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La guerre des images

Christophe LQSCOMBES13 mai 2004

Face au conflit irakien, au scandale des sévices qui ne cesse de s’amplifier et à la publication sur Internet de l’exécution sauvage d’un civil américain, nombreux sont les journaux allemands à voir dans cette surenchère de l’horreur, à l’instar de leurs homologues européens, l’apparition d’une véritable guerre des images.

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Quand l'image devient arme...
Quand l'image devient arme...

C’est d’ailleurs le titre de la TAZ qui, au contraire de ses confrères nationaux de gauche comme de droite, se refuse à entrer dans cette spirale de l’horreur à sensation en faisant sa première page avec un cadre de photo vide. Le quotidien de Berlin pose la question cruciale de la frontière entre l’information et la complicité avec l’acte commis. Il y a une limite, assène le journal. Lorsque la photo devient une arme, sa publication s’interdit d’elle-même. Le choc ressentit par l’observateur est exactement le motif de l’acte. Celui qui alors publie le cliché devient nécessairement complice de l’auteur du crime.

Die Welt, tout comme la Rheinische Post, s’inspirent de la thèse un tantinet provocante du Vatican, disant que la torture est pire que le 11 septembre. La spirale de l’horreur créée par la publication d’abord des photos des sévices et ensuite de la vidéo de la décapitation ne doit pas masquer le fait qu’il n’existe pas de lien moral entre les deux.

Pour la Süddeustche Zeitung aussi, la bestialité des terroristes n’est pas le fruit du sadisme d’Abou Ghraib. Avant l’Irak, c’est en Afghanistan que l’exécution sauvage du journaliste américain Daniel Pearl a été filmée. Le terrorisme n’a pas besoin de justification morale pour ses actes car il n’a pas de morale, il a juste besoin de prétexte. Et les prétextes, ce sont les sadiques de Bagdad qui les leur ont livré.

Pour la Frankfurter Rundschau, ces images ont déclenché à Washington une véritable crise politique dont les dimensions ne sont pas encore complètement perceptibles et Rumsfeld et Bush n’ont toujours pas compris la signification de ces images. Plus que toute critique libérale, ces images démontrent qu’on ne peut plus faire confiance au Pentagone et à son patron. La seule issue désormais pour stopper l’effet délétère de ces images, exige le journal, c’est d’assumer la responsabilité politique des exactions d’Abou Ghraib, leur cause systémique et leurs conséquences.

Pour la Frankfurter Allgemeine Zeitung enfin, les démocraties d’aujourd’hui éprouvent de grandes difficultés face aux nouveaux ennemis de la société libérale. Les nouvelles menaces d’aujourd’hui exigent d’autres réponses que celles d’hier. Seulement, conclut le journal, il ne faut malgré tout pas oublier que si l’Ouest a remporté la Guerre Froide à son profit, malgré quelques errements, c’est bien en tant que communauté d’états démocratiques.