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Afropresse, l’Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron23 novembre 2007

Siemens/Nigéria – Economie – Santé

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Siège de Siemens à MunichImage : picture-alliance/dpa

Cette semaine nous commençons par un sujet bilatéral: le scandale Siemens au Nigéria. Des pots-de-vin d’un montant de 10 millions d’euros – c’est ce que le groupe industriel allemand aurait versé à des décideurs du très lucratif secteur des télécommunications au Nigéria. Les chiffres, lit-on dans la Tageszeitung de Berlin, ont été révélés par le Wall Street Journal et ont fait l’effet d’une bombe au Nigéria. Le parlement et les autorités du pays, l’un des plus corrompus au monde, enquêtent à présent sur ces pots-de-vin venus d’Allemagne. La liste publiée par le journal américain, note le journal, provient de l’annexe d’un jugement rendu le 4 octobre à Munich et condamnant Siemens à 201 millions d’euros d’amende pour des pots-de-vin versés à des responsables nigérians, russes et libyens. Au total 12 millions d’euros, dont la majeure partie, 10 millions donc, sont allés à des Nigérians. Or souligne le journal, pour le nouveau président Yar Adua, dont l’élection reste contestée en justice, c’est maintenant une question de crédibilité. Il lui faut nettoyer les écuries de son prédécesseur Obasanjo. En réaction à l’article du Wall Street Journal, il a donc ordonné une vaste enquête. Dans le sillage de l’affaire Siemens, c’est aussi la privatisation partielle de Nitel qui va être passée à la loupe, de même que toutes les licences d’exploitation pétrolière attribuées pendant le mandat d’Obasanjo. Autant dire, ajoute la TAZ, que des temps mouvementés s’annoncent à l’horizon pour les élites notoirement corrompues du Nigéria. La Süddeutsche Zeitung évoque elle aussi ce scandale Siemens qui impliquerait plus d’une centaine de personnes au Nigéria et qui a fait dire au porte-parole d’un parti d’opposition nigérian que dans cette affaire des pots-de-vin de Siemens son pays avait remporté la médaille d’or loin devant la Russie et la Libye.

A l’approche du sommet Europe-Afrique, les 8 et 9 décembre à Lisbonne, la presse allemande se penche sur un projet de partenariat nucléaire entre l’Union européenne et le continent africain. "Des centrales nucléaires pour l’Afrique" – c’est le titre choisi par le Financial Times Deutschland pour expliquer que le plan d’action, adopté cette semaine à Bruxelles par les ministres européens des affaires étrangères, vise à instaurer un dialogue sur l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire. De source diplomatique, écrit le journal, ce passage a été ajouté à la demande des Africains, avec l’appui de la France et de l’Italie. Il figurera dans la déclaration qui doit être adoptée le 8 décembre au sommet de Lisbonne. En matière de politique énergétique, l’Europe veut surtout resserrer sa coopération avec l’Afrique afin d’assurer son approvisionnement en énergie. Mais en termes de politique de développement le projet est contesté. C’est ainsi que la ministre allemande de la coopération, note le journal, est hostile aux grands projets nucléaires, selon elle l’électricité nucléaire n’est pas une solution judicieuse aux problèmes d’approvisionnement de l’Afrique. Sans compter que, toujours selon la ministre, il n’est pas certain que les pays africains, à l’exception de l’Afrique du sud, puissent garantir le respect des normes de sécurité. Le journal signale également l’hostilité des ONG allemandes de développement mais ajoute-t-il, si l’Allemagne prévoit de sortir du nucléaire à moyen terme, elle est majoritairement entourée de partisans du nucléaire. Raison pour laquelle l’Allemagne, l’Autriche et le Danemark ont échoué à faire supprimer le passage sur le nucléaire dans le texte de la déclaration.

Il sera aussi question à Lisbonne de coopération économique, et dans ce contexte la presse allemande se fait l’écho de bilans d’un rare optimisme sur les progrès économiques de l’Afrique. Comme le relève la Frankfurter Rundschau, l’Afrique est sur le point de se défaire de sa réputation de Cendrillon. Plusieurs études attestent d’importants progrès économiques à ce continent décrié comme un fief de crises, de corruption et de mauvaise gestion. La Banque mondiale, le Fonds monétaire international et la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement parlent de la phase la plus réjouissante depuis les années 60. La raison de ce nouvel optimisme, poursuit le journal, tient avant tout à une croissance économique qui éclipse à présent les taux habituels dans les nations industrielles. Depuis plusieurs années déjà, les économies africaines enregistrent une croissance moyenne de 5%. Certains pays comme la Mauritanie ou l’Angola ont même affiché l’an passé des taux de croissance respectifs de 19,8 et 17,6%. Mais note plus loin le journal, des raisons de s’inquiéter demeurent: l’Afrique souffre toujours d’une dramatique fuite des capitaux. Selon une étude de l’ONU, 400 milliards de dollars ont été expatriés d’Afrique depuis les années 70, soit près de deux fois le montant de la dette globale de l’Afrique.

Enfin l’hebdomadaire Die Zeit consacre cette semaine un long dossier au secteur de la santé en Afrique. Il publie notamment un article sur le travail d’un médecin américain, Paul Farmer, au Rwanda. Paul Farmer et son organisation, Partners in Health, sont soutenus par le fonds global de lutte contre le paludisme, la tuberculose et le sida. Et, comme l’écrit Die Zeit, ce médecin originaire de Boston est en train de révolutionner le système de santé au Rwanda, du moins à Rwinkwavu, dans l’est du pays. Il sait à quel point les conditions de vie sont importantes pour la santé. Son modèle est le médecin et révolutionnaire allemand Rudolf Virchow. Au milieu du 19ème siècle il a défini les épidémies comme des maladies collectives engendrées par des perturbations de la vie en communauté. Le lien entre l’hôpital, le patient et la collectivité est donc au coeur des projets de Partners in Health. Le trait d’union est assuré par des travailleurs sociaux et des accompagnateurs. Car, souligne le journal, la différence est grande selon que les patients avalent simplement des comprimés ou sont accompagnés dans leur thérapie. Si les malades par exemple prennent des médicaments anti-sida au mauvais moment ou oublient une dose, ils compromettent le succès du traitement et encouragent la propagation de résistances fatales.