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Qui est "l'opposition" en Syrie ?

15 juillet 2011

Le calme a régné des décennies durant en République de Syrie. "Un calme de cimetière" assurent certains observateurs.

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Jeunes Syriens manifestant contre le régimeImage : picture-alliance/dpa

En effet, le régime autoritaire du président Bashar el Assad, tout comme celui de son père auparavant, n’a jamais toléré le moindre signe d’insubordination. Les services de sécurité omniprésents s’occupaient rapidement de toute personne récalcitrante. Mais depuis quelques mois, dans le sillage du "printemps arabe", des milliers de Syriens ont osé descendre dans la rue pour revendiquer liberté et démocratie. Et soudain on parle de l'opposition. Mais qui est donc l’opposition ?

Rafik Schami vit depuis plus de 40 ans en Allemagne, mais quand il parle de la Syrie, sa patrie, sa voix se fait nostalgique. L’écrivain critique du régime des Assad père et fils, a été forcé de s’exiler. Il se souvient d’une autre Syrie dans les années cinquante :

" Nous n’avions pas un seul prisonnier politique, nous vivions libres et n’avions pas peur du gouvernement et de critiquer qui bon nous semblait. Cela, c’était la Syrie de mon enfance et de mon adolescence. Et soudain arrive un régime qui vous prive de toute liberté, qui vous pousse à l’exil, c’est pourquoi je suis un opposant de la première heure ."

Statue des ehemaligen syrischen Präsidenten Hafez Assad
Buste endommagé de l'ancien président syrien Hafez el-AssadImage : AP

Depuis que Hafez el-Assad , le père de l’actuel président a pris le pouvoir par un coup d’Etat, la liberté n’existe plus en Syrie. Un régime , un parti. Les services de sécurité répriment dans l’oeuf toute velléité de critique. La prison ou l’exil, c’était le choix. Heiko Wimmer, expert de la Syrie de la Fondation allemande de sciences politiques :

" Dans le climat de répression, qui existait jusqu’il y a peu de temps encore, il n’était pas possible pour cette opposition de se constituer, de participer à un discours politique, de communiquer même. Il fallait opérer en très petits groupes, souvent en exil."

C’est dans ce contexte que le vent de contestation du printemps arabe a soufflé aussi sur la Syrie, provoquant une sanglante répression. Ce qui a eu pour résultat de souder différents groupes de protestataires, constate Joshua Landis, expert américain de la Syrie à l’université d’Oklahoma :

"C’est la première fois que l’ opposition suit une ligne claire et s’y tient, depuis 4 mois déjà maintenant. L’opposition veut la dignité, la liberté et la chute du régime."

TV-Ansprache des syrischen Präsidenten Assad 20.06.2011
L'actuel président Bachar el-AssadImage : dapd/Syrian TV

Cependant l’opposition syrienne est composée de nombreux groupes et groupuscules différents ayant des programmes aussi différents. Parmi eux : les Frères musulmans, mais aussi des anciens communistes, des jeunes activistes, des Kurdes syriens, ainsi qu'une partie de l’ancienne élite dirigeante sunnite. Bref une mosaique ethnique et religieuse à l’image de la population syrienne. Une autre situation donc qu’en Tunisie ou en Egypte selon Joshua Landis :

" La Tunisie et l’Egypte sont homogènes sur le plan ethnique : un peuple avec une religion. Bien sûr il y a les Coptes chrétiens, mais ils représentent que 10% de la population et n’ont pas une grosse influence politique. La Syrie par contre est comme l’arche de Noah, il y a deux exemplaires de chaque sorte, le pays est fragmenté sur le plan ethnique comme religieux."

Cette fragmentation reste encore un frein à un très large mouvement d’opposition. Bashar el-Assad espère en tirer profit, cependant il ne peut plus longtemps ignorer la contestation populaire.

Auteurs : Anne Almeling / Philippe Pognan
Edition : Jean-Michel Bos