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Afropresse, l’Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron14 octobre 2005

Emigration – Afrique

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Cette semaine les journaux continuent de faire une large place au drame de ces jeunes Africains qui veulent, coûte que coûte, gagner l’Europe en passant par les enclaves espagnoles du nord du Maroc. Cartes à l’appui, les journaux décrivent comment s’organise le grand départ, comment fonctionnent les réseaux de passeurs, quels itinéraires sont empruntés pour gagner les portes de l’Europe. Une Europe qui pour la Frankfurter Rundschau réagit par la peur et la panique, qui tend à se barricader, alors que le continent est venu à bout des murs et des rideaux de fer. Pire encore, souligne le journal, la « solution » du « problème » a été déléguée au Maroc, un pays dans lequel le respect des droits de l’homme n’est certainement pas prioritaire et qui, dans l’espoir d’une quelconque récompense, veut se faire bien voir des Européens en utilisant la manière forte. L’Europe, note la Süddeutsche Zeitung, a du mal à élaborer une stratégie cohérente pour maitriser le problème de la migration, du sud vers le nord. Elle tient à préserver ses frontières et sa prospérité. Ce faisant elle n’a pas le droit de se renier comme communauté de valeurs. L’attentisme serait la pire des attitudes. Il importe avant tout de combattre les causes des grands mouvements migratoires. Or poursuit notre confrère, l’Europe ne fournit pas une aide suffisante pour reconstruire les pays africains au lendemain de guerres ou pour endiguer à temps des crises naissantes. Personne par exemple ne s’intéresse à la Guinée ou au Cameroun, alors que ces pays ont commencé depuis longtemps à s’éroder. La Frankfurter Allgemeine Zeitung relève que les chefs d’Etat africains n’aiment pas s’exprimer sur ce sujet de l’émigration vers l’Europe, qu’ils le minimisent. Et cela uniquement pour des raisons de calcul économique. Leur incapacité à satisfaire les besoins fondamentaux de leur population explique que les transferts d’argent à partir de l’étranger soit un filet social bienvenu. Selon la Banque Mondiale, note le journal, les Africains vivant en Europe et en Amérique envoient jusqu’à 4 milliards de dollars par an dans leurs pays d’origine. C’est de très loin la principale source de devises du continent africain.

Dans ce contexte de l’émigration africaine vers l’Europe, un hebdomadaire publie dans son dernier numéro une longue interview du président Horst Köhler. « Nous avons besoin de l’Afrique » martèle une nouvelle fois Horst Köhler dans les colonnes de Die Zeit. Horst Köhler, je vous le rappelle, a dirigé le Fonds monétaire international avant d’être élu en mai 2004 à la présidence de la république allemande. C’est à l’Afrique qu’il a consacré son premier voyage officiel à l’étranger, et ce qu’il prône aujourd’hui, c’est un nouveau partenariat avec l’Afrique. Les Africains, dit-il, doivent d’abord savoir ce qu’ils veulent, puis formuler en quoi l’extérieur peut les aider. Car souligne-t-il, s’il n’y a pas de développement autonome en Afrique, les conséquences en termes de migration, de maladies et de problèmes d’environnement viendront jusqu’à nous, que nous le voulions ou non. Mais, lui demande le journaliste de Die Zeit, ne faut-il pas lier l’aide à des conditions plus sévères, en matière de droits de l’homme et de démocratie ? Oui, répond Horst Köhler, il faut des conditions. Mais nous n’avons pas le droit d’imposer à l’Afrique une copie du système occidental. Le président allemand insiste également dans cet entretien sur la nécessité de combattre la corruption en Afrique. Seulement, s’empresse-t-il d’ajouter, il ya en Afrique beaucoup d’affaires de corruption auxquelles sont associées des pays industriels. L’affaire Jacob Zuma, en Afrique du sud, pourrait en être une illustration. L’ancien vice-président sud-africain aurait touché des pots-de-vin de la firme française Thomson dans le cadre d’un vaste contrat d’achat d’armements. Son procès pour corruption s’est ouvert cette semaine. La presse allemande s’en fait l’écho. Et c’est pour noter, comme le fait la Frankfurter Rundschau, que ce procès plonge l’ANC dans la pire des crises depuis son accession au pouvoir il y a onze ans.