1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

Retour d'un prisonnier de Guantanamo en Grande-Bretagne

Anne Le Touzé24 février 2009

Le premier détenu de la base cubaine remis en liberté depuis l'entrée en fonction de Barack Obama aux Etats-Unis, accuse les renseignements britanniques de complicité de torture. Une affaire embarrassante pour Londres.

https://p.dw.com/p/H0Cn
Binyam Mohamed, premier détenu de Guantanamo libéré depuis l'annonce de la fermeture du camp par Barack Obama.Image : AP

Après plus de quatre ans passés à Guantanamo, Binyam Mohamed a été relâché hier soir par la police britannique sans faire l'objet de poursuites. Arrivé dans l'après-midi à l'aéroport de Northolt, au nord-ouest de Londres, dans un état de fatigue avancé, l'ex-détenu a fait lire une déclaration par l'un de ses avocats, Clive Stafford Smith :

"Avant, la torture était un terme abstrait pour moi. Je n'aurais jamais imaginé pouvoir en être un jour la victime. Il est toujours difficile pour moi de réaliser que j'ai été enlevé, transféré d'un pays à l'autre et torturé comme au Moyen-âge - et tout cela à cause du gouvernement américain."

Cet Ethiopien d'une trentaine d'années avait été arrêté en 2002 au Pakistan. Il était suspecté de s'être entraîné dans un camp d'al-Qaïda en Afghanistan et de préparer une bombe avec des matériaux radioactifs. Transféré au Maroc pour interrogatoire, Binyam Mohamed affirme y avoir été torturé. Aujourd'hui il demande des comptes, non seulement aux Etats-Unis, mais également au gouvernement britannique, qu'il accuse de complicité de torture. Clive Stafford Smith :

Binyam Mohamed erster freigelassner Häftling aus Guantanamo
Une photo de Binyam Mohamed, datée de 2000. Avant d'être relâché, il a suivi une grève de la faim de plus d'un mois pour protester contre sa détention.Image : AP

"Le pire moment pour moi a été au Maroc, quand j'ai compris que mes tortionnaires recevaient leurs informations des services secrets britanniques. J'avais dit aux fonctionnaires britanniques qui m'avaient interrogé au Pakistan tout ce qu'ils voulaient savoir. Mais j'ai constaté que les gens qui étaient censés me sauver ont, en réalité, aidé mes tortionnaires."

En octobre dernier, le Pentagone avait levé les accusations contre Binyam Mohamed. Celui-ci avait obtenu de la Haute Cour de Londres un jugement qui réclamait aux autorités britanniques de rendre publics des documents américains prouvant les pratiques de torture contre l'ex-détenu. Mais début février, les juges ont finalement rejeté cette demande, invoquant la "menace" de Washington de "rompre la coopération" en matière de renseignements. Des pressions par la suite démenties par le gouvernement de Gordon Brown.

Les accusations de Binyam Mohamed à l'encontre du gouvernement britannique font l'objet d'une enquête du parquet depuis le mois d'octobre. Clive Stafford Smith, qui est également directeur de l'ONG de défense des prisonniers Reprieve, réclame, avec Amnesty International, l'ouverture d'une enquête indépendante.