Élections européennes, des enjeux aussi pour l'Afrique // Ibrahim Sountara, réfugié devenu écrivain | PROGRAMME | DW | 15.05.2019
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PROGRAMME

Élections européennes, des enjeux aussi pour l'Afrique // Ibrahim Sountara, réfugié devenu écrivain

Les Européens s'apprêtent à élire les nouveaux députés du Parlement européen. Un scrutin qui pourrait avoir des répercussions sur la politique européenne avec l'Afrique dans une Europe divisée sur la question de l'immigration. En deuxième partie de ce magazine, nous suivrons le récit d'Ibrahim Sountara, réfugié ivoirien devenu écrivain. 

Quels défis l'Union européenne et ses partenaires africains devront-ils relever ensemble au cours de la prochaine législature du Parlement européen ? La DW a organisé récemment une table ronde à Bruxelles autour de cette question, en amont des élections qui doivent se tenir du 23 au 26 mai, dans les 28 pays que compte - encore - l'UE.

En filigrane, le thème de la migration. Même s'il est de nouveau en baisse après les pics de 2015 et 2016, le nombre de réfugiés et de migrants - notamment originaires d'Afrique subsaharienne - a considérablement augmenté au cours de la dernière décennie. Cette vague migratoire a entraîné en Europe une crise de l'accueil, divisé les pays membres et favorisé la montée des mouvements populistes un peu partout. 

Selon les projections, le Parlement européen risque d'accueillir en son sein un nombre record de députés issus de partis nationalistes et eurosceptiques, voire carrément d'extrême-droite. La question de la migration occupe désormais une place majeure dans le débat public. 

Des motivations économiques pour la migration

Parti de ce constat, le débat de la DW a rapidement dérivé sur les raisons qui poussent les jeunes subsahariens à l'exode : la perspective d'un avenir meilleur.

Pour de nombreux jeunes, le rêve d'une vie meilleure se heurte aux frontières de l'Europe

Pour de nombreux jeunes, le rêve d'une vie meilleure se heurte aux frontières de l'Europe

"Le niveau de pauvreté en Afrique a un effet sur l'Europe en raison de sa proximité. Le point le plus proche n'est qu'à 14 km. Donc s'il y a un problème au Nigeria, au Rwanda ou en Somalie, il y a nécessairement un problème en Europe." affirme Dikko Umar Radda, directeur général de l'Agence de développement des petites et moyennes entreprises du Nigeria.  

77% de la population subsaharienne est âgée de moins de 35 ans, et cette jeunesse a besoin d'opportunités économiques, selon Dikko Umar Radda.

Le cadre officiel existe déjà avec le partenariat UE - Afrique, renforcé en septembre 2018 par la nouvelle "Alliance Afrique-Europe pour des emplois et des investissements durables".

Les Européens s'étaient alors engagés à dynamiser les investissements privés en Afrique, renforcer les échanges, créer des emplois et investir dans l'éducation et les compétences.

Certains pays européens ont des programmes de formation pour les entrepreneurs en Afrique. Bienvenue Angui est directrice générale de l'Alliance germano-africaine des PME, qui relie les petites et les moyennes entreprises.

Et même si l'impact est modeste, il y a des cas de réussite, explique-t-elle. "À Dakar, au Sénégal, il y a un petit bidonville appelé Baraka. Environ 2000 personnes y vivent. Et l'Alliance a dit: 'nous devons transformer cette zone en ville auto-suffisante où les jeunes peuvent avoir un avenir'. Que s'est-il passé? Quelques entreprises sont venues et ont offert leur savoir-faire. Beaucoup de PME ont participé et maintenant elles construisent une nouvelle ville sur le bidonville."

Pour des échanges commerciaux plus équitables

Mais ce sont surtout les liens commerciaux qui sont considérés comme une clé pour la prospérité future de l'Afrique. Officiellement, l'UE prône un partenariat équitable entre les deux continents. Mais la réalité est tout autre, selon Dikko Umar Radda.

"L'Afrique est exportatrice de pétrole et de gaz vers l'Europe mais nous importons majoritairement des biens primaires. Ces biens devraient être produits en Afrique. Les sociétés européennes doivent s'établir en Afrique pour utiliser les matières premières disponibles, afin de créer des emplois pour nos nombreux jeunes et assurer l'égalité des chances en termes de développement économique et de prospérité pour nos populations en Afrique."

Les pays africains exportent leur pétrole pour le réimporter une fois raffiné

Les pays africains exportent leur pétrole pour le réimporter une fois raffiné

Des accords de partenariat économique, ou APE, existent entre l'UE et les pays africains. Ils sont conçus pour faciliter les liens commerciaux et promouvoir l'investissement. Mais tous les pays n'en ont pas signé.

Le Nigeria en fait partie. Selon Dikko Umar Radda, l'Europe ne joue pas franc jeu et cela crée de la méfiance. "Ces accords existent sur le papier. Mais en réalité, les pays européens placent leurs programmes et leurs priorités au-dessus de celles de l'Afrique."

"L'Europe ne travaille que pour l'Europe et ne se soucie que d'elle-même", déplore Marie Arena, membre du Parlement européen avec l'Alliance progressive des socialistes et démocrates.

Elle estime aussi que l'UE devrait revoir ses partenariats commerciaux. "Nous travaillons avec des accords de partenariat du passé. Et ils garantissent seulement que l'Europe a accès aux matières premières et qu'elle intègre le marché africain. Je pense que c'est une erreur. Nous devons arriver à une situation gagnant-gagnant. Les Africains ont besoin d'atteindre le développement par des accords commerciaux. Et c'est de cela que nous devons discuter en vue d'un nouveau partenariat avec l'Afrique."

Michael Gahler, eurodéputé du groupe de centre-droit PPE, estime pour sa part que les pays africains devraient davantage promouvoir le commerce entre eux au lieu de se tourner vers l'Europe. Le volume des échanges commerciaux intra-européens est de 70% tandis que celui entre les pays africains n'est que de 16%. 

"L'Afrique doit supprimer ses frontières intérieures pour améliorer ses échanges commerciaux, ses investissements et ses créations d'emplois. Nous avons profité, en tant qu'Européens, du commerce entre nous. Cela nous a rendus forts et riches. Et j'aimerais que nous soutenions le projet de création d'une zone de libre-échange en Afrique. Si les pays africains veulent se protéger, ils pourraient appliquer un tarif douanier panafricain à toutes les importations européennes, américaines et asiatiques."

L'Union européenne s'est engagée à consolider les valeurs démocratiques et la bonne gouvernance en Afrique, ainsi qu'à renforcer les normes de développement humain.

Les députés européens qui seront élus pour la prochaine législature du Parlement européen devront contribuer à ce que ces engagements portent leurs fruits.

Les élections européennes se déroulent donc du 23 au 26 mai prochain. Environ 350 millions de personnes voteront pour choisir 751 eurodéputés... du moins pour quelques mois. Car si le Royaume-Uni sort effectivement de l'Union européenne en octobre, ses députés devront démissionner, le Parlement n'aura alors plus que 705 élus pour les cinq années de législature.

Le "rêve brisé" d'Ibrahim Sountara

Ibrahim Sountara avec son livre Le rêve brisé

Ibrahim Sountara avec son livre "Le rêve brisé"

On reste entre l'Afrique et l'Europe pour notre deuxième sujet de la semaine... Ibrahim Sountara a 33 ans. Il est ivoirien, réfugié en France et devenu écrivain.

L'an dernier il publiait "Le Rêve brisé". Un livre autobiographique sur son parcours entre Abidjan et la France.

Une migration irrégulière où il a, comme beaucoup, frôlé la mort et connu la Méditerranée et la vie dans la rue.

De Rennes à Paris, c'est un reportage d'Hugo Flotat-Talon.