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L'édition souffre du manque de lecteurs au Cameroun

Henri Fotso
17 octobre 2019

Le Cameroun compte plusieurs grands écrivains tel Mongo Béti ou Eza Boto, Francis Bebey ou Ferdinand Oyono. Mais le secteur de l’édition subit la chute des lecteurs et doit diversifier ses activités pour survivre.

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Südafrika Buchladen
Image : picture-alliance/Photoshot/Zhai Jianlan

"L’édition consiste à recevoir de la part des personnes qui écrivent des manuscrits, à travailler sur ces manuscrits de manière à les bonifier, c’est-à-dire à les rendre meilleurs du point de vue de leurs formes, c’est-à-dire la langue dans laquelle le manuscrit est écrit, et les idées et la structure argumentative qui y sont développées."

Voici la définition de Marcelin Vounda Etoa, éditeur et ancien directeur des Editions clé qui publient depuis 1963 des auteurs africains francophones.

Présentes dans plusieurs pays africains, les Editions clé ont été créées par des missionnaires protestants. 

Les plus grands auteurs africains tels qu’Henri Lopez, Guy Menga, ou encore Wole Soyinka, prix Nobel de littérature en 1986, sont passés par cette maison. 

Depuis plus de seize ans, Vincent de Paul Lélé est responsable de Littérature au siège des Editions clé à Yaoundé.

"C’est une panoplie d’auteurs qui ont fait les beaux jours des Editions clé. Et après ce temps de vaches grasses, il y a eu des moments de difficultés, notamment pendant les années 80 quand les subventions sont parties et qu’il y a eu plusieurs autres maisons d’éditions concurrentes qui se sont créées en Afrique noire", explique-t-il. 

 

Chute de la lecture 

Les Editions clé ont connu une reprise économique après la dévaluation du franc CFA en 1994. Mais la tradition de la lecture va chuter ensuite avec le développement d'internet puis du téléphone mobile. 

Les subventions, devenues aujourd’hui rares, étaient autrefois accordées par les églises allemandes et hollandaises. 

Les Editions clé se portaient donc  bien pendant leurs deux premières décennies grâce au taux de lecture élevé et aux subventions occidentales. Mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. 

"On a dû développer la construction de maisons et de bureaux pour les mettre en location. Cela permet le fonctionnement normal de la maison d’édition parce qu’en Afrique, l’édition et la littérature ne paient plus", raconte Vincent de Paul Lélé.

A l'en croire, "ce sont davantage les ouvrages du programme scolaire qui permettent de vivre, ou bien si vous avez la chance d’avoir quelques titres qui peuvent vous permettre de vendre une dizaine ou une vingtaine de milliers d’exemplaires."

 

Pas "d'avantage pécuniaire à être éditeur"

Le métier d’éditeur est donc un beau métier mais la situation économique du secteur n'est pas bonne au Cameroun.

"On ne devient pas éditeurs pour être riche, pour faire de bonnes affaires comme on les fait dans les autres secteurs. Les métiers d’éditeurs sont des métiers à mi-chemin entre l’entreprenariat à caractère mercantile et le sacerdoce lié à la promotion des valeurs culturelles. Il n’y a pas un avantage pécuniaire à être éditeur. L’avantage est symbolique et culturel", indique l'éditeur Marcelin Vounda.

Le livre est un bien économique et un bien culturel. Le retour sur investissement est très lent. Il est proportionnel au niveau de lecture de l’espace cible où l’éditeur mène son activité. 

Au Cameroun, il existe désormais une floraison d’éditeurs dont nombre sont formés à l’Ecole supérieure des sciences et techniques de l’information et de la communication (ESSTIC) de l’Université de Yaoundé 2.

Mais lorsque vous imprimez un livre au Cameroun et que celui-ci se vend à 300 exemplaires sur l'année, vous avez de la chance. 500 exemplaires, c’est un record. Et 1.000 exemplaires, c’est un exploit.