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La vis se resserre en Turquie

Sandrine Blanchard15 août 2016

Depuis le putsch manqué en Turquie, le pouvoir de Recep Tayyip Erdogan a procédé à de vastes purges dans l'administration, l'armée, la justice. Toute personne suspectée d'opposition peut craindre la répression.

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Türkei - Kundgebung in Istanbul gegen den Umsturzversuch
Image : DW/T. Stevenson

D'après les autorités, le coup d'Etat manqué aurait fait 240 morts. Depuis, le pouvoir de Recep Tayyip Erdogan a procédé à de vastes purges dans l'administration, l'armée, la justice. Et renforcé la répression à l'encontre de toute personne suspectée d'opposition, à commencer par les partisans du prédicateur Fetullah Gülen et les Kurdes. Ce nouveau cours politique suscite des critiques côté européen, mais le pouvoir turc ne semble pas en avoir cure.

Interpellations par dizaines de milliers

Türkei Premierminister Binali Yildirim
Binali Yıldırım reprend le ton martial du président ErdoganImage : Getty Images/AFP/A. Altan

Plus de 35 000 personnes ont été interpellées en un mois. 17 000 ont été formellement arrêtées. 76 000 magistrats, fonctionnaires et membres des forces de sécurité ont été suspendus. 5000 sont portés disparus. Les perquisitions musclées se sont multipliées.

Les autorités turques y voient la preuve des ramifications d'un « complot » ourdi par Fetullah Gülen avec le soutien des Etats-Unis. Déclarations du Premier ministre turc, aujourd'hui, à l'occasion des 15 ans de l'AKP, le parti au pouvoir. Binali Yıldırım.

« Depuis l'échec du putsch préparé par Fetullah Gülen, nous savons que plus rien ne sera comme avant. Nous allons débarrasser notre pays des organisations terroristes et des traîtres. Une justice indépendante et objective, un système judiciaire qui fonctionne, voilà notre priorité. »

Les Kurdes sont aussi dans le viseur

Türkei Festnahme eines Gülen-Sympathisanten in Ankara
Arrestation d'un sympathisant présumé de Gülen à AnkaraImage : picture-alliance/dpa/Anadolu/G. Yilmaz

Dans certaines régions kurdes de Turquie, des villages ont été rasés. Le procureur d'Istanbul réclame cinq ans d'emprisonnement pour Selahattin Demirtas, le leader du parti HDP, pro-kurde, accusé de « propagande terroriste » en faveur du PKK. La répression anti-kurde fait craindre à Ali Toprak, président de l'association de la communauté kurde d'Allemagne, des mouvements de population vers l'Europe.

« Si la situation ne se décrispe pas, si on en vient à une guerre civile, on pourrait bien assister à un exode de masse de la Turquie vers l'Europe.[...] On n'en est pas encore au point où 500 000 Kurdes attendent à la frontière de passer en Bulgarie…Pour le moment, ils sont déplacés internes et seules quelques centaines sont parties. Mais si la situation ne s'améliore pas, et on en prend le chemin, surtout que le PKK menace de nouveaux attentats, alors beaucoup de civils vont tenter de fuir la Turquie. »

Revirement stratégique

Les occidentaux dénoncent une « chasse aux sorcières ». Mais finis les ronds de jambes pour complaire aux exigences de Bruxelles. La Turquie ne croit plus aux promesses d'adhésion à l'Union européenne. Et le pouvoir turc réoriente sa politique extérieure. Progressivement, le pays abandonne son cours pro-occidental – la Turquie est membre de l'OTAN depuis 1952 – et se tourne vers la Russie qui lui ouvre les bras.

Le chef de la diplomatie turque a de nouveau menacé ce matin de renoncer à l'accord négocié avec l'UE sur les migrants, si l'Europe ne s'engage pas à laisser entrer les Turcs dans l'UE sans visa. Cette menace, les Européens la prennent au sérieux et tentent à tout prix d'éviter la rupture avec Ankara.

Türkei Region Diyarbakir Bombenanschlag
A Diyarbakir, un nouvel attentat montre l'instabilité des régions kurdesImage : Reuters/Ihlas

Ultime provocation : les autorités turques ont évoqué la possibilité de réintroduire la peine de mort, ce qui rendrait impossible toute négociation avec le Conseil de l'Europe, dont la Turquie est membre fondateur.