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Afropresse, l’Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron20 janvier 2006

Soudan – Tchad – Côte d’Ivoire

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A l’approche du sommet de l’Union africaine à Khartoum, les journaux allemands se sont beaucoup intéressés cette semaine au Soudan. La bataille diplomatique de Béchir, titre la Süddeutsche Zeitung pour commenter la revendication, par le Soudan, de la prochaine présidence de l’Union africaine. Que ce sommet ait lieu à Khartoum est déjà un succès pour le Soudan, écrit le journal. La victoire serait totale si Omar el-Béchir obtenait de surcroit la présidence de l’UA. Mais un président qui se voit reprocher des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité au Darfour peut-il présider une fédération d’Etats qui dit s’engager pour la démocratie et les droits de l’homme ? Ce qui est surprenant, poursuit le journal, c’est qu’à l’exception du Tchadien Idriss Déby, qui se déclare en état de belligérance avec le Soudan, aucun autre chef d’Etat ou de gouvernement africain ne s’en émeut. Le choix d’Omar el-Béchir comme nouveau président de l’Union africaine nuirait gravement à l’image de l’UA, estime ce confrère. Depuis deux ans cette communauté a connu une évolution positive. Elle s’ingère aujourd’hui dans les affaires intérieures des Etats, elle dénonce les atteintes aux droits de l’homme et elle envoie des forces de paix. 7 000 soldats par exemple sont actuellement au Darfour. Le Darfour qui n’est le théâtre ni d’un génocide ni d’épurations ethniques, martèle Omar El Béchir dans les colonnes de la Frankfurter Rundschau. Le prétendu conflit du Darfour a été inventé par des intérêts étrangers. La population du Darfour, dit-il, est parfaitement en mesure de régler ses problèmes par le dialogue et la coopération avec le gouvernement central et les organisations de la société civile. Le président soudanais conteste tout aussi énergiquement, dans cette interview, l’existence même des milices djandjawid, que Khartoum est accusé de soutenir.

Le Tchad, donc, s’est déclaré en état de belligérance avec le Soudan. Et pour la presse allemande le président Déby est dans une situation de plus en plus intenable.

Celui qui depuis 1990 dirige le pays d’une poigne de fer traverse de graves difficultés politiques, écrit la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Des garnisons entières de sa garde présidentielle ont déserté et tentent maintenant de le renverser à partir du Soudan. Les deux plus proches conseillers du président, les jumeaux Erdimi, ont pris la fuite. La Banque Mondiale a gelé ses crédits au Tchad, Nd’jamena ayant rompu les clauses de l’accord sur l’utilisation des ressources pétrolières. Idriss Déby est-il fini, s’interroge le journal. Les difficultés de cet ancien général formé en France sont d’autant plus sérieuses que la résistance vient de son entourage le plus proche et donc que la structure qui maintenait Deby au pouvoir est en train d’éclater. Car le Tchad, précise la Frankfurter Allgemeine, n’est pas gouverné par un gouvernement représentatif, mais par une ethnie, celle des Zaghawas, originaires du nord-est du pays. Tous les postes-clés dans l’Etat tchadien sont occupés par des Zaghawas.

Enfin la situation en Côte d’Ivoire ne manque pas non plus de préoccuper la presse allemande. Les violences des derniers jours, le retrait du FPI, le parti de Laurent Gbagbo, du gouvernement de transition, les appels des partisans du président à une « guerre de libération nationale » - tout cela fait écrire à la Tageszeitung que la communauté internationale a échoué en Côte d’Ivoire. Elle n’a pas pourtant pas ménagé sa peine. Depuis l’éclatement de la guerre civile en 2002, il y a eu cinq accords de paix, deux gouvernements de transition et quinze résolutions du conseil de sécurité de l’ONU. Mais la crise ivoirienne s’amplifie à vue d’œil. Plus le pays glisse sous une tutelle internationale, plus les nationalistes flairent un complot. C’est qu’il ne suffit pas, poursuit le journal, d’élaborer des plans de paix. Encore faut-il que ceux qui les rejettent soient amenés à changer d’avis par la persuasion ou soient mis hors d’état de nuire. C’est la tâche ingrate des pacificateurs. En Côte d’Ivoire elle a été négligée.