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Afropresse, l’Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron9 novembre 2007

Afrique/Allemagne – Tchad - Tunisie

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Nous commençons par la conférence sur l’Afrique qui a eu lieu le week-end dernier près de Wiesbaden, en Allemagne. C’était la troisième conférence de ce genre, organisée à l’initiative du président allemand Horst Köhler.

"Les défis du changement – réponses africaines et allemandes", tel était le thème de cette conférence à laquelle Horst Köhler avait invité ses homologues du Botswana, du Nigéria, du Mozambique, de Madagascar et du Bénin. Ils n’étaient pas les seuls puisque, comme s’en félicite la Süddeutsche Zeitung, ce genre de forum permet à des présidents, des responsables politiques, des scientifiques et des artistes allemands et africains de faire connaissance. Cette rencontre, déplore en revanche le journal, est avant tout une réunion de nantis qui évoluent dans le royaume de la théorie. Par exemple seule la sécurité matérielle de sa propre existence autorise à débattre de la suppression de l’aide au développement. Mais que diraient ceux à qui les inondations viennent de voler leur maison et leur récolte? Horst Köhler, concède le journal, ne peut évidemment inviter tous les pauvres d’Afrique. Mais ce forum tirerait à coup sûr profit d’une présence accrue de participants ayant le sens des réalités, des femmes principalement, alors qu’elles étaient sous-représentées. Or souligne le journal, ce sont elles précisément qui, par leur courage et leur créativité, font progresser les sociétés dans les pays africains. Le quotidien Die Welt publie une interview avec l’un des participants à cette conférence sur l’Afrique. Il s’agit de l’économiste kényan James Shikwati, qui plaide justement pour la suppression de l’aide au développement. Car l’aide extérieure, souligne-t-il, va de pair avec la faiblesse de celui qui la reçoit. Bien sûr il y a en Afrique des problèmes de maladies, de corruption, de manque de formation. Mais l’aide nous empêche de considérer ces faiblesses comme des chances. Interrogé sur le prochain sommet Europe-Afrique à Lisbonne, James Shikwati dénonce le paternalisme des Européens qui décident par exemple de qui pourra ou ne pourra pas participer. Et à propos de la polémique sur la présence ou non du président zimbabwéen, il dit appuyer la position d’Angela Merkel. Les Européens, souligne-t-il, demandent sans cesse aux gouvernements africains de dialoguer avec les rebelles lorsqu’il y a des guerres civiles. L’UE doit donc parler avec le "rebelle" Mugabe. Je ne dis pas que ce que fait Mugabe est bien. Mais si on lui interdit de venir à Lisbonne, il en sortira renforcé car il aura trouvé un nouveau bouc émissaire.

L’affaire de l’Arche de Zoé continue aussi d’alimenter les commentaires de la presse allemande. Le voyage-éclair du président français à N’djamena fait écrire à nos confrères que Nicolas Sarkozy joue les Zorros en Afrique.

Le qualificatif revient dans plusieurs journaux. Exemple dans Die Welt qui note que Nicolas Sarkozy s’est rendu dans la capitale tchadienne après avoir reçu l’assurance que les trois journalistes français et les quatre hôtesses de l’air espagnoles seraient libérés. Il est rentré donc avec eux à Paris, et c’est à nouveau un éclatant succès médiatique pour Sarkozy, écrit la Süddeutsche Zeitung. Mais à quel prix? Le fait qu’il ait proclamé son "respect" à la justice tchadienne et flatté le président Déby risque de se faire payer. Les six collaborateurs de l’Arche de Zoé encore emprisonnés au Tchad espèrent en vain, sans doute, être jugés en France ou y purger au moins leur peine s’ils sont condamnés. Idriss Déby, poursuit le journal, a d’ores et déjà érigé les délits des Français en crimes répugnants et il monté à ce point l’opinion publique de son propre pays qu’un procès équitable est difficilement imaginable. Les rôles sont inversés, note de son côté la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Idriss Déby, le "dictateur aux pétrodollars", comme l’apostrophe le journal, vit un surprenant changement de rôles depuis le début de l’affaire de l’Arche de Zoé. Lui le chef d’Etat mal aimé, mais soutenu par Paris, peut maintenant faire pression sur les dirigeants français et n’a plus à satisfaire penaudement aux désirs de la France en échange de l’aide militaire française.

Enfin les 20 années de pouvoir du président Ben Ali, en Tunisie, inspirent à la presse allemande un bilan peu glorieux. En témoigne ce titre de la Süddeutsche Zeitung: "une main de fer derrière une façade démocratique". Le 7 novembre 1987, rappelle le journal, la majorité des Tunisiens avait approuvé la déposition, par Ben Ali, du président Bourguiba. Après 30 ans de pouvoir autocratique, la sénilité du fondateur de l’Etat tunisien était devenue évidente. L’ère Ben Ali, note le journal, avait aussi bien commencé: libération de prisonniers politiques, retour d’exilés au pays, abolition officielle de la torture. Mais les choses devaient changer au bout de quelques années. Sous l’effet de la prétendue découverte d’un complot d’officiers, la Tunisie est devenue l’Etat policier le plus perfectionné du Maghreb. En comparaison, le Maroc et l’Algérie ont des structures pluralistes et des débats publics. Il est incontesté, relève un peu plus loin le journal, que la stagnation politique de la Tunisie a apporté à la fois la stabilité et l’essor économique. En 20 ans, le revenu par habitant a été multiplié par cinq. 3,9% seulement de la population vivent en dessous du seuil de pauvreté. 99% des enfants sont scolarisés. Bilan de ces vingt dernières années, conclut le journal après avoir évoqué la corruption du clan Ben Ali: plus les Tunisiens sont riches et éduqués, plus ils sont mécontents. Ils voudraient avoir leur mot à dire, mais cela leur est interdit.

En bref encore, et cela n’a rien à voir avec la Tunisie, un article de la Frankfurter Rundschau nous apprend que 100 ans après le massacre des Hereros par les troupes coloniales allemandes dans ce qui est aujourd’hui la Namibie, des représentants des gouvernements allemand et namibien ont lancé à Bonn une initiative de réconciliation. Dans un mémorandum signé par les deux pays, le gouvernement allemand s’engage à verser à la Namibie 20 millions d’euros dans les trois à cinq prochaines années. L’argent sera affecté à des petits projets économiques, sociaux et culturels.