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La flamme de la protestation

18 février 2011

Cette semaine encore les journaux s'intéressent bien sûr à l'Egypte, mais ils tournent aussi leurs regards vers la Libye où la flamme de la contestation a été aussi allumée.

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Le colonel Kadhafi, 16.02.11Image : picture-alliance/dpa

Agitation dans l'Etat des masses, titre la Frankfurter Allgemeine Zeitung. La vague de la révolution tunisienne et égyptienne atteint aussi la Libye. Le journal évoque longuement les manifestations de mercredi dernier à Benghazi. Il note que la Libye et la Tunisie ont des problèmes très semblables, et d'ailleurs, souligne-t-il, en janvier dernier Kadhafi a expressément regretté la chute de Ben Ali. La Libye, poursuit le journal, passe pour l'un des pays les plus corrompus, il est à peu près au même niveau que la Côte d'Ivoire. Par des bienfaits sociaux, Kadhafi a pu calmer pendant longtemps la population, de six millions seulement d'habitants. L'éducation et les soins de santé sont gratuits. Depuis 2002 l'économie libyenne s'est un peu libéralisée, ce qui a valu au pays des taux de croissance de 5% et plus. Le chômage pourtant est en hausse, et avec lui le mécontentement. 30% des Libyens ont moins de 25 ans. Un demi million de travailleurs immigrés, dont beaucoup d'Afrique noire, seraient en Libye, ajoute la Frankfurter Allgemeine.

Revolution in Ägypten
Image : dapd

Le quotidien die Welt revient sur la chute du président égyptien. Ce fut l'un de ces moments, écrit le journal, où l'Histoire retient son souffle. Hosni Moubarak, le pharaon du Caire, est parti. Die Welt évoque plus loin le poète tunisien Abou-Qaim al-Schabi, mort en 1934, qui par son poème intitulé "Aux tyrans de ce monde" a inspiré une jeune génération désireuse de mieux vivre que ses parents. Et le journal remonte encore plus loin dans le temps puisqu'il va jusqu'à citer le passage de la Bible sur "la sortie d'Egypte". C'est l'histoire des Israélites qui quittèrent le pays pour ne plus devoir vivre sous le joug du pharaon. Ce récit a plus de 3 000 ans, rappelle die Welt, et pourtant il pouvait encore s'appliquer jusqu'à une date récente à de vastes parties du monde arabe: qui voulait vivre en liberté devait émigrer. C'est ce que les Egyptiens et les Tunisiens veulent maintenant changer.

Italien Lampedusa Immigranten aus Nordafrika
Tunisiens arrivés à Lampedusa, 13.02.11Image : AP

Des Tunisiens ont pourtant débarqué par milliers, en début de semaine, sur l'île italienne de Lampedusa. Cet exode aussi soudain que massif préoccupe la presse allemande. Les Tunisiens sont fiers de leur révolution, lit-on dans la Süddeutsche Zeitung, et ils ont fait de nouveau la fête lorsque les Egyptiens se sont débarrassés eux aussi de leur autocrate.Tunis revendique une sorte de droit d'auteur sur le renversement des despotes. Mais après la fête, c'est la gueule de bois. Des milliers de Tunisiens sont arrivés ces derniers jours en Europe. Ce sont les déçus et les impatients. Or l'Europe précisément a une responsabilité à assumer souligne le journal. Trop longtemps elle s'est tue sur le régime dictatorial de la Tunisie. Les manifestations de sympathie à l'endroit des révolutionnaires, nées de la mauvaise conscience européenne, doivent être suivies d'actes concrets. Le journal plaide pour une aide économique accrue. Et ajoute-t-il, pourquoi ne pas pallier le manque d'ingénieurs qualifiés en Europe par des Tunisiens bien formés. Un chômeur sur trois en Tunisie est diplomé de l'université.

Uganda Wahlen Präsident Yoweri Museveni Anhänger
Partisans de Museveni pendant la campagne électoraleImage : DW/Schlindwein

L'Afrique au sud du Sahara n'est pas absente pour autant des colonnes de la presse allemande. Dans le contexte des élections générales en Ouganda, die Tageszeitung consacre un long article aux débuts de l'exploitation pétrolière dans le lac Albert, et note que le pétrole a été un instrument de la campagne électorale. La découverte de pétrole alimente les premiers conflits de terres. Les uns sont expulsés de force, les autres se voient promettre des dédommagements et de la richesse. Le journal dénonce à ce propos les dangereuses méthodes employées par le président Museveni pour acheter des voix.

Kenia Blumenfarm in Naivasha
Production de fleurs à NaivashaImage : AP

"Des roses pour Joséphine" titre la Frankfurter Rundschau au-dessus d'un article sur la production de roses à Naivasha, au Kenya. Des roses destinées à l'exportation vers l'Europe, notamment l'Allemagne. En l'espace de quelques années, note le journal, le Kenya est devenu le premier exportateur mondial de fleurs coupées. Dans ce secteur aussi le commerce équitable se développe. Il offre à son personnel, essentiellement féminin, des conditions de travail très supérieures à la moyenne. Le journal cite l'exemple d'une ouvrière, Josephine Nieri, qui a commencé il y a quelques années à travailler chez Panda Flowers pour 7 368 shillings kényans par mois, l'équivalent de 64 euros. C'est nettement plus que le salaire minimum de 5 000 shillings payé dans le secteur. Après quelques difficultés initiales, précise le journal, la vente de fleurs labellisées "commerce équitable" ne cesse de progresser en Allemagne. Mais là aussi la pression sur les prix est assassine. Car si les consommateurs veulent bien acheter des produits du commerce équitable, ils entendent les payer le moins cher possible.

Simbabwe: Robert Mugabe und Morgan Tsvangirai
Mugabe et Tsvangirai, février 2009Image : picture alliance/dpa

Enfin après avoir disparu pendant quelque temps des radars de la presse allemande, le Zimbabwe revient cette semaine sous les projecteurs.

Le Tagesspiegel de Berlin par exemple relève que deux ans après la formation d'un gouvernement d'union nationale, la situation politique se durcit au Zimbabwe. Il y a quelques semaines la ZANU-PF de Robert Mugabe a commencé à envoyer ses milices de jeunes dans les campagnes pour intimider ses adversaires. Le parti au pouvoir y a également pris le contrôle de la distribution de l'aide d'urgence. Les observateurs, note le journal, sont persuadés que ces agissements sont à mettre en relation avec l'élection que Mugabe prévoit d'organiser au milieu de l'année. Il n'aurait en fait aucune chance de remporter l'élection. Selon un sondage publié en août, Morgan Tsvangirai, l'ennemi juré de Mugabe, remporterait 57% des voix, contre 10% au dictateur. Mais Mugabe ne veut lâcher le pouvoir à aucun prix. Dans ces conditions, souligne le journal, l'allègement des sanctions européennes imposées depuis 2002 n'en est que plus étrange. Ces sanctions, qui consistent en un gel des avoirs et des interdictions de visas, viennent d'être suspendues pour 35 partisans de l'entourage direct de Mugabe.

Auteur: Marie-Ange Pioerron
Edition: Fréjus Quenum