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Cinquantenaire : Les relations franco-sénégalaises

30 mars 2010

Les 50 ans d'indépendance du Sénégal sont célébrés officiellement le 4 avril 2010. Aujourd'hui encore, l'ancienne "colonie préférée" des Français entretient des relations assez ambivalentes avec la France.

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Quelle relation les jeunes Sénégalais entretiennent-ils à leur passé?Image : DW

Un cours d'histoire au lycée Blaise Diagne de Dakar. Une soixantaine d'élèves, filles et garçons, se pressent sur les bancs de la classe. Dès le matin, l'air est confiné dans la salle surchargée. Et pourtant, les lycéens sont extrêmement concentrés. La leçon du jour porte sur la fin de l'ère coloniale.

« Bien sûr, ça m'intéresse, en tant que Sénégalais et en tant qu'Africain. Il faut connaître les principaux événements du passé de son pays! »

Quand il évoque le sujet, Mohammed Dia, un élève plutôt timide, prend confiance en lui. Que les Senégalais étudient l'histoire du Sénégal, n'est pas toujours allé de soi, comme le rappelle son professeur, Ibou Diallo:

« Nos aïeux devaient étudier l'histoire de France. On leur parlait de Jeanne d'Arc, de Napoléon, de nos ancêtres les Gaulois. Ce n'était pas ça, l'histoire du Sénégal, l'histoire de l'Afrique. »

Ce n'est que vers la fin des années 1970 que les manuels d'histoires ont été adaptés aux réalités du pays et que l'histoire du Sénégal a fait son entrée dans les programmes scolaires.

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Dépoussiérer l'histoire pour la faire sienne.Image : AP

Aujourd'hui, les jeunes Sénégalais ont une conception de la colonisation bien qu'il ne l'aient pas connue. Ibou Diallo, le professeur, a une quarantaine d'années. Lui non plus n'a donc pas connu l'époque de la domination française, ce qui ne l'empêche pas d'avoir un avis tranché sur la question :

« Nous vivons encore les séquelles de la colonisation. Nous avons été dominés longtemps. Les colons nous ont imposé leurs pratiques agricoles. Ils nous ont obligés, par exemple, à cultiver du coton ou de l'arachide. Tout ce qui était important pour eux. Du coup, le Sénégal ne produit toujours pas ce dont les Sénégalais ont besoin. Comment se développer dans ces conditions ? »

Outre l'agriculture, la langue pose aussi problème, selon Ibou Diallo. A la maison, les enfants parlent des langues vernaculaires, comme le wolof, le peulh, le diolla, le mandingue, mais, à l'école primaire, les cours se font en français.

« Les colons nous ont imposé leur langue. Nous, les Africains, nous sommes les seuls à ne pas apprendre notre langue maternelle. L'enseignement est lacunaire. Cela a forcément des répercussions sur le développement du pays. »

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Rester au pays pour aider à le construireImage : DW/Klaudia Pape

Au centre ville, un palais abrite l'ambassade de France. C'est là que Jean-Luc Le Bras travaille, avec vue sur l'Atlantique. Il dirige la coopération franco-sénégalaise et habite en Afrique depuis plusieurs décennies.

« On a toujours tendance à rejeter la faute sur les autres. Mais 50 ans après l'indépendance, il faut bien reconnaître que la France n'est pas la seule à avoir commis des erreurs. Est-ce que 50 ans après, on peut encore dire : la colonisation, la colonisation… C'est trop facile. »

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à DakarImage : DW/Klaudia Pape

De nombreux Sénégalais partagent cet avis. Selon eux, ce sont les dirigeants politiques sénégalais qui sont responsables de la misère économique de leur pays. D'ailleurs, certains élèves de terminale du lycée Blaise Diagne espèrent partir se former en France :

« J'aimerais bien aller en France pour étudier. Ici, au Sénégal, c'est difficile. Mon rêve, c'est de devenir avocat. »

Ibou Diallo tente de convaincre ses élèves de rester.

« C'est ici que j'enseigne. Je ne vais pas partir en France sous prétexte que je gagne trop peu, pour aller former des élèves Français. Si j'avais eu la possibilité d'étudier en France, en tout cas, je serais revenu, pour aider au développement de mon pays. Les Allemands ont construit leur pays quand ils ont dû le faire, les Français et les Américains aussi. Les Sénégalais aussi doivent construire le leur. »

Auteurs: Klaudia Pape, Sandrine Blanchard
Edition: Audrey Parmentier