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Le pire est à craindre au Soudan du Sud

Marie-Ange Pioerron25 avril 2014

Depuis décembre 2013, le Soudan du Sud est à feu et à sang. L'inquiétude grandit dans la presse allemande.

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Civils en fuite à Bentiu
Civils en fuite à BentiuImage : picture-alliance/AP Photo

Cette guerre civile, qui est dejà en soi une catastrophe, inspire ce titre à la Süddeutsche Zeitung : "Une catastophe annoncée". Entendez par là la famine qui menace. On pourrait déjà réserver maintenant, écrit le journal, les galas de charité à la télévision pour le mois de novembre, de même que les vols charters pour les humanitaires. Comme l'explique Jürgen Gihr, de l'Agro-action allemande, normalement, à cette époque de l'année, en avril donc, les nombreux petits paysans dont la production alimente la majorité des neuf millions d'habitants, se rendent sur les marchés pour y acheter des semences avant que la saison des pluies ne commence et rende les routes impraticables. Ils se dépêchent de mettre ces semences en terre pour qu'elles puissent lever avant que les réserves constituées au début de l'année ne s'épuisent, en novembre. Mais cette année, poursuit le journal, rien n'est normal. Depuis le début des combats entre forces gouvernementales et rebelles, c'est la peur de massacres qui règne au Soudan du sud. Personne ne songe à semer. Les champs sont vides. La famine, prévisible, pourrait être encore pire, selon les experts, que celle de 2011 en Somalie.

Discussions de paix à Addis Abeba
Discussions de paix à Addis AbebaImage : DW/G. Tedla

La Neue Zürcher Zeitung, de Zurich donc en Suisse, évoque quant à elle un désastre oublié. En dépit de prétendues négociations de paix à Addis Abeba, le conflit ne fait que s'aggraver. Il est douteux que l'ONU puisse rappeler à la raison les responsables des deux camps en les menaçant de sanctions. Le président américain Barack Obama a déjà envisagé des mesures punitives sans que cela ait un quelconque effet. Des réactions trop dures, estime le journal, pourraient même se révéler contre-productives si, par ricochet, les protagonistes n'avaient plus rien à perdre.

Le délégué du gouvernement allemand aux droits de l'homme, Christoph Strässer, vient de séjourner au Soudan du sud. Et il craint le pire. C'est ce qu'il confie dans une interview à la Süddeutsche Zeitung. Je crains, dit-il, que la communauté internationale joue les spectateurs. Il y a des possibilités d'intervention. Ce que j'ai vu me remplit d'effroi. Christoph Strässer plaide notamment pour un accroissement du nombre d'Allemands - actuellement une quinzaine - présents dans la force de l'ONU, la MINUS. Il ne s'agit pas, souligne-t-il, d'envoyer des soldats à la guerre, mais d'empêcher un massacre, un génocide.

Paul Kagamé, à g., et William Hague, le chef de la diplomatie britannique, Bruxelles, avril 2014
Paul Kagamé, à g., et William Hague, le chef de la diplomatie britannique, Bruxelles, avril 2014Image : Reuters
Casque bleu de l'ONU à Bentiu
Casque bleu de l'ONU à BentiuImage : Reuters

Pas de liberté au Rwanda

Au Rwanda les cérémonies officielles de commémoration du génocide de 1994 sont terminées, la période de deuil se poursuit jusqu'au début juillet. Et c'est un article extrêmement dur pour le régime rwandais que livre cette semaine la presse allemande. Le ton est donné déjà dans ce titre relevé dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung: "Système de non droit au Rwanda". En fait il ne s'agit pas d'un article, mais de la lettre d'un lecteur, envoyée d'Oxford en Grande Bretagne. Voici ce qu'il écrit : Le génocide au Rwanda est et reste une tragédie. Le fait que les Nations unies et certains pays aient fermé les yeux pour ne pas être entrainés dans un deuxième Mogadiscio est l'un des chapitres les plus sombres de l'organisation internationale et de la diplomatie en Afrique. Il est néanmoins étonnant que personne ne fasse mention du système de non droit érigé au Rwanda, avec l'aide des occidentaux, dans les vingt ans qui ont suivi le génocide des Tutsi. Sous la présidence de Paul Kagamé les droits de l'homme sont piétinés, les adversaires politiques sont neutralisés ou au besoin assassinés avec la bénédiction de l'Etat. Ces pratiques sont à juste titre critiquées lorsqu'elles concernent d'autres pays comme la Chine, la Biélorussie ou le Congo. Or depuis 1994 le Rwanda est littéralement inondé d'une aide au développement fournie sans conditions.

Dans le parc des Virunga
Dans le parc des VirungaImage : DW/S.Schlindwein

Des chiens contre les braconniers

La presse allemande avait évoqué la semaine passée l'attentat dont a été victime le directeur du parc des Virunga, Emmanuel de Mérode. Il semble qu'il ait à présent de bonnes chances de guérir de ses blessures. Mais la presse revient avec de longs articles sur ce parc des Virunga, situé dans l'est de la République démocratique du Congo. La Süddeutsche Zeitung rappelle par exemple que nulle part sur le continent africain la biodiversité n'est aussi grande que dans ce parc. Mais souligne le journal, qui veut protéger la nature dans le parc des Virunga risque sa vie. 140 gardiens ont été assassinés au cours des 20 dernières années. Leurs 380 collègues continuent malgré tout de travailler. Emmanuel de Mérode veut "instaurer le droit et l'ordre dans un espace de non droit chronique". Il est aidé en cela par un policier allemand, une vétérinaire suisse et, depuis peu, par sept chiens qui pistent les braconniers et retrouvent les touristes ou rangers égarés. Deux de ces chiens sont des épagneuls, dressés à chercher de l'ivoire et des armes et capables de flairer une balle de fusil dans un sac de haricots. Les cinq autres chiens sont des chiens de St.Hubert, une race élevée dès le 7ème siècle comme chiens de chasse dans les Ardennes, en Belgique.

Rebelles dans le parc des Virunga
Rebelles dans le parc des VirungaImage : DW/S.Schlindwein

L'hebdomadaire Der Spiegel évoque de son côté le combat entre le directeur du parc et la société pétrolière britannique Soco qui a obtenu une concession de prospection de 7 500 km2, dont la moitié située dans le parc des Virunga. Emmanuel de Mérode voudrait faire du parc le moteur économique de la région, car lorsque les humains vont bien ils protègent aussi les animaux. La société Soco veut à tout prix chercher du pétrole dans l'une des zones protégées les plus fragiles du monde, écrit le Spiegel.