1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

Journées de colère en Egypte

28 janvier 2011

L'actualité africaine est particulièrement riche cette semaine dans la presse allemande. Elle concerne d'abord le nord du continent, avec les manifestations en Tunisie et en Egypte.

https://p.dw.com/p/QwKN
Le 28 janvier au CaireImage : AP

Hier Tunis, aujourd'hui Le Caire - titre la Süddeutsche Zeitung qui parle des plus grandes manifestations organisées contre Hosni Moubarak depuis son arrivée au pouvoir en 1981. L'Egypte bouge, elle aussi. Dans ce paradis touristique la moitié de la population vit à la limite du seuil de pauvreté. Non pas, note plus loin le journal, que le régime Moubarak va s'effondrer sur le champ. La situation en Egypte n'est que partiellement comparable à celle de la Tunisie. L'armée, apparemment, est derrière Moubarak. Elle a déjà réprimé des révoltes de la faim dans les années 70. Mais le fait que les Egyptiens descendent dans la rue ne peut qu'inquiéter le régime. Le journal cite aussi cette blague qui circulait dernièrement au Caire: l'opposant Mohammed el-Baradei a appelé au changement en Egypte - malheureusement les Tunisiens ont été les seuls à réagir. A présent, poursuit le journal, les Egyptiens ont bel et bien quelque chose à dire.

La Frankfurter Rundschau évoque le séisme politique qui a eu lieu à la mi-janvier en Tunisie. L'onde de choc atteint maintenant les autres régimes arabes et fait trembler les potentats. En Egypte, souligne le journal, les réformes seront longues à venir. La police égyptienne est réputée pour sa brutalité, l'opposition pour ses divisions. Les partis politiques sont désorganisés, le parti de Moubarak est tout puissant. Seuls les Frères Musulmans sont un réel contre-poids au régime. Mais en règle générale, leurs adhérents restent à l'écart lorsque la société civile appelle à manifester. Concernant la Tunisie, la Süddeutsche Zeitung doute que le mandat d'arrêt délivré par la justice tunisienne contre Ben Ali soit exécuté. Livrer un réfugié serait contraire aux lois de l'hospitalité arabe. Et les Saoudiens ont déjà accueilli chez eux des personnages aussi peu ragoûtants que le dictateur ougandais Idi Amin.

Omar el Bashir und Salva Kiir Mayardit
Salva Kiir et Omar El-Béchir en janvier 2010Image : picture-alliance/dpa

Le Sud-Soudan en route vers l'indépendance

Le Soudan continue bien évidemment de retenir l'intérêt des journaux allemands. Unis contre l'unité - les Sud-Soudanais veulent leur indépendance, écrit le Tagesspiegel de Berlin. Les résultats, même encore inofficiels, du référendum d'autodétermination sont on ne peut plus clairs avec près de 99% des voix, à ce jour, en faveur de la sécession. Mais, souligne le journal, le chemin pour y parvenir est semé d'obstacles, alors que la séparation du sud va entraîner dans son sillage une énorme pression politique intérieure pour le président Omar el-Béchir. La semaine passée Khartoum a été le théâtre de plusieurs manifestations anti-gouvernementales. Principalement parce que le budget d'austérité du gouvernement Béchir prévoit de supprimer les subventions aux denrées alimentaires et à l'énergie.

La Frankfurter Allgemeine Zeitung retient que la sécession du Sud-Soudan va écorner, pour la deuxième fois dans l'histoire de l'Afrique post-coloniale, le dogme de l'intangibilité des frontières héritées de la colonisation. La première fois, en 1993, la séparation de l'Ethiopie et de l'Erythrée a débouché sur une guerre qui a fait plus de 100 000 morts. Une nouvelle guerre entre le Nord et le Sud-Soudan, n'est pas à exclure, estime le journal, même si le pessimisme exprimé en Afrique à propos du nouvel Etat n'est pas dénué de calcul. Car si le Sud-Soudan ne sombre pas dans le chaos, mais réussit au contraire son développement, cela ne sera pas sans effet sur la situation dans d'autres régions du continent qui aspirent à l'indépendance. Le journal cite la Casamance au Sénégal, le Katanga en RDC, l'enclave angolaise de Cabinda mais aussi le Nigéria.

Elfenbeinküste Landwirtschaft Kakao Plantage Gruppenbild
Dans une plantation de cacao en Côte d'IvoireImage : DW

Le cacao comme instrument de pouvoir

En Côte d'Ivoire c'est toujours l'impasse. Deux présidents revendiquent le pouvoir. Mais le président reconnu par la communauté internationale, Alassane Ouattara, a marqué un point, estime un journal allemand. Ce journal, c'est la Frankfurter Allgemeine Zeitung qui écrit qu'Alassane Ouattara a remporté au moins un succès le week-end dernier. Il a obtenu la démission du chef de la Banque centrale ouest-africaine, Philippe-Henry Dacoury-Tabley, qui jusqu'à présent refusait de céder à Ouattara et à son gouvernement la responsabilité des comptes de l'Etat ivoirien auprès de la banque centrale. Dacoury-Tabley, note le journal, est lui-même ivoirien et passe pour un ami personnel de Laurent Gbagbo, lequel se considère toujours, malgré les protestations internationales, comme le vainqueur de l'élection présidentielle de novembre dernier.

La lutte de pouvoir entre Ouattara et Gbagbo fait grimper le prix du cacao, écrit de son côté le Financial Times Deutschland. A l'origine de cette hausse: l'appel de Ouattara à une suspension des exportations de cacao pendant quatre semaines, la Côte d'Ivoire fournissant un tiers de la production mondiale. Ouattara veut ainsi couper les fonds à Laurent Gbagbo et le contraindre à l'abandon. Les exportations de cacao représentent un bon quart des recettes d'exportation ivoiriennes. Son commerce rapporte un milliard de dollars par an au régime Gbagbo. Cela dit le journal ne voit pas comment Ouattara peut imposer son interdiction d'exporter le cacao, alors que depuis des semaines il attend dans un hôtel que Laurent Gbagbo cède à la pression internationale.

Somalia Shebab Miliz Angriff auf Hotel in Mogadischu
Après une attaque de miliciens contre un hôtel de Mogadiscio, août 2010Image : AP

Mama Hawa

Enfin Die Welt consacre un long article à une Somalienne hors du commun. Elle s'appelle Hawa Abdi, elle est médecin, et à 64 ans pourtant, elle ne s'accorde pas un seul jour de repos. L'auteur de l'article l'a rencontrée à Nairobi où elle se démène pour collecter des médicaments. Car son obsession, à celle qu'on appelle Mama Hawa en Somalie, est de rentrer chez elle, de retrouver son hôpital, de reconstruire la salle d'opération et, un jour ou l'autre, de reconstruire aussi l'espoir qu'elle a entretenu pendant 27 ans. Des centaines de milliers de déplacés, lit-on plus loin, ont été traités dans cet hôpital situé à une demi-heure de voiture de Mogadiscio - jusqu'à ce matin du 5 mai 2010 où des miliciens islamistes sont arrivés et ont tout détruit.

Auteur: Marie-Ange Pioerron
Edition: Fréjus Quenum