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Afropresse, l'Afrique à travers la presse allemande.

Marie-Ange Pioerron13 février 2009

Un grand sujet domine cette semaine l'actualité africaine et cela n'a rien de surprenant : c'est la mise en oeuvre de l'accord de partage du pouvoir au Zimbabwe.

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Morgan Tsvangirai au centreImage : AP

Morgan Tsvangirai, la main levée pour prêter serment comme premier minsitre devant Robert Mugabe: la photo a été reprise par beaucoup de journaux, parfois même en première page comme à la une de la Süddeutsche Zeitung. Dans ses pages intérieures, le journal parle d'une expérience politique osée, deux camps ennemis vont tenter de gouverner ensemble. Si cette coalition fort inhabituelle se révèle solide et capable d'entreprendre des réformes, le Zimbabwe, poursuit le journal, peut espérer une très forte aide extérieure ainsi que de nouveaux investissements pour reconstruire son économie en ruines. La plupart de nos confrères pourtant ne sont guères optimistes, ou restent pour le moins sceptiques. Que peut-on trouver de bon, demande par exemple la Frankfurter Allgemeine Zeitung, à ce que celui qui est responsable de la misère du pays - le président Mugabe - fasse monter à bord du bateau gouvernemental celui qui aurait dû le remplacer si les choses s'étaient déroulées correctement au Zimbabwe. Sans compter souligne la FAZ, qu'il n'y a pas vraiment partage du pouvoir, ce qui aurait déjà été un compromis pourri, L'opposition n'obtient pas même la responsabilité pleine et entière du ministère de l'intérieur, Pour le quotidien Die Welt, l'Afrique du sud, qui apporte son appui politique et économique au Zimbabwe, aurait pu contraindre le régime Mugabe à de véritables compromis, Au lieu de quoi Prétoria a mis la pression sur Tsvangirai. Mugabe, ajoute Die Welt, contrôle les forces de sécurité et a prolongé à la hâte le mandat du patron de la banque centrale, "l'architecte" de l'hyperinflation. Mugabe ignore l'intéret national, il ne connait que son propre intérêt. Tsvangirai est donc condamné à l'échec. Partage du pouvoir à la zimbabwéenne, titre la Berliner Zeitung qui estime que la nouvelle construction gouvernementale porte en elle le mécanisme d'un blocage réciproque. Tout est fait pour maintenir la même situation fatale jusqu'à ce que le vieux Mugabe parte enfin en enfer et que les deux camps se livrent le combat décisif, ou se mettent d'accord. C'est donc à juste titre, poursuit le journal, que les occidentaux hésitent à proposer une aide financière et à lever les sanctions contre Mugabe et ses amis. De telles concessions exigent au préalable la libération des opposants en prison, la mise au pas des brutaux services de sécurité et la garantie de la liberté d'opinion. Le progrès est un escargot, conclut le journal, au Zimbabwe il laisse derrière lui une trace sanglante. La Tageszeitung pourtant ne veut pas perdre tout espoir. Le "deal" qui a été négocié pendant des mois , écrit le journal, est une solution transitoire , avec au bout de nouvelles élections dans un an ou deux. Pour l'ancien leader syndical Tsvangirai, il n'y avait pas d'alternative, même s'il lui est reproché d'avoir "trahi" ses partisans. Il a échoué dans la mobilisation non violente des masses contre le brutal régime militaire de Mugabe. Que cette coalition très controversée échoue à son tour n'est pas à exclure, poursuit le journal. Elle représente néanmoins pour le Zimbabwe la chance d'un nouveau départ. Il ne restait plus rien aux Zimbabwéens hormis le vague espoir que quelque chose bouge dans les structures politiques figées du pays.

La presse fait aussi une large place cette semaine aux troubles à Madagascar.

La Frankfurter Allgemeine Zeitung parle d'une lutte de pouvoir entre millionnaires. Une curieuse lutte de pouvoir entre le président Marc Ravalomanana, 59 ans, et le maire déchu d'Antananarivo, Andry Rajoelina, 34 ans. Rajoelina, écrit le journal, veut le pouvoir, à n'importe quel prix. Comme Ravalomanana, c'est un homme d'affaires qui a réussi. Nombreux sont ceux qui le croient téléguidé par la clique de l'ancien président Ratsiraka, note plus loin le journal. Toujours est-il qu'il sait jouer sur la corde de la fierté nationale des Malgaches. Principalement en dénonçant le projet de contrat avec la firme sud-coréenne Daewoo, à savoir la location de terres sur une surface grande comme la moitié de la Belgique. A Madagascar comme ailleurs en Afrique la question des terres est hautement émotionnelle. Vendre des terres à des étrangers passe pour une trahison, la propriété foncière ayant aussi une dimension spirituelle. Les âmes des aieux ne peuvent vivre que là où la terre appartient à leurs descendants. Pour la Süddeutsche Zeitung cette lutte de pouvoir a déjà fait trop de morts pour que le gouvernement puisse espérer un essoufflement du mouvement de contestation. Le maire destitué de la capitale surfe sur une vague de frustration. La Tageszeitung, qui consacre toute une page à Madagascar, évoque très longuement le "deal" avec Daewoo et se demande s'il a encore une chance de se concrétiser, tant il est devenu le symbole de la politique d'un président qui dirige le pays comme son entreprise.

Enfin en plus bref, et à propos de la République démocratique du Congo, la Tageszeitung constate un soupçon de normalité dans l'est du pays. La fin provisoire de la rébellion de Laurent Nkunda et la coopération militaire entre le Rwanda et le Congo apaisent momentanément la situation, écrit le journal. Goma respire, les bars et les hôtels sont pleins. Mais la nouvelle campagne contre les milices hutues rwandaises et l'indiscipline de l'armée congolaise comportent de nombreux risques.