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Le Kosovo après Rugova

Anne Le Touzé23 janvier 2006

La mort du président kosovar, Ibrahim Rugova, décédé samedi d’un cancer du poumon, n’est pas seulement une tragédie pour la population albanophone de la province, dont il incarnait les aspirations indépendantistes. Le décès d’Ibrahim Rugova laisse également un vide politique inquiétant, alors que des négociations doivent être ouvertes sur un nouveau statut du Kosovo, actuellement province serbe, placée sous administration provisoire de l'ONU depuis 1999. Ce matin, la presse allemande s’interroge sur l’après-Rugova.

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Dernière apparition du président kosovar Ibrahim Rugova en décembre, figure emblématique des aspirations indépendantistes des Albanais du Kosovo.
Dernière apparition du président kosovar Ibrahim Rugova en décembre, figure emblématique des aspirations indépendantistes des Albanais du Kosovo.Image : AP

Selon Die Welt, Ibrahim Rugova était un « Nelson Mandela des Balkans ». Un président qui a su unir son peuple derrière sa politique pacifique, tout en défendant l’indépendance de son pays et l’obtention d’un statut semblable à celui de ses voisins slovènes et croates. Sa mort ouvre une brèche dangereuse, estime le journal. Celle de voir les forces militantes gagner du terrain face aux forces modérées. Des forces qui pourraient tenter d’obtenir l’indépendance par la violence, réduisant ainsi à néant les succès remportés, pas à pas, par Ibrahim Rugova.

Difficile de prévoir ce qui va se passer dans la province, estime la Süddeutsche Zeitung. Si le chaos devait s’installer chez les Albanais du Kosovo, et si les Serbes, comme ils le crient à qui veut l’entendre, devaient être victimes du « dommage collatéral » de la course au pouvoir, alors la situation serait fâcheuse. Le chef de la Mission de l'ONU au Kosovo, Soeren Jessen-Petersen, a laissé entendre aux Albanais du Kosovo que les négociations devraient répondre à leurs « ambitions », c'est-à-dire une séparation officielle de Belgrade. Le processus pourrait toutefois être remis en question si la mort de Rugova donne lieu à de longues luttes de pouvoir.

Le système démocratique de la province va-t-il se révéler assez solide, s’inquiète quant à elle la Frankfurter Allgemeine Zeitung. La succession du président kosovar doit se faire rapidement et les discussions entre Serbes et Albanais doivent commencer, prévient le journal. Et ce n’est pas un manque de piété que de penser que la mort d’Ibrahim Rugova pourrait rendre les négociations plus faciles. Car malgré tout son mérite, l’homme à l’écharpe en soie était à la fin de sa vie une sorte de monument à sa propre effigie, pétrifié dans ses revendications d’indépendance pour le Kosovo. Ceci dit, ceux qui lui reprochaient son entêtement n’ont pas de meilleure solution à proposer, regrette la FAZ.

La Tageszeitung enfin, s’inquiète de l’absence de concept clair de la communauté internationale. Refuser l’indépendance par crainte d’un effet domino est certes compréhensible. Mais ce n’est pas une stratégie pour l’avenir de la région, d’autant plus qu’il ne s’agit pas seulement du Kosovo, mais de toute l’Europe balkanique. Selon la Taz, c’est avant tout à Bruxelles de développer une stratégie globale pour la région. L’Union européenne doit agir, car la situation actuelle bloque le développement économique vital de cette partie du continent. On n’attend pas des miracles des médiateurs dans les négociations sur le Kosovo. Mais une chose est sûre : le temps presse.