en est beaucoup moins sûre. Le scénario imaginé jusqu’à présent pour la mission européenne n’est pas de nature à convaincre les Congolais que les élections seront pacifiques et équitables. Et il ne dissuadera certainement pas les plus résolus des manipulateurs électoraux. D’autant moins que la plupart des 1 500 soldats ne seraient pas stationnés au Congo, mais dans des pays voisins. La garde présidentielle de Josef Kabila, note la TAZ, compte 16 000 hommes. L’ancien chef rebelle Jean-Pierre Bemba, assuré de l’appui financier des caciques de l’ère Mobutu, a 6 000 combattants aux portes de la capitale. Pour la classe politique congolaise, conclut le journal, les jeux sont déjà faits avant la tenue des élections. Chacun veut se vendre le plus cher possible au probable vainqueur. La population, elle, attend de ces élections l’avènement de temps meilleurs. A un moment ou à un autre, les deux visions entreront en collision. Peut-être sous le regard de spectateurs allemands.