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Berlin et l'Afrique

15 juillet 2011

Angela Merkel a visité trois pays en quatre jours: le Kenya, l'Angola et le Nigéria. Cette tournée africaine inspire de nombreuses réflexions à la presse allemande.

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Angela Merkel au Nigeria, 14.07.11Image : dapd

Dans les colonnes de la Frankfurter Allgemeine Zeitung, le directeur de l'Afrika-Verein, l'association pour l'Afrique, plaide pour un engagement accru des entreprises allemandes en Afrique. Il salue donc ce voyage d'Angela Merkel dans trois puissances régionales du continent africain. L'Afrique, ajoute Hans Meier-Ewert, est un continent dynamique qui a affiché entre 2001 et 2008 une croissance de 6% et atteindra de nouveau un tel taux à l'avenir. Mais en Allemagne l'image de l'Afrique est toujours dominée par les guerres, les crises, les maladies et les catastrophes. Cette image n'a plus grand chose à voir avec la réalité dans la majeure partie des pays africains.

Angela Merkel in Angola
Angela Merkel avec le président angolais dos SantosImage : dapd

Les commentaires sont nettement moins enthousiastes dans les autres journaux. Comme le note la Frankfurter Rundschau, mais elle n'est pas la seule, le choix du Nigéria et de l'Angola, les deux principaux producteurs de pétrole en Afrique, n'est pas un effet du hasard. L'Afrique prend une importance grandissante pour l'approvisionnement de l'Allemagne en énergie et en matières premières. Le problème est que l'Allemagne ne s'est guère employée jusqu'à présent à ce que la population des pays africains profite aussi des recettes tirées du pétrole et des matières premières.

"Merkel et les géants du pétrole", titre la Süddeutsche Zeitung qui souligne que le Nigéria et l'Angola illustrent chacun à leur manière cette "malédiction des ressources" dont il est si souvent question en Afrique. Le journal évoque la sale guerre pour le pétrole qui fait rage dans le delta du Niger. Il note aussi que beaucoup d'autres secteurs économiques ont été littéralement étouffés au Nigéria, parce qu'il était plus confortable de gagner des milliards de pétro-dollars que d'investir à long terme dans d'autres secteurs. En Angola non plus poursuit le journal, la population ne profite guère de la manne pétrolière. Mais le président dos Santos est parmi les hommes les plus riches du monde. Bref pour la Süddeutsche Zeitung ce voyage d'Angela Merkel émet plutôt un signal confus dans la mesure où l'Angola comme le Nigeria pratiquent l'inverse des objectifs de la politique africaine de l'Allemagne, à savoir promouvoir la protection des ressources, la protection de l'environnement et le développement économique durable. Elites riches, citoyens pauvres, écrit dans le même ordre d'idée le Tagesspiegel de Berlin qui note que le déficit démocratique en Angola est aussi grand que ses réserves de pétrole.

Die Landeshauptstadt Luanda liegt an einer Bucht des Atlantik
Luanda en 2006Image : picture-alliance/ZB

Des patrouilleurs allemands pour l'Angola?

A propos de l'Angola, la visite d'Angela Merkel donne lieu à une polémique en Allemagne. Les efforts de l'Allemagne pour conquérir des marchés en Afrique prennent une tournure originale, écrit die Tageszeitung. La chancelière Angela Merkel a proposé à la marine de guerre angolaise des patrouilleurs allemands. Notre objectif, a dit Mme Merkel, est que des conflits régionaux puissent aussi être pacifiés par des troupes régionales, et elle a cité comme exemples la Somalie et le Soudan. Or poursuit le journal, en dehors du fait que cela n'a pas vraiment fonctionné dans ces deux pays, ce n'est guère applicable à l'Angola. L'Angola possède l'une des armées les plus grandes et les plus expérimentées en Afrique. Elle est déjà intervenue à plusieurs reprises dans deux pays voisins: la République démocratique du Congo et le Congo-Brazzaville. L'Angola est aussi en conflit avec ces deux pays pour la délimitation des eaux territoriales. Là où l'Atlantique abrite les plus grandes réserves de pétrole, une bande côtiere de 20 km, appartenant à la RDC, sépare le territoire angolais de l'enclave angolaise de Cabinda. Le Congo réclame depuis des années une extension de ses eaux territoriales. Dans ce contexte la livraison de patrouilleurs à la marine angolaise est un projet ultra-sensible.

Kenia Dürre in Ostafrika Flüchtlingslager in Dadaab
Réfugiés somaliens à la périphérie du camp de Dadaab au KenyaImage : dapd

Les premières victimes du changement climatique

L'image de l'Afrique en Allemagne est trop souvent une image de guerres et de catastrophes, a déploré le directeur de l'Afrika-Verein dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Les catastrophes pourtant font aussi partie de la réalité. En témoigne la sécheresse qui sévit actuellement dans la Corne de l'Afrique et dont la presse se fait l'écho. Pour l'hebdomadaire Die Zeit, les milliers de personnes qui risquent de mourir de faim en Somalie sont les premières victimes du changement climatique. Cette famine, écrit le journal, n'est probablement pas le prolongement de quelque chose d'ancien, mais le début de quelque chose de nouveau, le début d'une mondialisation qui se traduit, non pas par des flux commerciaux ou la transmission d'informations, mais par le dioxyde de carbone dans l'atmosphère terrestre. Ce sont des avions américains, des voitures allemandes et des centrales thermiques chinoises qui provoquent la sécheresse et la faim dans la Corne de l'Afrique ou qui du moins y contribuent. C'est aussi notre catastrophe, souligne le journal. Le climat n'est pas le seul responsable, estime de son côté la Frankfurter Allgemeine Zeitung. En Ethiopie en tout cas la catastrophe est aussi le résultat de la volonté du gouvernement éthiopien de passer à une agriculture industrielle. D'immenses surfaces utilisées autrefois par les troupeaux des nomades ont été louées à des trusts agricoles indiens, chinois et sud-coréens.

Sudan Nil Boot Menschen
Les larves du ver de Guinée prolifèrent dans les marais du Nil blancImage : AP

Dernière bataille contre le ver de Guinée

L'indépendance du Soudan du sud a déjà donné lieu à beaucoup de commentaires sur les défis qui attendent le nouvel Etat. Cette semaine un journal note que cette indépendance pourrait permettre d'éradiquer l'un des pires parasites, le ver de Guinée. Comme l'écrit la Süddeutsche Zeitung: après une longue guerre contre le Nord, le Sud a proclamé son indépendance. Mais une autre bataille continue. L'ennemi s'appelle Dracunculus medinensis et provoque une horrible maladie. Il y a 25 ans, 3,5 millions de cas étaient encore recensés dans 20 pays d'Asie et d'Afrique. Aujourd'hui il y en a moins de 2000, presque tous au Soudan. Avec la fin de la guerre au Sud et l'engagement sur place de la Fondation Carter, le ver de Guinée pourrait être vaincu.

Auteur: Marie-Ange Pioerron
Edition: Georges-Ibrahim Tounkara