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L'Afrique à travers la presse allemande

Christophe LASCOMBES12 novembre 2004

La presse allemande de cette semaine traite bien évidemment la crise en Côte d’Ivoire et la Tageszeitung de Berlin titre son commentaire de lundi de manière très explicite : dans la logique de la guerre.

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Les violences en Côte d'Ivoire sont l'un des grands sujets africains de la presse allemande
Les violences en Côte d'Ivoire sont l'un des grands sujets africains de la presse allemandeImage : AP

Et le journal d’expliquer : le président Gbagbo a saboté toutes les tentatives de pacifier son pays par la négociation. S’isolant sur le plan international, il a laissé la Côte d’Ivoire s’enfoncer toujours un peu plus dans le chaos. Laurent Gbagbo, ancien membre estimé du parti socialiste français mise uniquement sur la logique de la guerre. Il ne voulait pas partager avec les rebelles du Nord mais les écraser. Aujourd’hui, une partie de la Côte d’Ivoire est en flammes et les étrangers, français ou autres, deviennent les otages d’un conflit qui risque d’embraser toute la région car les prochaines victimes seront les Ivoiriens du Nord du pays ainsi que les millions d’immigrants venant des pays voisins. Le massacre doit être évité, insiste le journal. Et l’ancien pouvoir colonial qu’est la France ne peut plus régler ce problème toute seule. Dix après le Rwanda, la communauté internationale est désormais appelée à intervenir. La Frankfurter Allgemeine Zeitung fait le portrait de Laurent Gbagbo, un portrait intitulé « Dur comme l’ivoire ». Dans ce portrait, le journal fait remarquer que l’homme-lige du président, Charles Blé, le chef des jeunes Patriotes qui se sont lancés dans la Chasse aux Français, et Guillaume Soro, le chef des rebelles, sont tous les deux des créatures politiques de Laurent Gbagbo. En ce sens, le chef de l’Etat ivoirien se trouve rattrapé par son propre passé. Pour la Süddeutsche Zeitung, la France se retrouve maintenant entre le marteau et l’enclume et prise au piège. La haine est actuellement si forte que la normalité ne pourra pas régner avant longtemps entre Ivoiriens et Français. Si l’ancienne puissance coloniale tentait par la force d’imposer ses intérêts politiques, économiques et militaires, elle deviendrait par le fait une véritable puissance occupante, le reproche fondamental que les Ivoiriens font à la France. Mais un retrait de Paris aurait des conséquences encore plus catastrophiques, explique le journal de Munich. Non seulement la guerre civile déchirerait la population ivoirienne, mais elle provoquerait l’effondrement économique de ce pays qui, jusqu’à l’éclatement de la guerre civile était l’état ouest-africain le plus moderne et le plus sain économiquement parlant. Même son de cloche chez la Frankfurter Rundschau qui revient sur les causes de la partition du pays. Pour le quotidien, ce sont tous les gouvernements successeurs d‘ Houphouët-Boigny qui ont creusé ce fossé fatal entre les immigrés pauvres et musulmans venus du Nord et les fiers Ivoiriens, chrétiens, du Sud. Depuis 1999, cette partition est la cause de révolutions militaires et crises d’Etat. Et toutes les forces de paix ou d’interposition du monde ne serviront de rien. Pour le journal, les Ivoiriens doivent trouver eux-mêmes leur paix

Autre sujet africain traité par la presse allemande : les enfants de la guerre. La Frankfurter Rundschau a consacré sur deux pages un long portrait émouvant et éprouvant de Gladies Akello, une petite fille vivant dans un petit village au nord de l’Ouganda et à qui l’ONG World Vision tente de redonner confiance en l‘avenir. A 13 ans, enlevée par les rebelles de l’Armée de Résistance du Seigneur, elle est violée et contrainte de tuer un de ses compagnons de misère. A travers ce portrait, le journal fait une reconstitution minutieuse de ce conflit qui dure depuis 18 ans déjà et qui a contraint plus d’un million et demi de personnes à quitter leurs villages et leurs terres. Pour le journal, si l‘Ouganda reçoit les louanges de l’Occident en raison de ses réformes économiques, de sa liberté de la presse et de sa lutte contre le Sida, il ne faut malgré tout pas oublier que le gouvernement de Yosewir Museveni ne fait pas de progrès dans le règlement de son conflit avec les rebelles. Seule la pression internationale a contraint l’ancien putchiste à édicter une loi d’amnistie pour les repentis : avec succès puisque depuis son entrée en vigueur, les défections se multiplient dans les rangs des rebelles.

Terminons avec Die Zeit qui revient dans son édition de jeudi sur les élections en Namibie. Des élections qui semblent apparemment gagnées d’avances par la SWAPO, le parti libérateur du pays qui a su lui rendre la liberté et la dignité. Remportant haut la main les scrutins parlementaires et présidentiels depuis l’indépendance de la Namibie. Mais même le plus puissant parti d’opposition, le Congrès des Démocrates, qui occupe sept sièges au Parlement de Windbhoek, ne possède ni les moyens financiers, ni l’influence pour pouvoir espérer faire bouger les choses. Sans compter la question toujours non résolue de la distribution des terres qui sont en majorité toujours la propriété de seulement 6000 fermiers blancs. Malgré tous ces problèmes, la Swapo continue de profiter du bonus du parti libérateur. Die Zeit conclut : la Namibie vote et va voter pour ses libérateurs. Et pour cause : elle n’a rien de mieux.