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Gabon, un "Scorpion" anticorruption controversé

Gérauds Wilfried Obangome
9 décembre 2019

L’opération anticorruption "Scorpion" a fait tomber plusieurs proches du président Ali Bongo. Mais beaucoup de Gabonais s’interrogent sur l’indépendance de la justice chargée de juger les personnalités visées.

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Gabun Präsident Bongo Poltischer Dialog
Image : Getty Images/AFP/S. Jordan

"Mes clients ont été persécutés moralement " (Me Jean Paul Moubembe)

L’opération anti-corruption "Scorpion" est apprécié par une partie de l’opinion au Gabon car elle a abouti à la mise en détention provisoire d’une dizaine de cadres de l’administration publique, et des proches du président Ali Bongo Ondimba. Ceux-ci sont suspectés de complicité de détournement de fonds publics et/ou blanchiment de capitaux.

Mais l’opposition, la société civile et les avocats des pontes du régime incriminés doutent de l’indépendance de la justice.

"Cette opération est menée sous l'autorité du procureur de la République de Libreville qui veille au respect scrupuleux des règles de procédure dans le cadre de cette enquête", assure Jessye Ella Ekogha. Le nouveau porte-parole de la présidence de la République tente de rassurer : "Il est capital pour notre nation d'en finir une fois pour toutes avec la corruption qui gangrène nos institutions".

La défense dénonce des persécutions

Avocat au Barreau du Gabon, Me Jean Paul Moubembe défend quatre personnalités suspectées de corruption et de détournement des deniers publics dans le cadre de l’opération Scorpion. L’avocat dénonce les méthodes utilisées par la justice en la matière. Il affirme que ses clients ont été "persécutés moralement, car leurs auditions à la DGR (Direction générale des recherches, ndlr) ont été faites non pas seulement en présence de plusieurs officiers de police judiciaire mais aussi d'autres personnes non habilitées". Et l'avocat de dénoncer une enquête "orientée".

Plusieurs avocats des personnes interpellées dénoncent un règlement de compte politique. La presse  proche de l’opposition, elle, parle même d'une "chasse aux sorcières".

"Nous avons l'habitude"

Avant l’opération "Scorpion", le président Ali Bongo Ondimba avait lancé début 2017, l’opération Mamba. Plusieurs dignitaires du régime avaient alors été incriminés par la justice. Certains sont toujours en prison, alors que d’autres ne sont pas inquiétés. C’est pourquoi, cette Gabonaise qui a requis l’anonymat s’interroge :

"Qui pourrait nous garantir que les biens mal acquis de ceux qui sont actuellement indexés seront saisis et mis à disposition des Gabonais sans qu'un autre homme politique ne les spolie quand nous avons l'habitude de pareil coup de tonnerre sans suite, sans plus."

Les internautes s'en donnent déjà à coeur joie dans la parodie de l'opération "Scorpion" comme dans ce tweet:

Réponse de la présidence de la République : il faut  "dépolitiser"  l’enquête. 

13 personnes placées en garde à vue

Selon le magistrat en charge de l’enquête sur les présumés détournement des deniers publics, ce sont au total 13 personnes qui ont été placées en garde à vue depuis le lancement de l'opération Scorpion.

Parmi eux, Brice Laccruche Alihanga, l’ancien tout-puissant directeur de cabinet du président Ali Bongo Ondimba, son frère, Gregory Laccruche, et l’ex-porte-parole de la présidence, Ike Ngouoni Aila Oyouomi, un proche de Brice Laccruche Alihanga.