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Ebola menace les systèmes sanitaires

Philippe Pognan29 août 2014

L'épidémie qui frappe l'Afrique de l'Ouest fait toujours couler de l'encre. Les journaux s'intéressent également à une vague d'arrestations au sein de l'armée rwandaise ainsi qu'aux activités terroristes de Boko Haram.

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Enterrement d'une victime d'Ebola en Sierra LeoneImage : AFP/Getty Images

On ignore l‘ampleur réelle de l'épidémie d'Ebola, souligne la Berliner Zeitung. Les zones d'ombre sont le plus gros problème dans la lutte contre la propagation de la maladie. Ces zones d'ombre, ce sont les régions où les personnels médicaux ne peuvent pas accéder, soit parce qu'ils sont menacés par une population méfiante, soit parce qu'aucun cas de maladie n‘y est officiellement déclaré.

Au Liberia, en Sierra Leone et en Guinée, nombreux sont ceux même qui sont persuadés que le virus Ebola n'existe pas. D'autres encore pensent que l'on ne peut de toute façon rien faire pour aider un malade touché par le virus. Le journal rappelle qu'au Liberia à la mi-août, des gens ont attaqué un centre de soins dans la capitale Monrovia et "libéré" des patients. En fait, le scepticisme de la population révèle une profonde méfiance envers leur gouvernement dont ils n'attendent aucune aide dans quelque domaine que ce soit, et donc pas non plus dans le cas d'Ebola, relève la Berliner Zeitung.

Les systèmes sanitaires menacés

Ebola West Point Liberia
Au Liberia, West Point, un faubourg de Monrovia, est placé sous quarantaineImage : Reuters

L'épidémie risque de désintégrer les systèmes sanitaires dans les États concernés, poursuit le journal. Au Liberia surtout, de nombreux dispensaires et cliniques ont fermé leurs portes soit par peur d'être envahis par des malades victimes de la fièvre hémorragique, soit parce que le personnel sanitaire ne vient simplement plus travailler.

Face à une épidémie qui prend de l'ampleur, la population ne peut même plus compter recevoir les soins les plus élémentaires, constate la BZ. Ainsi à Monrovia, au moins six enfants sont morts-nés parce que leurs mères avaient des heures durant cherché en vain dans toute la ville une clinique où accoucher.

Réactions de panique

Les réactions de panique se multiplient, constate encore la Berliner Zeitung: le Sénégal et la Côte d'Ivoire ont fermé toutes leurs frontières vers la Guinée et le Liberia, bien que l'Organisation Mondiale de la Santé l'ait déconseillé, entre autres parce que l'approvisionnement dans les pays concernés menace de s'effondrer.

En outre, des compagnies aériennes comme British ou Kenyan Airways ont supprimé leurs vols vers Monrovia et Freetown. Au Sénégal, on a même interdit à un avion de transport d'aide de l'ONU d'atterrir en escale sur l'aéroport de la capitale Dakar. Plusieurs gouvernements africains interdisent l'entrée sur leur territoire aux visiteurs provenant des régions touchées.

Plakat mit Ebola-Warnung
A Abidjan, en Côte d'Ivoire, es affiches informent des précautions à prendre face à EbolaImage : Sia Kambou/AFP/Getty Images

Toutes les branches de l'économie sont touchées, même le tourisme en Afrique du Sud s'étonne le journal de Berlin. Les Asiatiques, surtout, renoncent à leurs voyages organisés au Cap de Bonne Espérance. Pourtant, la région touchée par Ebola est à quelque 6.000km de l'Afrique du Sud, rappelle la Berliner Zeitung. La même distance sépare Berlin de la capitale soudanaise Khartoum !

Gros ménage au sein de l'armée au Rwanda

C'est le titre d'un article de die tageszeitung qui revient sur l'arrestation de trois officiers supérieurs la semaine passée. Parmi ces haut gradés: le colonel Tom Byabagamba, ex-commandant de la Garde présidentielle, chargée de la sécurité du président. Il était juste rentré d'une mission de paix au Soudan du Sud, relève le journal et avait essayé, selon différentes sources, de libérer sa femme retenue par la police. Le frère de Byabagamba aurait été lui aussi arrêté.

L'épouse de Byabagamba avait été arrêtée le samedi soir avec d'autres personnes dans un bar du quartier Nyarutarama - quelques minutes seulement après avoir fait des commentaires sur l'épouse du président Paul Kagamé, Janet.

D'autres arrestations

Ruanda Genozid Gedenken 07.04.2014 Paul Kagame
Le président rwandais Paul Kagame lors de la commémoration du génocideImage : Reuters

Ces arrestations font suite à une série d'autres interpellations, observées d'un œil critique par des diplomates et défenseurs des droits de l'Homme, souligne la taz… Le général de brigade Frank Rusagara, arrêté la semaine dernière, est accusé d'avoir proféré des "menaces criminelles contre l'État ". Le général à la retraite avait servi à la fin de sa carrière en tant qu'attaché militaire à l'ambassade du Rwanda à Londres.

Ensuite, rapporte la taz, c'est le capitaine David Kabuye qui a été arrêté. Il s'agit du mari de Rose Kabuye, la chef du protocole du Président Paul Kagame. Le capitaine à la retraite, aujourd'hui homme d'affaires, est entre les mains des enquêteurs, selon un porte-parole militaire qui n'a pas donné plus de détails.

Ces arrestations, écrit le journal, sont un pas de plus sur la voie d'une évolution inquiétante dans le pays qui commémore cette année pour la 20ème fois le génocide qui a coûté la vie à plus de 800.000 Tutsis d'après l'ONU. Il y a quatre semaines déjà, le Président Kagame avait dissous le gouvernement et changé les acteurs de la scène politique.

Critiques de Human Rights Watch

L'ONG de défense des droits de l'homme accuse Kigali "d'arrestations arbitraires", rappelle die tageszeitung qui cite le dernier rapport de HRW. La taz note que la peur règne en maître au sein de l‘armée rwandaise. Et cela, pas seulement depuis ces dernières arrestations. Les Rwandais peuvent observer ce qui peut arriver à des militaires prétendus illoyaux. Comme dans le simulacre de procès contre un ancien garde du corps de Kagame, Joel Mutabazi. Accusé de trahison d'Etat et de terrorisme, il comparaît devant un tribunal militaire depuis février dernier. Le verdict doit tomber la semaine prochaine. On lui reproche d'avoir collaboré avec des ennemis de l'Etat rwandais. Pour die tageszeitung, la question est de savoir si l'ennemi se trouve réellement parmi les officiers supérieurs du régime ou bien si la révolution est en train de dévorer ses propres enfants…

Ruanda Genozid Gedenkfeier 07.04.2014 Zuschauer
A Kigali, des spectateurs aux cérémonies du SouvenirImage : Reuters

Le Califat au Nigeria, un coup de propagande

C'est le titre le quotidien Die Welt qui évoque les succès remportés par la secte islamiste contre le gouvernement du Nigeria. Pour proclamer ce "califat islamique", Abubakar Shekau a adopté sa pose la plus martiale. Encadré de deux combattants masqués et armés de pistolets-mitrailleurs, le chef de Boko Haram a lu son discours d'une voix forte évoquant la conquête de Gwoza comme "une grande victoire". La ville et ses 300.000 habitants font maintenant partie intégrante des territoires sous son contrôle.

Goodluck Jonathan spricht mit entkommenen Geiseln
Le président nigérian Goodluck Jonathan s'entretient avec quelques jeunes filles de Chibok libérées des mains de Boko HaramImage : Wole Emmanuel/AFP/Getty Images

Début août, Boko Haram avait attaqué la ville, brûlé des maisons et investi le palais de l'Emir. Plusieurs tentatives de l'armée nigériane pour reprendre le contrôle de Gwoza ont échoué. Le journal cite Shekau "Nous n'avons pas réussi tous seuls, nous étions les instruments d'Allah. Allah utilisera l'Islam pour dominer Gwoza, le Nigeria et le monde entier...Boko Haram n'a rien à voir avec le Nigeria, nous ne croyons pas en ce nom !"

Pour l'éditorialiste, il est clair que l'on a à faire à une bataille de propagande entre Boko Haram et l'Etat. L'armée s'est d'ailleurs empressée de contredire l'affirmation de Shekau. "La souveraineté et l'intégrité territoriale du Nigeria sont toujours intactes, a déclaré un porte parole militaire, précisant qu'aucun "groupe terroriste revendiquant pour lui une partie du pays ne pourra nous échapper." Difficile à croire écrit le journal, face à la débandade de plusieurs centaines de soldats et leur fuite vers le Cameroun voisin.

En réalité, pour l'armée nigériane, la perte de Gwoza est une douloureuse défaite qui illustre - une fois de plus - la faiblesse de ses soldats, souvent de loin moins bien équipés que les combattants de Boko-Haram. Et conclut le journal, c'est aussi une défaite pour le président Goodluck Jonathan, qui doit fort craindre de ne pas être réelu lors du prochain scrutin présidentiel en 2015 !