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UA : un anniversaire en demi-teinte

Marie-Ange Pioerron31 mai 2013

Les 50 ans de l'Union africaine célébrés à Addis Abeba, cet anniversaire alimente l'actualité africaine dans la presse allemande qui se penche aussi sur le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UA.

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Addis Abeba, 25 mai 2013
Célébration du cinquantenaire de l'UAImage : AFP/Getty Images

Les journaux analysent ce qu'a réalisé en un demi-siècle cette organisation qui a vu le jour en 1963 sous le nom d'Organisation de l'unité africaine et qui depuis 2002 est devenue l'Union africaine. Cette UA, écrit die tageszeitung, devait être tout ce que l'OUA n'avait jamais été: un moteur du progrès, un aiguillon pour surmonter la souveraineté nationale, un intervenant contre les dictateurs et les criminels. Le premier président de la commission de l'UA était crédible dans la défense de tels objectifs. Alpha Oumar Konaré était un héros de la démocratisation au Mali. Mais le vent frais s'est dissipé. L'abandon des principes fondateurs de l'OUA est certes toujours en vigueur. Les frontières coloniales ne sont plus intangibles, comme l'a montré la naissance du Soudan du sud en 2011. Et jamais encore il n'y a eu autant de forces d'intervention africaines. Mais ce n'est pas contre des dictateurs que l'UA intervient, déplore le journal. Comme autrefois elle sert d'instrument de pouvoir à des présidents qui se soutiennent mutuellement. Bref comme le résume le journal dans le titre de l'article, l'UA est de nouveau un "club de dictateurs". Le Handelsblatt, un journal économique, s'attache plutôt à dresser un bilan économique. Et c'est pour constater que plus de 50 ans après le début de la décolonisation, presque tous les pays africains sont aujourd'hui encore dépendants de l'exportation d'une seule matière première et n'ont aucune industrie de transformation comme l'Asie. Les investissements à long terme y sont donc faibles. D'autant que de tels investissements présupposent une coopération beaucoup plus étroite entre les pays membres de l'UA. Or la part du commerce inter-africain ne représente que 12% du commerce total du continent, fait remarquer le journal.

Addis Abeba, 26 mai 2013
Photo de famille des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UAImage : picture alliance/ZUMAPRESS.com

Ceci dit, les chefs d'Etat et de gouvernement réunis en sommet à Addis Abeba ont pris deux décisions qui font couler beaucoup d'encre: premièrement ils veulent créer une force d'intervention rapide, deuxièmement ils demandent que la procédure engagée par la Cour pénale internationale contre le président kenyan et son vice-président soit transférée à la justice kenyanne. L'Afrique cherche son indépendance, titre die tageszeitung qui note que trois pays, l'Afrique du sud, l'Ouganda et l'Ethiopie, se sont déjà portés volontaires pour fournir des soldtats à cette future force d'intervention. La Süddeutsche Zeitung cite les propos du Premier Ministre éthiopien Hailémariam Desalegn qui a demandé à la CPI de "ne plus faire la chasse aux Africains:" Or poursuit le journal, la CPI reproche précisément la même chose au président Uhuru Kenyatta et au vice-président William Ruto: avoir fait la chasse à des Africains, à des milliers de leurs compatriotes. Après l'élection présidentielle contestée de 2007, les violences ont fait plus de 1 200 morts. Les deux inculpés, note de son côté la Berliner Zeitung, ont affirmé à maintes reprises leur volonté de coopérer avec la CPI. Mais depuis leur investiture en avril dernier ils s'emploient à saper la procédure par tous les moyens possibles, l'une de leurs stratégies étant de faire taire les témoins de l'accusation.

Journalistes du Daily Monitor, le 20 mai
Manifestation contre le baillonnement de la presse à KampalaImage : Reuters

Baillonner la presse ougandaise

Faire taire la presse indépendante - c'est ce que cherche à faire le pouvoir ougandais. La police a occupé les sièges des principaux médias indépendants pour trouver une lettre explosive, signée d'un général en fuite. Tout cela est relaté dans la presse allemande. Comme l'écrit par exemple die tageszeitung dans son édition du 29 mai, soit avant la réouverture des médias assiégés par la police, le grand quotidien ougandais Monitor a cessé de paraître, la radio KFM n'émet plus. Une unité anti-terroriste de la police a fouillé les rédactions pour trouver une lettre: elle est signée du général David Sejusa, jusqu'alors coordinateur des services secrets ougandais. Il est écrit dans cette lettre que le président Museveni prévoit d'assassiner tous ceux qui n'accepteraient pas son fils comme son successeur. Le fils en question, poursuit le journal, s'appelle Muhoozi Keinerugaba. A 39 ans il a gravi à toute allure les échelons de la carrière militaire: il est général de brigade et commande des unités spéciales bien équipées. Lui même n'a pas exprimé jusqu'à présent l'ambition de marcher sur les traces de son père. Il préfère fréquenter les boîtes de nuit de Kampala. Mais le carrousel du pouvoir tout autour de Museveni tourne vite, très vite, souligne le journal: tout homme politique, général ou journaliste qui ne prouve pas sa loyauté est menacé. Beaucoup de généraux ont quitté le pays, dont l'auteur de la lettre.

Dans le bidonville de Kibera, à Nairobi
Fripes européennes sur un marché kenyanImage : AP

Des tonnes de vêtements pour l'Afrique

L'exportation vers l'Afrique de vêtements usagés provenant de pays riches donne souvent lieu à une polémique. Ces vêtements arrivent par containers entiers sur les marchés africains. Ils sont accusés de ruiner l'industrie textile africaine. Mais selon un journal allemand, la réalité est plus nuancée. C'est ce qu'explique la Süddeutsche Zeitung dans un article sur ces fripes appellées "mitumba" , un mot swahili, en Afrique de l'est. La demande est énorme, écrit le journal. Selon le Centre du commerce international, l'Ouganda a importé à lui seul 53 000 tonnes de vêtements de seconde main en 2011. Dans les années 90, rappelle le journal, les organisations d'aide au développement ont beaucoup critiqué ce commerce, accusé de l'effondrement de l'industrie textile africaine. Aujourd'hui ce sont plutôt les aspects positifs qui sont mis en exergue. Comme le souligne dans l'article une responsable d'une association allemande de consommateurs: le commerce de vêtements d'occasion crée des emplois. Les grossistes vendent leur marchandise à une multitude de petits commerçants qui gagnent leur vie avec les T-shirts venus d'Europe, ou à des couturières qui font du neuf dans du vieux. Les raisons de l'engouement des Africains pour les fripes, souligne le journal, sont au fond les mêmes qu'en Europe: le prix est bas, le choix est grand. Et la qualité est souvent meilleure que celle des vêtements neufs venus d'Asie.