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Finlande : Le foot dans la boue, tout mais pas debout!

Stefan Tschirpke/Naïma Guira (Juillet 2007)

En Finlande, à 650 km au nord-est d’Helsinki, se déroule tous les ans à la mi-juillet le «Championnat mondial de football dans la boue»! Quelque 260 équipes s’affrontent dans la boue... ambiance festive garantie!

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Gadoue et accoutrements loufoques, bienvenue au Championnat de football de Hyrynsalmi !
Gadoue et accoutrements loufoques, bienvenue au Championnat de football de Hyrynsalmi !Image : Stefan Tschirpke

Un reportage de Stefan Tschirpke

Nous voici donc cette semaine aux confins de l’Europe du Nord, plus exactement dans la commune de Hyrynsalmi en Finlande. C’est là que se déroulent tous les ans à la mi-juillet des jeux qui dépassent les limites de la folie sportive ! Même la Coupe du monde de football est bien peu de chose à côté du «Championnat mondial de foot dans la boue». Tout a commencé il y a dix ans avec une poignées d’équipes finlandaises. Aujourd’hui en revanche, le tournoi tient du grand spectacle!

Hou la gadoue, la gadoue...

«Pölhövaara», en français «piège à idiots», est le nom d’un marécage situé en bordure de la commune de Hyrynsalmi en Finlande. A perte de vue, rien d’autre que des forêts et des marais. Un néant vert. Telle un affût perché de chasseur, une plate-forme de bois émerge de la boue. Depuis son sommet, le meneur du tournoi dirige les opérations sur le terrain de sport.

En guise de terrain de football, un marécage boueux.
En guise de terrain de football, un marécage boueux.Image : Stefan Tschirpke

Des bandes de plastique jaune délimitent les terrains de football improvisés. Ceux-ci ont l’air d’avoir été labourés par une horde de sangliers. Le jeu dure deux fois 25 minutes – autant de temps à se débattre, à se traîner péniblement pour avancer dans la boue. Un T-shirt rouge vif – quelques instants après le coup d’envoi, ce n’est déjà plus qu’un chiffon crotté. Visages, cheveux, les joueurs sont complètement couverts de boue.

« L'arbitre ? Un accessoire sur le bord du terrain !»

Terrain 4, le plus lourd. Il pleut. L’équipe Lomalyly affronte le FC Killer. De chaque côté, cinq joueurs et un gardien de but. Le gardien de Lomalyly est enfoncé dans la boue jusqu’aux genoux. Un défenseur parvient à grand-peine à soulever sa jambe droite pour frapper dans la balle. Il est plaqué au sol boueux par un attaquant. Du bord du terrain parviennent des cris d’encouragement.

Une chose est sûre : nul besoin de talents footballistiques pour participer à l’un des 880 matchs du tournoi. C’est aussi l’avis de Sari Knappe, qui commente la prestation des équipes masculines. Elle fait partie de l’une des équipes féminines de football. D’après elle, on vient ici avant tout pour s’amuser et pour renforcer l’esprit d’équipe. Les frais de participation de 200 € en valent bien la peine. Des points communs avec le football ? « Pas vraiment. Mis à part les deux buts et la balle. Ah oui, et l’arbitre, mais lui, c’est plutôt un accessoire sur le bord du terrain.. », avoue Sari Knappe.

Football festif ou bien carnaval sportif?

Carnaval ou match de football ?
Carnaval ou match de football ?Image : Stefan Tschirpke

Il y aurait plus de points communs avec le carnaval : perruques jaune ou rose vif, à tresses ou permanentées, lunettes de soleil surdimensionnées, bien utiles pour se protéger les yeux contre les éclaboussures de boue. L’accoutrement des joueurs varie du short court au costume-cravatte, des sous-vêtements à l’uniforme de travail. Une équipe d’aide-soignants venue d’une clinique psychiatrique joue en blouses blanches et coiffes vertes.

Pause détente au sauna entre deux matchs

Un peu à l’écart des terrains de jeu, là où le marécage se transforme en lac, s’élève une longue cabane de bois. De la vapeur s’en échappe. On entend un chuintement. Chacune des six pièces abrite deux poêles de sauna. Ici, le sauna retrouve sa fonction originelle : «On peut venir se laver et se réchauffer après le match. Il fait vraiment très chaud ici à l’intérieur. Et l’ambiance est super. »

Au sauna, les sportifs peuvent se détendre.. et se laver!
Au sauna, les sportifs peuvent se détendre.. et se laver!Image : Stefan Tschirpke

Du haut d’un tremplin de bois, un colosse nommé Jarmo plonge courageusement dans le lac : « Plaaace là devant ! A moi le lac !! »

L’eau est limpide, la température plus que rafraîchissante : 10 degrés Celsius. Dans une grande tente près du sauna, joueurs et spectateurs viennent faire le plein de bière. Rafael, un étudiant polonais, est l’un des 3500 participants. Un peu dérouté, il avoue encore jamais rien vu de la sorte. Ce qui l’étonne le plus, c’est l’exubérance des Finlandais : « D’habitude, les Finlandais sont d’un tempérament plutôt calme. Mais ici, ils sont complètement différents. Peut-être que cela tient à la quantité d’alcool consommé... du moins du point de vue d’un étranger. »

En attendant le Sisu...

Retour au terrain numéro 4, où le match entre l’équipe Lomalyly et le FC Killer s’achève sur le score décevant de 1 à 1. L’ambiance est un peu morose. Le capitaine de l’équipe, Pekka Keränen travaille dans le civil pour l‘une des paroisses d’Helsinki. Il se confie : « Nous cherchons encore notre rythme de jeu. Il faut vraiment qu’on soit dos au mur pour tout donner. Une victoire au prochain match et on est qualifiés ! Maintenant, il ne nous manque plus que le Sisu. »

Sisu – ce mot magique signifie en finnois endurance et esprit de compétition. Le Sisu va venir. Ici, on en est sûr. Les Lomalylys sont ici pour la neuvième fois. Des hommes faits, des pères de famille tranquilles et posés aux métiers respectables. Mais en juillet, les voilà irrésistiblement attirés par les marécages. Au placard le train train quotidien, c’est parti pour trois jours dans la boue, avec le vague espoir de ramener coupe et médailles - espoir déçu cette fois encore. Les Lomalylys ne seront arrivés qu’en 32èmes de finale. Pekka Keränen ne s’explique l’enthousiasme que de cette façon : « Se rouler dans la boue est une expérience unique, et permet d’oublier la routine en un rien de temps ! »

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Un reportage de Stefan Tschirpke présenté par Naïma Guira.