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Bruxelles accuse l'Allemagne d'aggraver la crise

15 novembre 2013

La Commission européenne a annoncé mercredi qu'elle ouvrait une enquête contre l'Allemagne en raison de ses déficits jugés excessifs. Cette décision s'ajoute aux critiques récentes émises par les États-Unis et le FMI.

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European Union Economic and Monetary Affairs Commissioner Olli Rehn presents the EU executive's autumn economic forecasts during a news conference at the EU Commission headquarters in Brussels November 5, 2013. The euro zone economy will expand slightly more slowly next year than previously expected because of weaker private demand and investment and inflation will stay well below the central bank target over the next two years. REUTERS/Francois Lenoir (BELGIUM - Tags: POLITICS BUSINESS)
Le commissaire Olli Rehn lors de la conférence de presse mercredi 13 novembre à BruxellesImage : Reuters

Bruxelles a donc osé. La Commission accuse l'Allemagne d'avoir trop de succès dans ses affaires, c'est-à-dire de vendre trop bien ses produits. En fait c'est plus compliqué. D'abord, l'Allemagne n'est pas la seule à être visée par la Commission. 16 pays en tout vont être concernés par une enquête, y compris la France. Mais un seul l'est à cause d'un surplus excessif de son commerce extérieur : l'Allemagne. Cette critique fait suite à celle des Etats-Unis et du FMI qui réclament à l'Allemagne de plus consommer, de plus ouvrir son marché aux produits extérieurs.

En clair, Bruxelles s'est joint à ces critiques pour dire une chose simple : l'Allemagne vend beaucoup de voitures ou de machines et ce n'est pas le plus grave. Le souci principal est qu'en retour, l'Allemagne achète trop peu en général et trop peu de produits étrangers en particulier. Les salaires sont trop bas, la consommation pas assez développée. Qui plus est, l'Allemagne n'investit pas assez dans ses infrastructures, elle devrait construire plus de routes ou d'autoroutes par exemple.

Voitures allemandes et sacs italiens

FILE - In this Tuesday, March 19, 2013, file photo, the company logo of car manufacturer BMW is pictured on a car in Munich, Germany. BMW reports quarterly earnings on Tuesday, Nov. 5, 2013. (AP Photo/Matthias Schrader)
L'Allemagne a dégagé un excédent commercial de 46 milliards d'euros au second trimestre 2013, soit plus que la ChineImage : picture alliance/AP Photo

Résultat : les surplus allemands creusent les déficits des autres pays européens. Pour schématiser, les Allemands n'ont pas assez l'esprit d'équipe, ils s'enrichissent sur le dos de leurs voisins qui achètent des voitures allemandes tandis que les Allemands rechignent à acheter des voitures italiennes ou françaises. C''est d'ailleurs sur la base d'un critère tout à fait objectif que la Commission Européenne a décidé d'ouvrir une enquête sur l'Allemagne : parce que le surplus commercial de ce pays dépasse la limite maximum de 6% du PIB, un critère macro-économique au-delà duquel il faut lancer une alerte car les risque de décalages avec les autres pays de la zone euro sont trop grands.

En Allemagne, la critique a été accueillie avec calme. Jens Weidmann, le président de la Bundesbank, a rappelé que l'Allemagne ne vendait pas l'essentiel de ses produits en Europe. Il a raison. Si la part de son export vers les pays européens représentait la moitié de la valeur totale en 2006, ce ratio n'est plus que de 28% aujourd'hui. Donc l'Allemagne exporte avant tout vers les pays émergents. Par ailleurs, même si les Allemands se mettaient à dépenser rien ne garantit qu'ils achèteraient des sacs italiens Prada ou du Cava espagnol.

Donc voilà où nous en sommes. Le meilleur élève de la classe se fait taper sur les doigts. Pas sûr que cela bouleverse les Allemands. Mais peu à peu c'est l'image d'un pays taxé d'égoïsme qui se dégrade. Et c'est ce qui à terme pourrait finir par faire bouger le gouvernement.

Investir dans les services et les routes

bag with euro symbol is seen during a meeting of head of state or goverment of the Euro zone in Brussels, Belgium on 2010-05-07 © by Wiktor Dabkowski
Bruxelles demande à Berlin de relancer sa consommation domestiqueImage : picture-alliance/Wiktor Dabkowski

Mais il faut aussi tempérer la décision de la Commission européenne d'ouvrir une enquête. D'abord celle-ci devrait rendre ses conclusions en mars 2014 mais il est peu probable que l'Allemagne doive un jour payer la moindre amende. En plus, Oli Rehn, le Commissaire européen à l'Economie et aux Finances, a insisté sur le fait que l'Allemagne reste un modèle qui mérite des louanges plus que des récriminations.

Une manière de sermoner quasiment en s'excusant de le faire:

« L'Allemagne est le moteur de la croissance en Europe et ceci en raison des performances de son commerce extérieur et de ses échanges avec les pays émergents. Soyons très clair sur ce point : nous ne critiquons pas la compétitivité commerciale de l'Allemagne et ses succès à l'international. En fait, c'est ce que nous souhaitons pour tous les pays membres. Mais un surplus commercial persistant signifie aussi que les Allemands investissent une large partie de leurs économies à l'étranger. La question est de savoir si cela est vraiment efficace, même d'un point de vue allemand. C'est le débat de savoir si les Allemands investissent assez dans leur propre pays.

Nous avons déjà pointé du doigt dans quels domaines l'Allemagne pourrait renforcer sa demande domestique. Comme le président Barroso l'a dit, les réformes dans le secteur des services représenteraient un de ces domaines. Plus de demande en Allemagne peut avoir des conséquences positives pour les pays voisins. Mais la condition pour cela est que leurs propres produits et services soient suffisamment compétitifs et qu'ils poursuivent leurs efforts de réformes. Sinon, plus de demande en Allemagne ne bénéficierait pas aux pays voisins mais à la Chine ou aux autres pays émergents. »