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La roue tourne à Bangui

Marie-Ange Pioerron29 mars 2013

La République centrafricaine est propulsée sous les feux de l'actualité dans la presse allemande. Il aura fallu pour cela un coup d'État. La Centrafrique fait partie des pays ignorés par les médias allemands.

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Un jeune rebelle de la SélékaImage : AFP/Getty Images

Sauf lorsqu'une rébellion chasse le régime en place comme cela vient de se produire une fois de plus en Centrafrique. La Süddeutsche Zeitung parle de la révolte des guerriers de la misère, dans un pays marqué depuis des décennies par son instabilité politique et son extrême pauvreté.

La Frankfurter Allgemeine Zeitung rappelle que François Bozizé, qui vient donc d'être renversé, était lui même arrivé au pouvoir par un putsch en 2003, et le journal note qu'il gouvernait exactement comme son prédécesseur Ange-Félix Patassé, à savoir uniquement par le biais de sa propre ethnie. Les partisans de Bozizé se partageaient entre eux les recettes, non négligeables, tirées de l'exploitation de l'or et des diamants ainsi que du commerce du bois.

Bangui Putsch
Un camion de la Séléka incendié près de BanguiImage : Reuters

Dans un autre article, envoyé de Johannesburg, le même journal relève que le contigent sud-africain, malgré la mort de treize soldats, restera en Centrafrique jusqu'à ce que "la poussière soit retombée" selon les termes du président Zuma. En fait, souligne le journal, l'armée de l'air sud-africaine n'est en mesure, ni d'envoyer des renforts ni d'évacuer ses soldats. Elle ne dispose actuellement que de trois avions de transport C130, déjà mobilisés pour l'approvisionnement des contingents sud-africains au Congo et au Darfour.

Pour ce qui est de la présence sud-africaine en Centrafrique, le journal rappelle qu'elle a été décidée du temps du président Thabo Mbeki, lequel était soucieux d'endiguer l'influence de la France en Afrique. Le tout sur fond d'une polémique remontant à 2005 entre Thabo Mbeki et le président français de l'époque Jacques Chirac. ll était alors question de la Côte d'Ivoire, et Jacques Chirac avait publiquement signifié au Sud-Africain qu'il avait encore beaucoup de choses à apprendre sur l'Afrique francophone.

Une chance pour la Centrafrique

Zentralafrika Konflikt FOMAC
Force d'Afrique centrale à BanguiImage : SIA KAMBOU/AFP/Getty Images

Il n'y a pas que des Sud-Africains en Centrafrique. Il y a aussi les soldats de la force d'Afrique centrale, plus les Français et les Tchadiens. Ils ne sont pas intervenus pour sauver François Bozizé. Die tageszeitung s'en félicite. Selon ce quotidien, les forces étrangères ont compris que leur intervention pour défendre Bangui contre les rebelles, conjuguée éventuellement avec des massacres ethniques commis par des milices fidèles à Bozizé, aurait engendré une plus grande instabilité que la victoire de la rébellion.

Bozizé n'a rien changé en dix ans, sa chute est un préalable au changement, souligne le journal qui évoque aussi l'accord de paix signé en janvier dernier à Libreville avec la Séléka. L'application de cet accord butait avant tout sur Bozizé lui-même et sa façon de gouverner en dehors des institutions.

China Einfluss in Afrika Baustelle in Addis Ababa Äthiopien
Ouvriers chinois sur un chantier à Addis AbebaImage : Getty Images

La Chine omniprésente en Afrique

Le sommet des BRICS à Durban, en Afrique du Sud, est aussi relayé cette semaine dans la presse allemande. Dans ce contexte la Frankfurter Allgemeine Zeitung s'intéresse aux rapports entre l'Afrique et les pays émergents. Dans un éditorial intitulé "Colonialisme 2.0", le journal estime que les BRICS sont avant tout le véhicule des intérêts chinois.

L'Afrique du Sud en est l'illustration. Elle est entrée dans le club pour ouvrir la porte des matières premières africaines à la Chine. La Russie, l'Inde et le Brésil en revanche ne portent pratiquement aucun intéret à l'Afrique, mis à part les investissements brésiliens en Angola et au Mozambique, deux pays lusophones, mise à part aussi la volonté de trusts agraires indiens de prendre pied en Éthiopie.

Que la Chine, poursuit le journal, paie les matières premières africaines avec des infrastructures est un aspect plutôt positif. Pour la première fois de son histoire, l'Afrique reçoit une plus value qui n'atterrit pas sur des comptes bancaires britanniques. Mais ajoute le journal, que la Chine inonde l'Afrique de produits bon marché et étrangle ainsi la production locale, est moins joli. La Chine copie sans scrupule le modèle commercial des anciennes puissances coloniales, souligne la FAZ.

La Süddeutsche Zeitung évoque quant à elle les multiples ratés de l'aide occidentale à l'Afrique. Le continent pullule d'exemples où les meilleures intentions ont tourné à la catastrophe. Aujourd'hui note le journal, on ne parle plus d'aide au développement, mais de coopération au développement. Une tromperie sur l'étiquette car les problèmes ne sont pas résolus pour autant. Les Chinois sont peut-être plus sincères. Ils ne font pas mystère de leur soif de matières premières.

Bioanbau in Uganda Biokorb
Légumes et fruits bio produits en OugandaImage : DW/L. Schadomsky
Symbolbild Entwicklungshelfer, Entwicklungshilfe,
Image : Andreas Wolf/Fotolia

Bonnes nouvelles sur l'Afrique

En contrepoint, un hebdomadaire parle de l'Afrique dans une série qu'il vient d'inaugurer sous le titre "Bonnes nouvelles". Il fait remarquer que sept pays africains figurent parmi les dix pays qui connaissent les taux de croissance les plus élevés au monde. Qui parle aujourd'hui de "tiers-monde" lit-on dans cet article de l'hebdomadaire Die Zeit, pense avant tout à l'Afrique sub-saharienne. Une guerre de religion fait rage au Mali, des rebelles terrorisent le Congo et la Somalie.

Les mots "élections" et "Afrique" s'accompagnent souvent du mot "fraude". L'Ouganda en est un exemple typique : un président vieillissant s'accroche au pouvoir, l'homosexualité est interdite, le sida est de nouveau en hausse. Et pourtant, en Ouganda, la situation a durablement changé, en mieux, souligne le journal qui fait découvrir à ses lecteurs trois entreprises ougandaises particulièrement florissantes : l'une produit des médicaments, la deuxième du café et la troisième des jus de fruits.

Plus brièvement, la presse rend hommage à l'écrivain nigérian Chinua Achebe, décédé le 22 mars à 82 ans. La Frankfurter Allgemeine Zeitung le qualifie "d'humaniste sceptique et de réaliste poétique."

Chinua Achebe
Chinua AchebeImage : Reuters