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Le Tchad veut mettre fin à la corruption

10 avril 2017

Le ministre tchadien de la Justice, Ahmat Mahamat Hassane, a réitéré l'engagement de son gouvernement dans la lutte contre l'enrichissement illicite, dans un contexte marqué par de vives protestations contre le régime.

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Tschad, Justizminister Ahmat Mahamat Hassane
Image : DW/F. Quenum

"Personne n'échappera" (M. Hassane, ministre de la justice)

Voici un an, que les Tchadiens se rendaient aux urnes pour la cinquième élection présidentielle depuis l'arrivée au pouvoir d'Idriss Déby Itno. Candidat à sa propre succession, le chef de l'Etat faisait face à douze autres candidats et sera déclaré quelques semaines plus tard vainqueur du scrutin.

Sudan Khartum Anhänger Idriss Deby Präsident Tschad
Image : Getty Images/AFP/A. Shazly

Un an après, ce résultat est toujours contesté, notamment par le mouvement citoyen Iyina. Pour marquer la journée, l'organisation a appelé à manifester ce lundi contre la mauvaise gouvernance du président Idriss Déby. Une dizaine de membres du mouvement ont, dans la foulée, été arrêtés par la police. Le climat politique reste donc tendu dans le pays. A cela s'ajoutent le mécontentement lié à la corruption et les violations des droits de l'homme. 

Juriste et critique nommé en février dernier, le nouveau ministre de la justice Ahmat Mahamat Hassane se dit conscient de la délicatesse de la charge. Dès le lendemain de sa nomination, il s'est attaqué au problème de la surpopulation carcérale. Mais les violations des droits de l'homme et la vie hors des prisons est d'une empleur presque plus préoccupante.

Ahmat Mahamat Hassane répond aux questions de Fréjus Quenum. 

 

Quand on circule dans le pays on remarque beaucoup de frustrations.  Il y a un écart entre une minorité riche et des pauvres. On dirait la loi du plus fort. On ne peut pas parler librement. Ce n’est pas prioritaire?

 

Effectivement, il y a un problème. Il faut faire de la justice un instrument de paix et du vivre ensemble des Tchadiens, au-delà de leurs diversités ethniques, tribales ou du niveau social. Effectivement nous constatons, nous aussi, le malaise dans la société. Il y a un grand écart entre les richissimes et les pauvres. Et c'est pour cela que nous avons un autre chantier sous les bras : celui de la lutte contre l'enrichissement illicite, la corruption et le détournement massif des biens publics. Ce n'est pas que le pays ne dispose pas de ressources.  Ces ressources ne sont, peut-être, pas suffisantes pour satisfaire tous les projets de développement, pour faire du Tchad un pays émergent, comme le souhaite le président Déby. Mais les maigres ressources, dont regorge le Tchad, doivent être bien gérées pour que chacun puisse y trouver son compte. Et ça c'est un grand défi. Et maintenant, j’ai la forte volonté du président Deby lui-même. Il a fait également ressortir dans son discours du  jour de la commémoration de la fête annuelle du vivre ensemble, de la paix et de la cohabitation pacifique une journée de prière, l’importance de la lutte farouche contre l’enrichissement illicite. Cela va nous guider à mettre rapidement les institutions judiciaires respectueuses des règles de la démocratie et de la présomption d’innocence, du droit de recours des partis. Mais doit être un instrument efficace de lutte contre ces décalages entre ces riches qui se sont illicitement enrichis et les pauvres.

 

Mais l’enrichissement illicite, n’est-il pas un front glissant? On sait ceux qui sont riches au Tchad?

 

Pour le moment, le président s’est attaqué à ce fléau. Bien entendu, il y a des conséquences politiques. Effectivement, il y aura des grincements de dents. Il y aura des gens qui se sentent proches du pouvoir. Il y aura des gens qui croient qu’ils sont au-dessus des lois. Mais le président dit que personne n’y échappera. Il a même dit, que les gens disent qu’il s’agit  de discours sans suite. Et il affirme que cette fois-ci, très rapidement, les gens verront les actes qui vont se poser. Et chacun va justifier, comment il a acquis sa richesse. Et ça, je crois que c’est une volonté sans faille.

 

Vous aurez votre liberté et vous le soutien du président?

 

Pour le moment, j’ai le soutien entier du président. J’ai toute ma liberté dans les pressions du droit et surtout de faire aboutir ce projet dans l’intérêt de notre pays. N’oubliez pas, il y a quelques années, on n’avait même classé le Tchad parmi les pays africains les plus corrompus. C’est quand même un triste score. Et de l’autre côté, il faut reconnaitre que c’est un pays pauvre. C’est même scandaleux qu’avec les maigres ressources que nous générait le pétrole depuis 2003, cela a crée une rareté des ressources qui a aussi engendré des mouvements sociaux qui avaient même troublés les élections. Ces maigres ressources ont aussi crée un malaise entre la société civile, les syndicats, les partis politiques et le pouvoir en place. Nous sommes en dialogue permanent avec les partenaires sociaux. Bien sûr qu’il faut s’attaquer au mal. Pour s’attaquer au mal, il faut le soutien indéfectible du président. Pour le moment je l’ai. Deuxièmement, il faudra absolument que cette Cour ait tous les moyens et toute la liberté, surtout les magistrats qui vont avoir à connaître ces affaires-là. Mais il faut aussi qu’il y ait une réforme de l’institution de contrôle. Il faut un contrôle général d’Etat, pour nous permettre de faire un audit des projets, des marchés, afin que ceux qui sont interpelés et interrogés sur leur richesse le soient dans l’objectivité, au-delà de toute proximité. Mais il y aura toujours des qualifications et des conséquences politiques qui vont en découler.

 

 

Cliquez sur l'image pour écouter l'interview dans son intégralité 

Photo de Fréjus Quenum à côté d'une carte du monde
Fréjus Quenum Journaliste, présentateur et reporter au programme francophone de la Deutsche Welle@frejusquenum