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Afropresse, l'Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron/Fréjus Quenum22 mai 2009

Cette semaine l'intérêt des journaux se porte tout d'abord sur la Somalie.

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Combattants islamiques à MogadiscioImage : AP

"Des troupes éthiopiennes en Somalie", titre par exemple la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Quatre mois après son retrait de Somalie, l'armée éthiopienne semble être de nouveau intervenue dans le pays. Des témoins oculaires affirment avoir vu des soldats éthiopiens lourdement armés qui auraient érigé des barrages routiers autour de la ville somalienne de Beledweyne, près de la frontière. Une telle intervention, poursuit le journal, s'inscrit sans doute dans le contexte de l'avancée, le week-end dernier, des milices radicales islamistes, les shebbab. Après de violents combats avec les troupes du gouvernement somalien de transition elles ont réussi à conquérir la ville de Jowhar, à 50km au nord de Mogadiscio. Or la conquête de Jowhar est un sérieux revers pour le président du gouvernement de transition Cheik Charif Ahmed. Cet islamiste dit modéré est originaire de cette localité, souligne la FAZ. Encore la Somalie, titre de son côté la Berliner Zeitung qui note que le doute subsiste: les troupes éthiopiennes sont-elles vraiment entrées en Somalie ou ne font-elles que renforcer la frontière pour éviter un débordement de la guerre civile en Ethiopie? A New York dans le palais de verre de l'ONU, relève le journal, on est désemparé. La force de paix de l'ONU réclamée périodiquement par certains pays membres, ne verra pas le jour de sitôt. On serait donc heureux sans doute que les Ethiopiens pénètrent dans le chaudron somalien pour voler au secours d'un gouvernement aux abois face à l'assaut des milices islamistes radicales. Les Ethiopiens connaissent le terrain, rappellent le journal. Ils sont déjà intervenus en 2006.

La République démocratique du Congo continue aussi de figurer en bonne place dans les colonnes de la presse allemande.

Kinder-Soldaten der Union Kongolesischer Patrioten (UPC) patrouillieren durch die Straßen von Bunia in Kongo
Image : AP

La Frankfurter Rundschau publie dans ses colonnes deux longs reportages. Le premier concerne l'exploitation du tantale, sanglant tantale, écrit l'auteur du reportage qui s'est rendu à bord d'un vieux bimoteur tchèque à Walikale. Walikale est située en pleine forêt, à une heure et demie d'avion de Goma, la capitale provinciale du Nord-Kivu. Le pilote s'appelle Piotr. Et il est pressé. Il compte faire encore deux rotations dans la journée entre Goma et Walikale. L'avion à peine posé, des Congolais vêtus de haillons chargent au pas de course la marchandise dans l'appareil. Les sacs sont lourds comme s'ils contenaient du plomb. Ils contiennent en fait des morceaux de cassitérite - une pierre grisâtre qui, outre de l'étain, renferme de précieuses matières, comme le wolfram, le niobum et le tantale. Sans tantale, il n'y aurait ni capsules spatiales, ni ordinateurs ou téléphones portables. Nous n'avons pas le droit de quitter l'avion, précise notre confrère. Les journalistes n'obtiennent plus d'autorisation pour les zones dites "rouges", celles où les matières premières congolaises sont âprement disputées. La nervosité du gouvernement a ses raisons: les conditions qui règnent dans la mine de Bishe, à 80km de Walikale, ne sont pas de nature à redorer la réputation, déjà bien écornée, de la RDC. Mon accompagnateur Patient Mulhozi, ajoute le journaliste de la Frankfurter Rundschau, a visité la mine. Il parle de centaines d'enfants astreints à un travail de galérien: des garçons de 10 à 14 ans qui dans des fosses de deux à trois mètres de profondeur tapent sur la pierre à coup de pics et de marteaux. Ils reçoivent un à trois dollars par jour.

L'autre reportage illustre les atrocités qui continuent d'être commises dans le Nord-Kivu.

La guerre semblait terminée, lit-on dans la Frankfurter Rundschau. Et pourtant des survivants des derniers carnages continuent à sortir de la jungle pour se faire soigner à Goma. Exemple Pauline, 27 ans, qui arrive du village de Kalembe dans le Masisi. Elle raconte: des hommes sont arrivés de nuit dans la concession où elle vivait avec son mari et leurs quatre enfants. Rebelles ou soldats gouvernementaux? Pauline ne sait pas. Ce qu'elle dit, c'est que les intrus ont tué de sang froid ses enfants, puis son mari, avant de s'attaquer à elle. Pauline était enceinte de sept mois. Les hommes l'ont violée à tour de rôle, plusieurs fois. Le calvaire a duré cinq heures. Une fois ses bourreaux partis, Pauline s'est enfuie dans la forêt, pour y tomber sur une autre meute d'hommes qui eux aussi l'ont violée et martyrisée. Des voisins l'ont retrouvée dans la forêt, inconsciente. Pauline a mis cinq semaines pour arriver à l'hôpital Heal Africa de Goma.

Et toujours au chapitre des crimes de guerre, la presse allemande se fait l'écho de la comparution d'un chef rebelle du Darfour devant la Cour pénale internationale.

Chinesische UN Soldaten in Darfur Sudan China
Image : AP

Une première, souligne la Tageszeitung. Et ce à double titre dans la mesure où le chef rebelle en question, Bahr Idriss Abu Garda, s'est présenté volontairement devant la CPI. Abu Garda est accusé d'avoir dirigé le commando qui a attaqué les forces de paix de l'Union africaine le 29 septembre 2007 à Haskanita. Il proteste de son innocence. L'attaque avait fait 12 morts et huit blessés chez les soldats africains. Cela peut sembler minime, poursuit le journal, comparé aux crimes contre l'humanité, avec leurs centaines de milliers de morts, imputés par la CPI au gouvernement soudanais. Mais la cour veut prouver que ses enquêtes au Darfour ne sont pas unilatérales. En coopérant avec la CPI, Abu Garda veut de son côté marquer des points contre le président El Béchir, qui fait l'objet d'un mandat d'arrêt de la CPI et qui refuse toute coopération avec la cour pénale. La stratégie d'Abu Garda, ajoute le journal, est d'ailleurs commune à tous les groupes rebelles du Darfour, aussi divisés soient-ils entre eux.