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Changement de ton dans les relations germano-russes

Anne Le Touzé17 janvier 2006

Première visite de la chancelière allemande Angela Merkel hier à Moscou. Une rencontre de trois heures avec Vladimir Poutine, où il a été question, notamment, des relations économiques entre l’Allemagne et la Russie, du nucléaire iranien, mais également de la situation sensible en Tchétchénie. Alors qu’à l’issue de la rencontre, Vladimir Poutine et Angela Merkel se disent chacun de leur côté satisfaits par le dialogue « ouvert », la presse allemande relève surtout le changement de ton dans la politique russe de l’Allemagne, et la sobriété de la relation engagée par la chancelière avec le président russe, qui se démarque nettement de l’amitié qu’entretenait Vladimir Poutine avec Gerhard Schröder.

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Angela Merkel et Vladimir Poutine font des efforts visibles pour se rapprocher, mais le coeur y est moins que du temps de Gerhard Schröder.
Angela Merkel et Vladimir Poutine font des efforts visibles pour se rapprocher, mais le coeur y est moins que du temps de Gerhard Schröder.Image : AP

En remerciant la chancelière pour sa « franchise dans toutes les questions », note la Frankfurter Rundschau, Vladimir Poutine marque bien le désaccord entre les deux parties sur, notamment, la Tchétchénie. Depuis que Gerhard Schröder avait estimé, il y a cinq ans, que l’on devait reconsidérer la question tchétchène dans le contexte du terrorisme international, plus aucune critique n’était sortie de la chancellerie allemande jusqu’à ce jour. Le changement de ton est donc reconnaissable. Ce sujet, comme tous les autres évoqués au cours de la rencontre, n’est plus l’affaire d’une entente complice entre deux amis, mais une question objective, relève le journal. Une bonne chose, car le partenariat entre ces deux grands pays européens est trop important pour le sacrifier à une admiration réciproque.

Schröder avait une compréhension sans limite pour Poutine, rappelle la Berliner Zeitung. Jamais un mot de critique n’a passé ses lèvres, ni sur la guerre en Tchétchénie, ni sur le fait que les médias et les journalistes sont tenus en bride, ni encore sur les pratiques arbitraires de la justice russe. En prenant la succession de Schröder, Angela Merkel comprend elle aussi l’importance vitale du partenariat stratégique avec Moscou. Mais elle n’en perd pas pour autant la parole. Il est sans doute aberrant de croire que l’on peut faire figurer la question des droits humains et civils dans les contrats commerciaux. Mais le fait que l’on peut assurer une coopération économique sans pour autant taire les droits de l’homme, cela Angela Merkel l’aura au moins montré à Gerhard Schröder.

Pour la Süddeutsche Zeitung, le tour de force de la chancelière a été de montrer sa distance par rapport à une Russie qui s’éloigne de plus en plus de la démocratie, et en même temps de chercher le rapprochement avec cette Russie qui assure à l’Allemagne du gaz et du pétrole, et sans laquelle le conflit nucléaire avec l’Iran ne pourra être résolu. Mais si Angela Merkel a remporté avec succès cette épreuve de politique étrangère, il est encore trop tôt pour parler d’un changement dans la politique russe de l’Allemagne, estime le quotidien. Après tout, Schröder non plus n’était pas tombé dans les bras de Poutine dès sa première visite. Merkel va donc devoir montrer sur le long terme qu’on peut avoir un partenariat économique avec la Russie sans pour autant lui vendre son âme.

Enfin, la Frankfurter Allgemeine Zeitung estime qu’après avoir évoqué Guantanamo à Washington, Angela Merkel a également réussi son passage à Moscou. En quelques semaines seulement, la chancelière a prouvé qu’elle savait faire bonne figure à l’étranger et s’accommoder de caractères aussi différents que Berlusconi, Blair ou Chirac. Elle s’est émancipée de la « voie allemande » de Schröder, sans pour autant abandonner la prétention de l’Allemagne à un rôle autonome dans la politique mondiale. Les jalons de la politique étrangère du nouveau gouvernement sont désormais posés, conclut le journal. Il reste maintenant à montrer ce que l’Allemagne opèrera dans le monde grâce à sa chancelière. Mais les occasions ne manquent pas.