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Démocratie chaotique

Yann Durand24 avril 2007

Le nouveau président du Nigeria est contesté. De lourds soupçons de fraude électorale pèsent sur le scrutin de samedi et plusieurs voix demandent l’annulation du vote. Umaru Yar’Adua du PDP, le parti du président sortant, hérite d’une situation tendue. D’aucuns ne l’estiment pas capable d’y faire face dans les conditions actuelles. La presse allemande commente abondamment le sujet.

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Un calme relatif régnait encore durant la campagne présidentielle au Nigeria
Un calme relatif régnait encore durant la campagne présidentielle au NigeriaImage : AP

Deux choses ont caractérisé le Nigeria au niveau international ces dernières années, relève la Frankfurter Allgemeine Zeitung : Il s’est vu octroyer le statut de candidat "naturel" pour un siège au sein d’un conseil de sécurité élargi et comptait parmi les états dont le chef était régulièrement invité au sommet du G8. À cette époque le président Obasanjo était "le visage" de l’Afrique. "Mais", poursuit le journal, "c’était culotté, sans scrupules et même criminel". Il s'agit de la façon dont le candidat du parti au pouvoir a été imposé. Il est certes impertinent d’exiger des standards européens mais couvrir des fraudes électorales l’est tout autant, juge la FAZ. On peut également y lire un paternalisme dédaigneux.

D’autant que comparer l’actuel Nigeria bouillonnant à celui exsangue de la dictature militaire est une ineptie, affirme la Tageszeitung de Berlin. Si il y a eu des protestations aussi massives et autant de fraudes, c’est que les 140 millions de nigérians ne se laissent plus intimider. Ils ne rentrent pas bravement à la maison lorsque les policiers ferment les bureaux de vote en s’emparant des bulletins, mais contestent à grand bruit à l’annonce surréaliste de la victoire d’un politicien mal-aimé. Selon la TAZ, la falsification la plus osée ne peut hypothéquer le résultat de huit ans de démocratie.

Umaru Yar’Adua, soupçonné d’être une marionnette du président sortant, aura encore plus de mal à préserver la cohésion dans l’énorme territoire, prédit pour sa part la Frankfurter Rundschau: Aujourd’hui déjà, musulmans et chrétiens s’entretuent tandis que les laissés pour compte de la région du Delta du Niger en font voir de toute les couleurs aux compagnies pétrolières internationales. Et de conclure que d’un président faible, légitimé seulement par un scrutin controversé à l’échelle internationale, le Nigeria n'a pas besoin.

Même son de cloche dans la Süddeutsche Zeitung qui relève qu’au moins l’élu, chimiste et homme d’affaire, est jusqu’à présent libre de toute malversation et corruption au contraire de son rival, Atiku Aboubakar, le vice-président soupçonné d’avoir détourné 125 millions de dollars. Si le nouveau numéro deux du gouvernement, un chrétien du delta pétrolifère doit garantir l’équilibre du pouvoir entre le nord et le sud, personne ne s’attend cependant à voir la crise du pétrole se régler, note le quotidien, car en cas de durcissement des débats autour de l’élection, Yar’Adua devra se battre pour le pouvoir et cela requérra toute ses forces.