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La carrière d'Angela Merkel

Marie-Ange Pioerron9 septembre 2013

Elle ? Entrer dans la politique ? Ils étaient nombreux à ne pas y croire. Visage blafard, coupe de cheveux et garde-robe tout, sauf à la mode. Et pourtant, c'est déjà la troisième fois qu'Angela Merkel est candidate.

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La métamorphose : Angela Merkel dans les années 90 puis 2000Image : picture-alliance/dpa

On ne peut pas vraiment dire que le mandat d'Angela Merkel ait été un long fleuve tranquille. En juin dernier, à Saint-Petersbourg, la chancelière allemande a échappé de peu à un guet-apens politique. En dépit d'un accord, le président russe Vladimir Poutine a voulu l'empêcher de s'exprimer lors de l'inauguration d'une exposition présentant des objets confisqués par l'Armée Rouge à la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Offensée, Angela Merkel réagit aussitôt en menaçant Vladimir Poutine d'écourter son séjour en Russie. Résultats des courses : victoire pour la chancelière, échec et mat pour le président russe.

Se taire, observer et agir tardivement

Le récent scandale d'espionnage des services secrets américains de la NSA aurait pu être une véritable catastrophe pour Angela Merkel. Les Etats-Unis, alliés privilégiés de l'Allemagne, espionnent leurs amis allemands. Et cerise sur le gâteau, les services secrets allemands leur donnent un coup de main. Du jour au lendemain, tout le pays est au courant et les critiques fusent à l'égard de la chancelière. Angela Merkel commence par se taire, avant de montrer son agacement. « Elle parvient à dégonfler toutes les controverses », juge l'historien Edgar Wolfrum. Elle évite les problèmes et finit à chaque fois par avoir l'opinion publique de son côté. Un don politique qui lui attire autant de considération que de mépris.

Merkel Barroso und Hollande in Berlin am 18.03.2013
Au sein de l'Union européenne, c'est Angela Merkel qui donne la direction. Ici avec le président français François Hollande (à g.) et le président de la Commission européenne Jose Manuel BarossoImage : Reuters

Malgré tout, Angela Merkel peut aussi se montrer très ferme. C'est surtout le cas sur la scène européenne, où depuis 2008 elle est très demandée pour venir à la rescousse de la zone euro plongée dans une très grave crise. En Grèce, toute comme dans une bonne partie de l'Europe du sud, sa politique de rigueur est loin de faire l'unanimité. Au niveau international, en revanche, la politique de l'euro de la chancelière allemande a la cote.

Le cosmos de Merkel: des chiffres et des faits

Pour apprendre à réellement connaître Angela Merkel, il faut savoir d'où elle vient. De toute l'histoire de l'Allemagne d'après 1945, aucune personnalité politique n'avait jusque là était autant sous-estimée qu'Angela Merkel, fille de pasteur d'Allemagne de l'est. A ses débuts, lors de ses premières apparitions en public, elle est loin d'être télégénique. Il faut dire qu'Angela Merkel est plus pragmatique que missionnaire.

« Angela Merkel n'est évidemment pas une idéologue », estime la journaliste Jacqueline Boysen, auteure d'une biographie sur l'actuelle chancelière avant qu'elle n'arrive au pouvoir. « Elle est libre de prendre des décisions dès lors qu'elle se fonde sur des chiffres, des données et des faits. » Selon Jacqueline Boysen, lorsqu'Angela Merkel dispose d'arguments pertinents, « elle n'hésite pas à passer outre l'idéologie de son propre parti ».

Chez Angela Merkel, c'est le pragmatisme qui prime, quitte à devoir revoir ses positions. Après la catastrophe nucléaire de Fukushima, la chancelière pro-nucléaire a conduit la sortie du nucléaire en Allemagne. Cette technique lui a plutôt bien réussi. « La petite fille », comme l'appelait Helmut Kohl, s'est émancipée… A tel point qu'elle est désormais connue sous le surnom de « Mutti », maman en allemand. Si Angela Merkel a son parti et le gouvernement sous contrôle, ce n'est pas par hasard. Mais pour en comprendre les raisons, il faut fouiller un peu dans son passé.

Deutschland Bundestag Bundeskanzler Helmut Kohl und Angela Merkel 2000
Angela Merkel, confiante, face à son mentor Helmut KohlImage : picture-alliance/dpa

Se méfier des autres

Angela Merkel a grandi en RDA, l'Allemagne de l'est communiste jusqu'à la chute du mur. Même si elle n'était pas d'accord avec le régime de l'époque, elle ne s'est jamais fait connaître comme une opposante. D'après Jacqueline Boysen, Angela Merkel a bien connu quelques mises au pas, mais l'État socialiste ne lui a pas infligé de sévices comme ce fut le cas avec de nombreux dissidents politiques. Quoiqu'il en soit, la chancelière a appris très tôt à se méfier des autres.

Angela Merkel sait écouter. C'est en tout cas ce que disent de nombreuses personnes dans son entourage. Mais pour son camarade de parti Kurt Lauk, également président du Conseil économique de la CDU, la capacité de compréhension de la chancelière a ses limites. « Elle écoute, enregistre et comprend. Mais ce qui en ressort est toujours assez incertain, on ne sait jamais vraiment ce qu'elle en pense ».

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Campagne électorale 1990 : Angela Merkel rend visite à des pêcheursImage : ullstein bild/Ebner

Une entrée tardive en politique

Angela Merkel est arrivée assez tard en politique et plutôt par hasard. Alors que l'actuelle chancelière n'a que 35 ans, elle fait ses premières armes en politique en tant que porte-parole adjointe de Lothar de Maizière, dernier ministre-président de la RDA. Elle venait juste d'entrer à la CDU. Très rapidement, Angela Merkel fait preuve d'assiduité et d'ambition.

Sous le chancelier Helmut Kohl, Angela Merkel devient ministre de l'environnement, un poste rêvé pour la physicienne de formation. A l'époque, la question des centrales et des déchets nucléaires était déjà très controversée. Pour Angela Merkel, en revanche, le nucléaire, c'est l'énergie de l'avenir : maîtrisable et sans meilleure alternative. Il faudra attendre la catastrophe de Fukushima en 2011 pour qu'elle change d'avis.

Flash-Galerie Angela Merkel 1992 Bundesministerin für Frauen und Jugend
Au début des années 90 alors qu'elle était ministre fédérale pour les femmes et la jeunesseImage : picture alliance / dpa

Lorsque Helmut Kohl perd les législatives de 1998, l'ensemble de la CDU est sous le choc. Mais Angela Merkel, elle, voit en cette défaite une chance de s'assurer un avenir politique. Wolfgang Schäuble devient alors le nouveau président du parti. Il nomme Angela Merkel secrétaire générale du parti. Mais en plein scandale du financement de la CDU dont Helmut Kohl est la cible, Angela Merkel se détourne de son ancien chef et de Wolfgang Schäuble.

Écarter ses adversaires

En avril 2000, Angela Merkel est hissée à la présidence de la CDU. En 2005, le parti la présente comme « Spitzenkandidat », candidat de tête aux législatives. Les résultants sont juste suffisants pour former un gouvernement avec les adversaires sociaux-démocrates. Mais pour Angela Merkel, la victoire est bien là : elle devient chancelière.

CDU/CSU stellen ihr Wahlprogramm in Berlin vor
Vers un troisième mandat ?Image : AFP/Getty Images

Voilà maintenant 13 ans qu'Angela Merkel est à la tête de la CDU, huit ans qu'elle est chancelière. Sans exception aucune, elle a jusqu'ici réussi à écarter tous ses adversaires à l'intérieu du parti. Aujourd'hui, Angela Merkel n'a plus besoin de démontrer sa capacité à se comporter en leader.

Sauf que diriger, c'est bien, savoir où on va, c'est encore mieux. C'est en tout cas ce que se disent de nombreuses personnes au sein de la CDU, un parti qui manquerait actuellement de ligne directrice.

Ecoutez ci-dessous le portrait d'Angela Merkel, brossé par Jeannette Seiffert et Antoine Mouteau.

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