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La France se prend les pieds dans l'euro

17 novembre 2011

Paris est visé par les marchés et le taux des emprunts d'État français a atteint un niveau inédit. Au Parlement européen, José Manuel Barroso a appelé à réagir avant qu’il ne soit trop tard.

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Le Premier ministre français François Fillon à la fin d'une conférence de presse la semaine dernière à Matignon
Le Premier ministre français François Fillon à la fin d'une conférence de presse la semaine dernière à MatignonImage : dapd

Comme toujours, les crises sont un révélateur de la nature´humaine. Ainsi, dans cette dégringolade de l’euro, il y a ceux qui disent que tout est fichu et que la zone euro va se réduire comme peau de chagrin à un ensemble de quatre ou cinq pays qui n’auront pas été dégradés, humiliés, épinglés par les agences de notation. Puis il y a les optimistes – souvent moins nombreux – qui affirment que cette crise est une chance unique de poursuivre la construction européenne, d’augmenter la gouvernance économique, c’est-à-dire le rapprochement politique entre les pays de la zone euro. Bref, de faire opérer à l’Europe le grand saut fédéral dont certains rêvent.

Entre les deux il y a les Etats ou du moins deux d’entre eux, la France et l’Allemagne, qui donnent souvent l’impression de gérer seuls la crise en fonction d’objectifs bien peu européens et surtout dictés par la défense de leurs intérêts nationaux. Mais même entre Paris et Berlin, les fissures sont nombreuses et le fait que la France soit désormais à son tour visée par les marchés ne va sans doute pas renforcer ce duo improbable entre la chancelière Angela Merkel et le président Nicolas Sarkozy. En effet, l’écart des taux d’intérêts entre les emprunts français et allemands a atteint un niveau inconnu depuis les années 90. La France semble donc à son tour rentrer dans la grande essoreuse des marchés.

Symbole de l'agence de notation américaine Moody's à New-York
Symbole de l'agence de notation américaine Moody's à New-YorkImage : picture alliance/dpa

Qui contrôle les contrôleurs ?

Face à cela, Bruxelles a appelé à un renforcement de la convergence économique – c’est bien mais ce n’est pas très concret. Alors que la seule mesure capable de calmer les marchés serait d’émettre des emprunts européens et de permettre à la Banque Centrale Européenne d’intervenir massivement sur les marchés pour sauver les monnaies. Deux options que refuse Berlin. Enfin, le commissaire français Michel Barnier a présenté un texte destiné à couper les ailes de ces méchantes agences de notations qui ne font qu’embêter les états démocratique. Las, il a dû rabattre ses ambitions devant l’opposition de certains de ses collègues au sein de la Commission. Désormais, rendez-vous compte : les agences Standard and Poor’s, Moody’s et Fitch pourront faire l’objet de poursuites civiles en cas de faute ou de négligence. Encore une vraie mesure qui va faire « trembler » les marchés, vous pouvez en être sûrs.

Nous restons sur cette session plénière du Parlement européen cette semaine à Strasbourg avec une séance assez musclée mercredi et José Manuel Barroso, président de la Commission, qui s’en est pris à l’Allemagne et la France qui ont une franche tendance à lui passer par-dessus la tête pour prendre les décisions ¨« L’euro est une part centrale de l’Union européenne, pas quelque chose différent ou à part. Nous ne rendrons pas l’euro plus fort à travers la fragmentation de l’Union européenne. Comme je l’ai dit plusieurs fois, le gouvernement économique de l’Europe est de la compétence de la Commission économique et pas des Etats ».

Une pièce d'un euro : la Suède, membre de l'UE depuis 1995, a refusé d'adopter la monnaie unique
Une pièce d'un euro : la Suède, membre de l'UE depuis 1995, a refusé d'adopter la monnaie uniqueImage : picture-alliance/dpa

Servir les plats à Mme Merkel

Voici donc Mr Barroso obligé de rappeler qu’il n’est pas là pour servir les plats à Mme Merkel et Mr Sarkozy. Là-dessus, le président de l’Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, a rappelé une évidence, à savoir que l’Europe ce sont des ambitions politiques et pas uniquement la crise de l’euro et les questions de finances.

Prenant à son tour mercredi la parole, le président du groupe conservateur au Parlement européen, Joseph Daul, est revenu à l’erreur fondamentale de la création de l’euro : le fait que la monnaie unique ait été crée sans un véritable gouvernement économique.

Enfin, après Joseph Daul, il y a un coup de gueule qui fait du bien même s’il a été poussé par un homme politique coutumier du fait, Daniel Cohn-Bendit, passionaria du groupe écologiste, qui sait comment parler pour réveiller les travées parfois endormies du Parlement européen. Daniel Cohn-Bendit qui a mis le doigt sur un point sensible : le fait qu’on peut difficilement parler de convergence économique quand des facteurs aussi essentiels que les salaires restent encore très éloignés. Notamment entre l’Allemagne et la France.

L'eurodéputé et co-président du Groupe des Verts au Parlement européen, Daniel Cohn-Bendit
L'eurodéputé et co-président du Groupe des Verts au Parlement européen, Daniel Cohn-BenditImage : picture-alliance/dpa

Vivre sans l'euro

Nous laissons tous ces eurodéputés en pleine bagarre maintenant pour prendre un peu de distance et voir comment on peut vivre sans l’euro. C’est la suite de notre série consacrée à ce thème et aujourd’hui nous allons en Suède.

Si ce pays a intégré l'Union Européenne en 1995, il n'a en revanche jamais rejoint la zone Euro. Un choix dont la Suède a toutes les raisons de se féliciter aujourd'hui avec la crise. Une crise qui a pourtant donné une idée de monnaie unique nordique à un économiste suédois.

C’est un reportage de notre correspondant Benoit Derrier.

Auteur : Jean-Michel Bos

Edition : Elisabeth cadot