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Menaces de guerre civile dans le sud-est turc

Anne Le Touzé (avec agences)21 décembre 2015

Le gouvernement turc semble déterminé à en finir avec le PKK. Il a lancé une opération militaire et policière d'envergure pour chasser les combattants kurdes des villes. Mais ces derniers ont le soutien de la population.

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Les forces spéciales turques mènent des opérations "anti-terroristes", notamment à Silopi
Les forces spéciales turques mènent des opérations "anti-terroristes", notamment à SilopiImage : picture alliance/AA/Str

10.000 militaires et, pour la première fois, des membres des forces spéciales sont mobilisés dans la traque des militants du PKK. En cinq jours, plus de 110 combattants ont été tués. Les opérations se concentrent sur des villes du sud-est de la Turquie. Celle de Silopi, par exemple, située à la frontière irakienne, est sous couvre-feu et encerclée par des chars de l'armée turque. Des habitants évoquent une situation dramatique avec des quartiers entiers détruits par des tirs de mortier, ou encore des perquisitions des forces de l'ordre sans aucun mandat. Une situation qui rappelle au politologue Samim Akgönül une période sombre du conflit kurde :

Certaines villes du sud-est de la Turquie ressemblent à celles de la Syrie voisine, en proie à la guerre civile
Certaines villes du sud-est de la Turquie ressemblent à celles de la Syrie voisine, en proie à la guerre civileImage : Reuters/S. Kayar

"La situation devient de plus en plus préoccupante. On ne parle même plus de l'état de droit ou du respect des droits de l'homme, dans la mesure où dans les années 90 un certain nombre de lois avaient été votées pour justifier ces sièges des villes de la Turquie avec un état d'exception. Aujourd'hui il n'y a même plus cette couverture juridique et légale et de manière tout à fait illégale, les forces de l'ordre encerclent les populations civiles de la Turquie."

Ankara lutte contre des "terroristes"

De leur côté, les autorités turques affirment que les opérations continueront jusqu'à ce que le sud-est du pays soit débarrassé des "terroristes". Devant des jeunes militants de l'AKP, le parti islamo-conservateur au pouvoir, le Premier ministre Ahmet Davutoglu a accusé hier les rebelles du PKK d'instrumentaliser la jeunesse pour tenter de "déclencher une guerre civile". Selon Samim Akgönül, l'engrenage de violence dans la région kurde présente des dangers considérables pour le pouvoir en place et pour la stabilité de l'État turc:

Des manifestations pro-kurdes ont été réprimées à Istanbul et dans d'autres villes turques
Des manifestations pro-kurdes ont été réprimées à Istanbul et dans d'autres villes turquesImage : Reuters/O. Orsal

"Il y a le soutien de la population au PKK, dans la mesure où pour cette population du sud-est de la Turquie, l'État turc n'est pas un Etat de service mais un État d'oppression à la fois juridique, psychologique, identitaire mais surtout physique. Et les jeunes gens dans ces villes-là n'ont qu'une envie, celle de rejoindre les rangs du PKK pour combattre les forces de l'ordre turques. En réalité, la rupture sentimentale et identitaire a déjà eu lieu."

Après plus de deux ans de cessez-le-feu, les combats ont repris l'été dernier entre les forces turques et les combattants du PKK, mettant fin brutalement aux négociations de paix en cours depuis 2012. Le conflit a déjà fait plus de 40.000 morts depuis 1984.