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Afropresse, l'Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron28 mars 2008

Nous mettons tout d'abord le cap sur les Comores. Plusieurs journaux allemands relatent l'intervention militaire qui a chassé le président Mohamed Bacar de l'île d'Anjouan.

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Partisans de l'opposition au ZimbabweImage : AP

La Frankfurter Allgemeine Zeitung titre sur l'invasion de l'île renégate des Comores. Elle rappelle que Mohamed Bacar avait pris le pouvoir par un coup d'Etat en 2001 et qu'après l'adoption d'une nouvelle constitution pour ce qui était encore la "Fédération islamique des Comores", il avait mis un terme aux aspirations sécessionnistes d'Anjouan. La Tageszeitung parle quant à elle d'une victoire à la Pyrrhus pour le gouvernement central comorien. L'Union africaine, écrit le journal, a enfin trouvé un pays suffisamment petit pour une intervention militaire conjointe. Après des mois de préparatifs, la conquête de l'île d'Anjouan par des troupes soudanaises et tanzaniennes de l'Union africaine, mandatées par le gouvernement central comorien, s'est révêlée être une promenade de santé. La présence de soldats soudanais n'est pas dénuée d'ironie, poursuit la TAZ qui rappelle que le Soudan fait obstacle depuis des mois à une troupe d'observateurs de l'UA au Darfour. Mais Khartoum peut jouer au faiseur de paix en volant au secours d'un président comorien qui entretient de bonnes relations avec le Soudan, l'Iran, l'Arabie saoudite et les Etats du Golfe. Ceci dit, souligne le journal, l'intervention militaire ne résoud en rien la crise comorienne. Le président déchu de l'île d'Anjouan n'était pas illégal parce qu'il exerçait cette fonction mais uniquement parce qu'il avait fixé la date de sa réélection contre la volonté du gouvernement central. La fonction en soi, de même que les très larges prérogatives qui lui sont liées, restent inchangées, à Anjouan comme sur les deux autres îles de l'Union des Comores. Et chacun des gouvernements régionaux est en conflit avec le gouvernement central. Si cela perdure, l'intervention militaire n'aura pas apporté la paix.

Les élections générales au Zimbabwe ont également suscité bien des articles dans la presse allemande. L'hebdomadaire Die Zeit brosse dans son édition de jeudi dernier un portrait de Robert Mugabe. Son histoire, écrit Die Zeit, aurait pu être celle d'un héros. L'histoire d'un combattant de la liberté, qui a conduit son pays à l'indépendance, qui a restitué la dignité à son peuple, qui a initié une politique de réconciliation entre noirs et blancs. 28 ans se sont écoulés depuis l'accession de Robert Gabriel Mugabe au pouvoir. Aujourd'hui il est craint et méprisé. Et pourtant, prédit le journal, il sera très certainement réélu président. Il pose aussi une énigme à bon nombre de ses anciens admirateurs: comment un héros de la lutte de libération anti-coloniale a-t-il pu dégénérer en un tel dictateur? Pour Die Zeit, Mugabe souffre peut-être du syndrome dit de Caligula, cet empereur tyrannique et mégalomane de la Rome antique qui avait fait construire une mangeoire en ivoire pour son cheval favori. Mugabe en tout cas présente bel et bien les symptômes de cette maladie du pouvoir. Il veut régner seul et pour l'éternité, il flaire partout des conjurations, la moindre critique est un crime de lèse-majesté, il méprise le droit, tord le cou à la loi et incline à s'ériger en dieu. Mugabe a fait éliminer ses détracteurs les plus dangereux. Ils ont été empoisonnés à l'hôpital, sont morts dans de mystérieux accidents de la route comme le très charismatique candidat à la présidence Josiah Tongogara ou ont été massacrés par la cinquième brigade. Dans les années 80, cette unité d'élite formée en Corée du nord a tué entre 3 000 et 20 000 partisans de son ennemi héréditaire, Joshua Nkomo. Alors note un peu plus loin Die Zeit, la colère peut bien grandir dans la rue, la maxime de Caligula garde tout son effet: qu'ils me haïssent pourvu qu'ils me craignent. Le Tagespiegel de Berlin s'intéresse de son côté à Simba Makoni, l'ancien ministre des finances candidat à la présidentielle, contre Mugabe. C'est la première fois, écrit le journal, qu'un membre de l'establishment défie directement le potentat au pouvoir depuis 28 ans. Makoni explique sa décision par le fait que la situation au Zimbabwe est devenue insupportable. Il ne dit pas en revanche pourquoi il s'est tu pendant si longtemps. La Zanu-PF l'a exclu de ses rangs, mais Makoni ne dispose à la base du parti que d'un faible appui. Ses partisans se recrutent principalement chez les intellectuels et les citadins - et donc bien souvent aussi chez les partisans du Mouvement pour le changement démocratique de l'opposant Morgan Tsvangirai. Le journal relève également le flou de son programme. Jamais il n'a condamné le massacre de Ndebele dans les années 80. En revanche il a défendu le vol des terres, légalisé par Mugabe, contre les fermiers blancs. De plus, poursuit le Tagesspiegel, en tant que ministre des finances il n'a pas fait grand chose contre l'inflation qui s'annonçait déjà à l'époque. Les sondages, peu fiables, le classent actuellement en troisième position derrière Tsvangirai et Mugabe, précise encore le journal dans cet article paru jeudi.

Un article réconfortant pour terminer. Il occupe toute une page de la Tageszeitung et relate comment le Sahel est en train de reverdir au Niger. Les photos prises par satellite l'attestent: au cours des 25 dernières années, 50 000 km2 d'arbres ont poussé au Niger. Les innombrables coopérants étrangers présents dans le pays ne semblent pourtant pas s'en apercevoir, note le journal. Comme le souligne Larwanou Mahamane, un forestier nigérien, il ne s'agit pas de projets spectaculaires, lancés par des organismes d'aide ou le gouvernement. L'initiative est venue des paysans. Ils ont vécu les grandes sécheresses des années 70 et 80, et ils se rendent compte au jour le jour des bienfaits des arbres. Les racines fixent le sol, le rendement en est amélioré. Exemple dans le village de Dan Saga, où un paysan, Issa Ibrahimi, raconte qu'autrefois un hectare permettait de remplir sept silos de mil. A présent un hectare produit le double. Autre village dont il est question dans l'article, celui de Kupkup où les paysans ont commencé à soigner les jeunes pousses qui poussaient à l'état sauvage dans leurs champs. Depuis peu, ils plantent eux-mêmes des arbres. SOS Sahel a conduit quelques villageois dans le lointain village de Dan Saga pour que les paysans puissent échanger leurs expériences.