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Dialogue national au Cameroun : bilan contrasté un an après

Henri Fotso
30 septembre 2020

Beaucoup de mesures avaient été annoncées au lancement du débat il y a un an. Mais peu ont été mises en place.

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Le "grand dialogue national" s'était ouvert fin septembre à Yaoundé
Le "grand dialogue national" s'était ouvert fin septembre à YaoundéImage : Getty Images/AFP/Str

Un an après le grand dialogue national, le bilan de la mise en œuvre des mesures annoncées est faible. Pourtant, beaucoup d'espoirs avaient été placé dans cette rencontre en vue du retour de la paix et de la reconstruction dans les deux régions anglophones du Cameroun. 

Décentralisation

Le Grand dialogue national était la dernière carte du président Biya face à la pression de la communauté internationale, de l'opposition politique et des défenseurs des droits humains au Cameroun. Il avait pour objectif de faire taire les armes dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Des recommandations importantes avaient été prises, telles que l'attribution d'un statut spécial aux deux régions anglophones, la reconstruction de ces régions détruites par la guerre, le cessez-le-feu entre l'armée républicaine et les sécessionnistes, la démobilisation et la réinsertion des rebelles, etc…

"Le gouvernement s'est engagé dans la réalisation des résolutions du Grand dialogue national", estime aujourd'hui Hervé Emmanuel Nkom, membre du Comité central du RDPC de Paul Biya au pouvoir. "C'est ainsi que dans les trois principales catégories (institutions, gouvernance et diaspora), nous pouvons dire aujourd'hui, par exemple, qu'en ce qui concerne la gouvernance, les choses avancent à un rythme très soutenu", assure-t-il. Et d'expliquer que la décentralisation et la régionalisation vont accélérer cette mise en place des grandes recommandations. "Il reste maintenant la diaspora sur laquelle un texte va être débattu au niveau du Parlement et sera rapidement mis en place."

Avant l'annonce de la tenue de ce dialogue les autorités de Yaoundé avaient dépêché plusieurs missions dans le but de convaincre la diaspora camerounaise de participer à cette rencontre
Avant l'annonce de la tenue de ce dialogue les autorités de Yaoundé avaient dépêché plusieurs missions dans le but de convaincre la diaspora camerounaise de participer à cette rencontreImage : Getty Images/AFP/Str

"Logique de l'escalade"

Les engagements adressés au sortir de ce dialogue avaient entraîné un apaisement des critiques internationales contre le régime de Yaoundé. Ce qui a fait notamment dire au politologue Pierre Nka que Paul Biya avait réussi son coup. Mais un an plus tard, dans les régions anglophones, la situation n'a pas beaucoup changé. Les combats se poursuivent et les crimes les plus odieux sont régulièrement enregistrés.

"On reste toujours dans une logique de tension", déplore Pierre Nka. "Les tensions se justifient par le fait que les acteurs du Grand dialogue n'ont pas été francs dans les décisions qu'ils ont prises". Il dénonce le statut spécial des régions Nord-Ouest et Sud-Ouest. "Ce n'est pas une réalité. Au contraire, il y a l'Opération Clean qui se déroule actuellement, avec toutes les bavures qu'on peut imaginer. Le barreau s'est prononcé là-dessus pour s'opposer à cette pratique." Pierre Nka dénonce une  "logique de l'escalade" depuis la fin du Grand dialogue. "C'est très difficile de dire quelle sera la suite."

Le gouvernement insiste sur le fait que l'opération de réinsertion des rares sécessionnistes démobilisés se poursuit, que la banque des petites et moyennes entreprises, avec l'aide de l'Organisation internationale du travail, soutient la reconstruction et que les élections régionales se dérouleront bien le 6 décembre prochain. Mais les sécessionistes et l'armée camerounaise continuent de s'affronter dans une guerre civile qui a déjà fait plus de 3.000 morts au Cameroun.