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Afropresse, l'Afrique à travers la presse allemande

Sandrine Blanchard19 septembre 2008

Dans les journaux de la semaine: une poignée de mains, celle échangée lundi dernier au Zimbabwe, par Morgan Tsvangirai et Robert Mugabe.

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D.g.à.d.: Morgan Tsvangirai, Robert Mugabe, et Arthur MutambaraImage : AP

Après des mois de tensions, le leader du MDC et le chef de l’Etat zimbabwéens sont finalement parvenus à un accord de partage du pouvoir. Et les deux hommes étaient en photo dans la plupart des quotidiens allemands. La correspondante en Afrique du sud de la tageszeitung veut croire à un « renouveau politique », à Harare. Notre confrère qualifie cet accord d’historique. Elle souligne qu’il est le premier du genre depuis l’indépendance du pays, en1980.

Le texte prévoit que Robert Mugabe reste à la tête de l’Etat, constitue le gouvernement et demeure chef des armées. Morgan Tsvangirai quant à lui, en devenant premier ministre, dirigera les affaires courantes du gouvernement et commandera à la police. La taz précise également que Morgan Tsvangirai présidera le conseil des 31 ministres sans que le chef de l’Etat n’y assiste. Par ailleurs, avec le poste assigné à Arthur Mutambara, le Mouvement pour le Changement démocratique et son aile sécessionniste obtiennent un portefeuille ministériel de plus que le Zanu-PF de Mugabe.

La presse allemande salue l’accord scellé au Zimbabwe ... avec prudence

Les éditorialistes allemands – tout comme les représentants européens, d’ailleurs - restent prudents. Ils savent bien que – pour reprendre les propos de Robert Mugabe – l’accord contient « plein de choses » que les signataires n’approuvent pas. D’ailleurs la Süddeutsche Zeitung parle d’un « Pacte des ennemis héréditaires » qui aura au moins permis la reprise de l’aide humanitaire internationale au Zimbabwe. La Berliner Zeitung remarque de son côté que les deux anciens opposants, Arthur Mutambara et Morgan Tsvangirai, n’ont ni l’un ni l’autre mentionné dans leur discours les persécutions dont ils ont été victimes avec leurs partisans. Le journal cite le leader du MDC qui souhaite désormais aux Zimbabwéens de « vivre sans peur, sans avoir faim, et sans oppression », ainsi qu’un « retour des médecins dans les hôpitaux et des enseignants dans les écoles ».

La Frankfurter Allgemeine Zeitung se demande si l’accord de partage du pouvoir est vraiment viable sur le long terme, mais le quotidien de Francfort estime qu’il faut saluer l’effort. Alors oui, même l’Union africaine est sceptique, mais c’est déjà un succès de la médiation sud-africaine que d’avoir réussi ce à quoi plus personne ne croyait: rassembler autour d’un même texte Zanu-PF et MDC. Peut-on faire le parallèle avec la médiation du Ghanéen Kofi Annan pour régler le conflit au Kenya, en début d’année ? Eh bien non, écrit la FAZ : l’importance géopolitique du Kenya, avec la présence d’Al Qaida dans la Corne de l’Afrique, est plus importante que celle du Zimbabwe, et la solution apportée à Nairobi était américaine, plus qu’africaine.

Wählerin an Wahlurne in Luanda Angola
Electrice à Luanda (Angola) le 5 septembre dernierImage : picture-alliance/dpa

Dans Die Zeit, un article panafricain intéressant, qui s’intitule « Attention, populistes ». L’hebdomadaire de Hambourg écrit que les chances de l’Afrique de devenir prospère dépendent de son évolution politique. Pendant longtemps, poursuit Die Zeit, le continent a souffert de régimes qui, soit ne se préoccupaient pas des pauvres, soit étaient enfermés dans une idéologie marxiste, ce qui revenait finalement au même pour la population. Dans les années 1990, on a assisté à une vague de démocratisation du continent, qui a fait naître un certain espoir… et puis voilà que l’Afrique est de nouveau ébranlée par un nouveau séisme dû à la fragilité des systèmes politiques et à leur incapacité de gérer la complexité de l’économie. Die Zeit cite le Zimbabwe en exemple. Vu de l’extérieur, le pays est doté d’un parlement, de tribunaux, de plusieurs partis politiques, bref, d’institutions démocratiques – d’ailleurs le régime organise des élections… Seulement voilà : la société civile ne parvient pas à résister aux intimidations d’un régime qui n’hésite pas à recourir à la violence pour se maintenir. Or, poursuit Die Zeit, la démocratie réclame un certain équilibre, des contrôles efficaces des dirigeants, comme à Madagascar ou en Zambie. Alors qu’en Angola, autre exemple cité par l’hebdomadaire, les résultats de l’opposition aux élections de l’année prochaine seront vraisemblablement une fois de plus décidés à l’avance par le MPLA au pouvoir, qui vient de gagner les législatives du 5 septembre dernier, avec plus de 82% des voix, contre un peu plus de 10% pour l’Unita de l’opposition.

Warteschlangen bei den Wahlen in Ruanda
Deux femmes à KigaliImage : AP

Autre scrutin : les législatives au Rwanda

Les journaux s’intéressent aussi aux élections législatives au Rwanda, remportées haut la main par le camp du président de Paul Kagame. La tageszeitung explique que le parlement rwandais est unique en son genre. D’abord, il est l’assemblée qui a le plus fort taux de femmes au monde, presque 50%. Mais aussi parce que n’y siègent que des partis de la coalition gouvernementale. Ce qui fait dire au journal que « le paysage politique rwandais est limité, puisque seuls ceux qui approuvent les orientations du gouvernement peuvent s’exprimer librement »... pour éviter, officiellement, de raviver les tensions ethniques qui avaient conduit au génocide de 1994. La taz rappelle cela dit les progrès de ces dernières années : l’éducation gratuite en primaire, l’accès gratuit aux soins de base, le soutien à l’émancipation de la femme ou encore la fin de la crise des réfugiés. Mais sur le front des expropriations de force, pourtant très peu populaires, le régime ne rencontre aucune opposition digne de ce nom : ni le parti libéral ni le parti social-démocrate ne critiquent ouvertement le RPF de Kagame. A lire également dans la tageszeitung : un article sur les représailles dont sont victimes certains témoins qui s’expriment devant les gacacas…

Violences au Nord-Kivu

La taz évoque aussi les combats qui ont repris, au Congo voisin, entre l’armée régulière de RDC et les rebelles du CNDP. Ces nouvelles violences, écrit le journal, ont poussé 50 à 100 000 personnes à fuir. Et désormais, un cinquième de la population du Nord-Kivu est composé de réfugiés. Un nouveau manquement à l’accord de paix signé à Goma au mois de janvier dernier.