1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

Afropresse, l'Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron27 février 2009

C'est tout d'abord le Kenya qui cette semaine retient l'intérêt des journaux. Philipp Alston, le rapporteur spécial des Nations unies pour les exécutions extra-judiciaires, a achevé sa mission de dix jours au Kenya.

https://p.dw.com/p/H2ky
Image : DW/ Jochum

Les accusations qu'il porte contre la police kenyanne font froid dans le dos.

Les cadavres gisaient dans des prairies, sous des ponts ou dans les épais buissons de la périphérie de Nairobi - lit-on par exemple dans la Tageszeitung qui note que plus de 500 morts ont été ainsi découverts entre juin et octobre 2007. Certains avaient des blessures par balles à l'arrière de la tête, les victimes ont été exécutées à bout portant. Le rapporteur spécial de l'ONU, poursuit le journal, affirme avoir la preuve que la police kényanne est responsable de ces assassinats. Son rapport établit qu'un escadron de la mort a tué de manière ciblée tous ceux qui étaient accusés d'appartenir à la secte mafieuse des Mungiki. Les assassinats sont exécutés de manière arbitraire, souligne Philip Alston, les auteurs ne sont pas inquiétés. Et le journal d'ajouter que le système mis au jour par le rapporteur de l'ONU protège tous ceux qui assassinent des suspects au lieu de les arrêter. L'armée ne se conduit pas différemment de la police. Philip Alston lui reproche d'être responsable de plus de 200 morts dans la région du Mont Eigon, dans l'ouest du Kenya. Lors d'une opération contre une milice criminelle en mars 2008, des suspects ont été torturés, violés et brutalement assassinés. La Berliner Zeitung relève qu'un chauffeur de l'escadron de la mort de la police kenyanne a donné à des défenseurs des droits de l'homme une interview dans laquelle il décrit 24 exécutions. Ce témoin ne pourra répéter ses propos devant un tribunal, souligne le journal, Après l'interview il a été abattu dans des circonstances non élucidées. A la lecture du Tagesspiegel, on constate que la presse kenyanne n'est pas non plus à l'abri des exécutions extrajudiciaires. Un journaliste qui avait relaté des cas de corruption dans la police, a été retrouvé mort, décapité, dans un buisson. Avant sa disparition il avait reçu des menaces de la police et en avait informé des amis.

Le Zimbabwe continue d'alimenter les chroniques africaines de la presse allemande. Le président Mugabe a célébré dans le faste ses 85 ans.

Homard et choléra, titre la Süddeutsche Zeitung, qui relève que comme chaque année, Robert Mugabe a fêté son anniversaire dans une extravagance incommensurable. 2000 bouteilles de champagne, 8 000 homards et 500 bouteilles de whisky ont été commandés pour ses affidés. S'y sont ajoutées 76 vaches que les pauvres paysans du Zimbabwe ont été contraints de donner au parti. Que souhaiter de plus pour son anniversaire que des superlatifs, demande notre confrère. Mugabe est l'un des plus puissants et des plus anciens dictateurs africains. Parallèlement son pays vit une gigantesque catastrophe humanitaire, une famine depuis plusieurs années déjà. L'espérance de vie est de 36 ans, nulle part ailleurs ou presque dans le monde elle n'est aussi courte. Le dictateur peut encore ajouter un autre superlatif à son bilan, ajoute le journal: le Zimbabwe vit actuellement la plus grande épidémie de choléra dans l'histoire de l'Afrique. 80 000 cas et près de 4 000 morts ont été enregistrés, mais ces chiffres ne sont qu'une partie de la réalité.

A Madagascar le bras de fer n'est pas terminé entre le président Marc Ravalomanana et le maire déchu de la capitale malgache. La presse allemande continue donc de s'en faire l'écho. Mais encore faut-il préciser que les articles publiés sur Madagascar datent maintenant de quelques jours, avant donc l'échec des pourparlers menés sous l'égide des églises chrétiennes. Pour la Tageszeitung, les troubles à Madagascar commencent à prendre une allure grotesque. La population est lasse du chaos. Personne ne semble prêt à un accord à l'amiable. Mais la pression grandit, estime le journal: alors que des charters de vacanciers sont annulés et que des firmes étrangères stoppent leurs investissements, les diplomates commencent à perdre patience. Dans une lettrre à Ravalomanana, l'ambassadeur de l'Union européenne, Jean-Claude Boidin, exhorte le président à "faire un geste en réponse au malaise". L`écho a été nul. Le Tagesspiegel de Berlin a rencontré l'ambassadeur de Madagascar en Allemagne, Alphonse Ralison. Lequel souligne que la politique économique libérale de Marc Ravalomanana a produit de très forts taux de croissance: 9% en 2002, 7% en 2008. Mais demande-il, comment partager la croissance avec la population? Sur ce point, poursuit le journal, il a manifestement échoué.

Enfin la presse allemande tourne aussi ses regards vers la République démocratique du Congo. Tout d'abord pour évoquer la fin officielle de l'opération militaire rwando-congolaise contre les rebelles hutus rwandais des FDLR dans le Nord-Kivu.

Cinq semaines après le début de l'opération, le bilan est mitigé, note la Tageszeitung. Le gouvernement rwandais dit avoir atteint 95% de ses objectifs. Mais le général congolais John Numbi a cité des chiffres bien modestes: 153 combattants FDLR tués, 13 blessés, 37 faits prisonniers et 103 rentrés au Rwanda. Si les FDLR, souligne le journal, ne sont pas durablement affaiblis, la rébellion tutsi du CNDP devrait bientôt redevenir active. 300 seulement de ses 6 000 soldats se sont intégrés dans l'armée gouvernementale congolaise. Enfin la Süddeutsche Zeitung consacre un long article à un orchestre de Kinshasa pas comme les autres, Staff Benda Bilili, ce sont six musiciens handicapés, victime de la polio, mais qui débordent de vitalité et de générosité, et qu'un producteur belge a entrepris de faire connaitre en Europe.