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Afropresse, l'Afrique à travers la presse allemande.

Marie-Ange Pioerron26 septembre 2008

Sans surprise l'Afrique du sud fait cette semaine les grands titres de l'actualité africaine dans les journaux allemands.

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Prestation de serment du président MotlantheImage : AP

La Süddeutsche Zeitung tout d'abord s'indigne de la façon dont l'ANC a contraint Thabo Mbeki à la démission. Le Congrès national africain, auquel on prêtait autrefois des vertus comme la discipline, la solidarité et le respect, s'est transformé en un mufle politique et a chassé le chef de l'Etat du pouvoir de manière ignoble. Mbeki a fait beaucoup d'erreurs, concède le journal, mais son mandat se serait de toute façon achevé au printemps prochain. Le contraindre prématurément à la démission était inutile et engendre des peurs et des tensions. Pour la Frankfurter Allgemeine Zeitung, la destitution de Thabo Mbeki flaire le coup d'Etat. Pourquoi, s'interroge le journal, ne pas avoir renversé Mbeki par une motion de censure et convoqué de nouvelles élections. La démarche aurait été plus propre. Mais l'ANC a peur de nouvelles élections, il craint que beaucoup de ses électeurs traditionnels n'aillent pas voter. Die Welt se fait l'écho de la déception provoquée par la chute de Thabo Mbeki dans le ghetto noir de Guguletu au Cap. Nombreux sont ceux qui redoutent des conflits entre Xhosa et Zoulous, écrit Die Welt. Jacob Zuma - celui qui sera donc très probablement le vainqueur des élections l'année prochaine - Jacob Zuma est zoulou. A Guguletu la majorité est xhosa, et le moins que l'on puisse dire, ajoute die Welt, est que les deux groupes ethniques ne s'entendent pas bien. Zuma veut à tout prix accéder au sommet, écrit la Süddeutsche Zeitung. Mais peut-être va-t-il encore trébucher sur les accusations de corruption qui ont assombri sa carrière. Cela dit poursuit le journal, une chose est sûre: Mbeki et Zuma sont tous deux très loin de la stature de Mandela. L'héritage du père n'est pas perdu, mais il est en danger, plus encore avec Zuma peut-être qu'avec tout autre candidat. La soif de pouvoir et l'égoisme pèsent plus lourd aujourd'hui que les anciens idéaux de l'ANC. Si cette culture politique fait école au Cap, l'Afrique du sud est mal partie, elle qui voulait briller comme modèle pour le continent.

En attendant les élections de 2009, le parlement sud-africain a élu jeudi le vice président de l'ANC, Kgalema Mothlante, comme président intérimaire. Et la presse allemande attend de lui qu'il apaise un peu les tensions.

Comme le note la Tageszeitung, cet ancien partisan du Mouvement de la conscience noire passe pour un proche de Zuma. Mais ses interventions publiques sont infiniment plus décentes et plus modérées que celles du président de l'ANC. Son élection comme président intérimaire est censée avoir un effet conciliateur. La Süddeutsche Zeitung brosse un portrait de cet homme de 59 ans en soulignant qu'avec sa pondération il est peut-être, précisément, la bonne personne pour ramener le calme dans le pays après la tempête qui a secoué l'Afrique du sud. Sa tâche la plus urgente sera de redonner confiance aux Sud-Africains dans leur gouvernement. Il a huit mois devant lui pour faire ses preuves comme gestionnaire de crise, écrit le journal.

Une crise dont le dénouement provisoire est finalement suivi d'un oeil envieux par le reste de l'Afrique. C'est ce qu'estiment en tout cas certains journaux allemands.

Par exemple la Tageszeitung qui évoque le dernier coup d'Etat en Mauritanie. Le changement de pouvoir en Afrique du sud, écrit le journal, car c'est bel et bien d'un changement de pouvoir qu'il s'agit, même s'il se déroule à l'intérieur d'un parti - ce changement donc est perçu ailleurs en Afrique comme un progrès dans la culture politique. Il passe pour un contre-exemple positif à la façon dont des présidents conservent le pouvoir même lorsqu'ils ont perdu une élection: Robert Mugabe au Zimbabwe par exemple ou Mwai Kibaki au Kenya. Pour l'instant, estime le journal, les partis au pouvoir en Afrique ont des raisons d'être envieux de l'ANC et de son art de se débarrasser de puissants mal-aimés. En RDC par exemple où, peu de temps après la démocratisation, un président maladroit replonge le pays dans la guerre civile. Au Nigéria où un président invisible et prétendument gravement malade, imposé au parti au pouvoir par son prédécesseur Obasanjo, retarde les réformes qui s'imposent dans ce pays pétrolier corrompu. Ces exemples de statu quo politique montrent à quel point l'Afrique du sud est en avance sur le reste de l'Afrique en matière de sérénité politique.

Le même journal, la Tageszeitung, se penche aussi sur la situation en République démocratique du Congo.

Tout d'abord sur les combats dans le Nord-Kivu où le flot de réfugiés qui ont fui la ville de Masisi marque un triste paroxysme dans le drame humanitaire que représente cette nouvelle guerre dans l'est du Congo, écrit notre confrère. La population du Nord-Kivu, quatre millions d'habitants, se classe maintenant par ethnies. Des milices ethniques d'auto-défense sont en train de se former, elles attisent la dynamique d'une guerre inextricable. Dans un tel contexte les plans de paix de l'ONU sont totalement inopérants, ajoute la Taz. La TAZ qui dans son édition de vendredi évoque aussi la démission du premier ministre Antoine Gizenga. Une démission qui intervient en plein milieu de cette nouvelle guerre à l'est précisément, et alors que le pays traverse de graves problèmes politiques et économiques, souligne le journal. Le pays tout entier est secoué actuellement par des grèves en série dans l'éducation et la santé. La guerre à l'est contre les rebelles de Laurent Nkunda met en évidence l'inefficacité de l'armée gouvernementale. Aucun successeur n'est en vue pour remplacer Antoine Gizenga. Cela renforce le président Kabila, souligne la Tageszeitung.