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La chute d'un dictateur ne fait pas le printemps

21 janvier 2011

La Tunisie reste le grand sujet de l'actualité africaine dans la presse allemande. La situation, il est vrai, est encore très incertaine. Les articles de presse risquent d'être vite dépassés par les événements.

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Manifestation devant le siège du RCD, ex-parti au pouvoirImage : picture-alliance/dpa

Ce qui est sûr c'est que le dictateur est tombé, et la fuite de Ben Ali, lit-on dans un éditorial de die Tageszeitung, est un espoir pour les démocrates arabes. A l'inverse elle doit inquiéter les autocrates arabes, car leurs sujets sont frappés des mêmes maux que les Tunisiens: chômage, hausses des prix, corruption, arbitraire policier, absence de liberté d'opinion. Le renversement du pouvoir en Tunisie, note le journal, a pris en défaut la plupart des responsables politiques occidentaux. Ils ne se sont résolus que très tardivement à encourager les contestataires. Trop longtemps les dictateurs arabes laïques comme l'Egyptien Moubarak, le Tunisien Ben Ali ou l'Algérien Bouteflika sont apparus aux yeux de l'Europe et des Etats-Unis comme un moindre mal tant qu'ils promettaient de neutraliser les islamistes ou de maintenir les Africains loin de l'Europe.

La Süddeutsche Zeitung relève que la nervosité grandit dans les gouvernements des 21 Etats de la ligue arabe. A juste titre. Mais les événements en Tunisie peuvent avoir aussi du bon s'ils ouvrent les yeux sur des problèmes structurels: au cours des trente dernières années la population de la région a doublé, passant de 180 millions à 360 millions d'habitants. D'ici à 2030 ils devraient être 150 millions de plus, qui tous auront besoin d'un logement, de nourriture et de travail. Pour le Tagesspiegel de Berlin la fuite du dictateur Ben Ali ne débouchera pas automatiquement sur une démocratie qui fonctionne, aussi admirable que soit le courage des Tunisiens. La société civile tunisienne est sous-développée, l'opposition politique décimée et désorganisée.

Sudan Radio für den Frieden Radio Bakhita
Radio Bakhita, une radio pour la paix au Sud-SoudanImage : DW

Dans l'attente des résultats officiels au Sud-Soudan

Les résultats complets du référendum d'autodétermination au Sud-Soudan seront bientôt connus. D'après les chiffres publiés ces derniers jours, la sécession ne fait plus de doute. Et la naissance prochaine du 54ème Etat africain continue évidemment de retenir l'attention de la presse allemande. La Süddeutsche Zeitung écrit que la communauté internationale devra faire preuve de beaucoup de doigté pour que la naissance se passe bien. Washington et Pékin, les deux puissances les plus influentes au Soudan, ont maintenant l'opportunité d'oeuvrer à un objectif commun: personne ne souhaite que le Nord et le Sud se fassent de nouveau la guerre. Cela pénaliserait à nouveau cette région riche en matières premières et déclencherait de nouveaux flux de réfugiés. La guerre, note plus loin le journal, a déjà tout détruit au Sud-Soudan qui manque de tout - de routes, d'écoles, d'hôpitaux. L'actuel président du Sud-Soudan semi-autonome, Salva Kiir, présidera bientôt aux destinées d'un Etat souverain riche en ressources naturelles, mais riche aussi en conflits et en corrpution. Il ne conduira les peuples du Sud-Soudan vers un avenir meilleur que s'il réussit à doser subtilement le pouvoir et à imposer des contrôles pour que les pétrodollars et l'aide extérieure ne s'évaporent pas. Les attentes sont immenses. Le risque est donc grand que la frustration s'exprime violemment si les fruits de la liberté ne peuvent pas être récoltés rapidement.

Lebensmittel Krise Ägypten Brot Verkauf in Kairo
Pendant la crise alimentaire de 2008 en EgypteImage : AP

Insécurité alimentaire

Alors que les cours des céréales sont de nouveau à la hausse sur le marché mondial, un journal allemand se penche sur l'exemple du Malawi qui à l'inverse de la tendance générale a augmenté ses réserves de maïs. C'est un bon exemple selon le Financial Times Deutschland qui concède que le chaos régne dans la gestion des réserves céréalières du Malawi. Personne ne sait à combien se chiffrent les réserves de maïs. 60 000 tonnes officiellement, mais peut-être bien 140 000 en réalité. Et pourtant selon Paul Thangata, un expert de l'institut international de recherche sur la politique alimentaire basé à Washington, ces réserves sont un outil vital dans la lutte contre la faim au Malawi. De plus en plus d'experts, note le journal, partagent cet avis. Il n'en a pas toujours été ainsi. Dans les années 70 et 80, les réserves alimentaires stratégiques étaient jugées hautement inefficaces. L'approvisionnement sur le marché mondial était jugé préférable en période de crise. Beaucoup de pays africains ont alors supprimé complètement leurs réserves alimentaires. Elles creusaient d'énormes trous dans les budgets d'Etats surendettés. Cela s'est chèrement fait payer en 2007/ 2008, rappelle le journal, lorsque les prix ont explosé sur le marché mondial. Depuis, experts et responsables politiques discutent des moyens de réactiver la vieille idée des réserves alimentaires. Les propositions vont de réserves céréalières mondiales, gérées sous l'égide de l'ONU, à des réserves locales. Le gouvernement du Malawi, souligne le journal, n'a pas attendu le résultat de ce débat scientifique. Ces dernières années il a accru massivement ses réserves. Bien lui en a pris, puisque, comme le note notre confrère, malgré une mauvaise récolte de maïs l'an passé, ce pays pauvre n'a pas eu à souffrir de la hausse des cours mondiaux. Il a même pu en profiter en vendant du maïs aux pays voisins.

Ex-Buergermeister aus Ruanda wegen Voelkermordes vor Gericht
Onesphore R. et son avocateImage : dapd

Enfin plusieurs journaux évoquent l'ouverture à Francfort du premier procès intenté en Allemagne à un Rwandais pour son implication présumée dans le génocide de 1994. Il était à l'époque des faits qui lui sont reprochés maire de la commune de Muvumba, dans le nord du Rwanda. Le parquet fédéral de Karlsruhe, lit-on dans Die Welt, l'accuse d'avoir ordonné trois massacres de tutsis réfugiés dans des églises. Il est intéressant de noter qu'à l'exception de la Tageszeitung, qui cite le nom entier de ce Rwandais bénéficiaire de l'asile politique en Allemagne depuis 2007, les autres journaux comme Die Welt, la Frankfurter Allgemeine Zeitung ou le Tagesspiegel écrivent seulement Onesphore R. - par respect donc pour ce principe de la presse anglo-saxonne qui veut qu'on ne cite pas le nom d'un accusé tant qu'il n'est pas condamné , présomption d'innocence oblige.

Auteur: Marie-Ange Pioerron
Edition: Fréjus Quenum