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La fin de Kadhafi, et après?

26 août 2011

La Libye occupe cette semaine le devant de la scène dans les journaux. Ceux qui seront cités ci-dessous sont parus avant le 27 août.

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Portrait de Kadhafi criblé de balles à TripoliImage : dapd

Toute la presse bien sûr a relaté au jour le jour l'avancée des rebelles, les combats dans Tripoli, la prise du quartier général de Kadhafi. Quel que soit le sort de Kadhafi, écrit la Süddeutsche Zeitung dans son édition de mardi, le régime du plus vaniteux des dictateurs arabes semble vraiment être terminé. Après 42 ans d'un pouvoir erratique et narcissique, les Libyens ont maintenant la chance de bâtir une société qui pourrait être un modèle pour le monde arabe. Mais s'interroge le journal, qu'en sera-t-il réellement lorsque la victoire sera définitive pour les rebelles. Cet amalgame de nationalistes, démocrates, islamistes et chefs tribaux restera-t-il uni? Ni les Libyens eux-mêmes, ni la communauté internationale ne savent ce qu'il faut attendre des dirigeants de la rébellion. L'hebdomadaire Die Zeit souligne qu'en dépit de tous les avertissements l'intervention en Libye a été couronnée de succès, et n'a pas dressé le monde arabe contre l'occident. Cela ne signifie pas, poursuit le journal, que les occidentaux vont maintenant intervenir partout dans le monde pour renverser des tyrans ou aider à leur chute. Mais après la fin de Kadhafi, les dictateurs et assassins de masse se sentiront un peu moins en sécurité. Ils ne pourront exclure l'hypothèse de bombardements aériens si un jour ils vont trop loin. Cette menace d'un "peut-être" est un pas important vers un ordre mondial civilisé.

Libyen Jubel in Tripolis Grüner Platz Flagge
La joie des Libyens sur la place Verte de Tripoli, 26.08.11Image : dapd

L'Allemagne et la Libye

die Zeit

revient plus loin sur ce qu'il appelle l'échec de la politique allemande dans le dossier libyen. Les guerres, écrit-il, sont horribles, et le profond pacifisme émotionnel des Allemands est plus que compréhensible, vu l'histoire de notre pays. Mais il y a des moments où un gouvernement n'a pas le droit de suivre simplement des états d'âme, même s'ils sont moralement respectables. Dans un autre éditorial, die Zeit,parle même d'une honte pour l'Allemagne. Le Tagesspiegel de Berlin dénonce les erreurs de Guido Westerwelle, le ministre allemand des affaires étrangères. Seule une catastrophe en Libye et l'explosion de toute la région auraient donné raison au gouvernement allemand dans son argumentation contre l'intervention de l'OTAN. die tageszeitung reste fidèle à sa ligne: l'abstention de l'Allemagne lors du vote au conseil de sécurité de l'ONU en mars dernier était juste. Mais le journal appelle aujourd'hui Berlin à la modestie. Que Guido Westerwelle fasse croire que les sanctions économiques allemandes ont fait plier Kadhafi est fâcheux, souligne ce quotidien.

Libyen Kämpfe in Tripolis Aufständische Kontrolle über Abu Salim Gefangener
Des insurgés libyens dans TripoliImage : picture-alliance/abaca

Les tribus libyennes

Le même journal s'intéresse à une spécificité libyenne qui suscite beaucoup de fantasmes chez les occidentaux. Il s'agit de la structure tribale de la Libye. die tageszeitung a interrogé un expert de la Libye. Il s'appelle Thomas Hüsken, et il précise par exemple que ces structures tribales sont tout sauf figées. L'éventail d'opinions politiques à l'intérieur des tribus, est relativement large. Il y a, dit-il, des avocats ou des médecins qui ont vécu à l'étranger et qui ont une tout autre vision politique que les politiciens ancrés dans la communauté locale, et plus conservateurs. Une tribu, souligne Thomas Hüsken, n'est pas un acteur collectif, avec des structures de commandement autoritaires. L'autonomie du bédouin reste une valeur culturelle centrale. Ce qui explique sans doute que - comme il l'indique plus loin - si les chefs tribaux ne sont pas contre l'Etat, ils revendiquent au niveau local et régional un maximum d'autonomie et ne veulent pas être dominés par un Etat autoritaire. Pour Thomas Hüsken le risque de conflit, ou du moins de tensions, est plus à chercher entre l'establishement politique tribal, plutôt conservateur, les intellectuels des villes et surtout la jeunesse révolutionnaire qui fournit la majorité des combattants. Bref un conflit de générations.

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Dans le camp de DadaabImage : picture alliance/dpa

Dix dollars par mois pour sauver un affamé

La famine dans la Corne de l'Afrique a été un peu éclipsée par la Libye. Mais il y a quand même quelques articles sur le sujet. Un long reportage par exemple dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung sur un camp de réfugiés qui a déjà fait couler beaucoup d'encre. C'est le camp de Dadaab au Kenya. 60% de ses occupants sont des enfants et des jeunes, lit-on dans ce reportage. L'approvisionnement des réfugiés de Dadaab est une entreprise laborieuse, mais relativement peu coûteuse. Selon le Programme alimentaire mondial, y maintenir un homme en vie pendant un mois coûte environ 10 dollars. Le Tagesspiegel de Berlin dit tout le bien qu'il pense du comportement de la Turquie. Le premier ministre Recep Tayyip Erdogan est allé récemment à Mogadiscio. Il avait emmené avec lui sa famille, son ministre des affaires étrangères et deux avions bourrés de secours. La souffrance des Somaliens, note le journal, émeut de nombreux Turcs. Une collecte de dons appuyée par les médias et le gouvernement remporte un tel succès que 200 millions de dollars seront très certainement recueillis d'ici la fin du ramadan. Et ajoute le journal, le fait qu'Erdogan, malgré tous les problèmes de sécurité, soit allé à Mogadiscio avec son épouse et trois de leurs enfants, est un geste qui lui vaut la reconnaissance des Somaliens.

Südsudan Vielfalt der Kulturen
Le Soudan du sud abrite une multitude d'ethniesImage : DW/Schlindwein

Regain de violence au Soudan du sud

Depuis son accession à l'indépendance le 9 juillet, le Soudan du sud n'intéressait plus tellement les médias. Mais les affrontements qui ont eu lieu dans la province de Jonglei attirent de nouveaux l'attention des journaux. Ce n'est pas la première fois que des combats éclatent dans cette province, note la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Cette fois encore l'enjeu en a été des vols de bétail de grande ampleur. Selon des estimations de l'ONU, ce sont entre 26 000 et 30 000 têtes de bétail qui ont été volées. Des membres de la tribu Murle auraient attaqué plusieurs villages de la tribu des Lou Nuer. Bilan: quelque 600 morts. Pour la Süddeutsche Zeitung, la violence des affrontements laisse à penser que des politiciens rivaux exploitent les vols de bétail pour semer la haine, et mettre sur pied des armées rebelles. Cette nouvelle explosion de violence conforte le sentiment que même sans agression nordiste, le nouvel Etat du Soudan du sud reste une construction extrêmement fragile. Certains analystes craignent depuis longtemps que la séparation avec le nord remette au premier plan de vieux conflits latents, dans la mesure où Khartoum, l'ennemi commun, n'est plus omniprésent.

Auteur: Marie-Ange Pioerron
Edition: Fréjus Quenum