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Le génocide, un sujet tabou au Rwanda

19 février 2020

Human Rights Watch réclame une enquête transparente suite au décès du chanteur de gospel Kizito Mihigo. Selon les autorités rwandaises, il a été retrouvé mort dans sa cellule après s'être suicidé.

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Kizito Mihigo Ruanda Musiker Sänger
Image : Getty Images/C. Ndegeya

"Au Rwanda les histoires de génocide restent très complexes"

Kizito Mihigo s’était attiré les foudres du Front populaire rwandais (FPR au pouvoir) en 2014 après avoir composé des chansons qui remettaient en question la vision du gouvernement sur le génocide de 1994. Il avait été condamné à dix ans de prison pour complot contre l'Etat en 2015 et avait été libéré après quatre ans de détention.

Lewis Mudge, directeur Afrique centrale à Human Rights Watch, revient sur la persécution au Rwanda de ceux qui osent évoquer cette tragédie rwandaise et notamment le fait qu’il y a eu aussi des victimes hutus. 

Pour écouter son interview, cliquez sur la photo (ci-dessus). 

 

DW: Pourquoi ce sujet est-il si sensible?

Au Rwanda les histoires de génocide restent très complexes. Il y a la version des faits qui étaient établis par le FPR. Cela veut dire par le gouvernement en place. Le genre de faits établis par le FPR, c'est que ce sont eux qui ont stoppé le génocide commis par les Hutus contre le Tutsis. Mais tous ceux qui connaissent bien le Rwanda savent que c'est beaucoup plus complexe que ça. Il y a les Tutsis qui ont commis des crimes aussi, particulièrement après le génocide.

Donc ce n'est pas pour nier le fait qu'il a un génocide qui a été commis. La plupart des victimes du génocide étaient des Tutsis, mais en même temps il y a des agents, des soldats du FPR qui ont commis des crimes de guerre contre la majorité Hutu. Et ces crimes-là, jusqu'à maintenant c'est presque impossible au Rwanda de discuter de ces crimes. Bien sûr Kizito il a essayé de parler de ces crimes là et Victoire Ngabiré aussi et maintenant vous êtes en train de voir la suite. Kizito il a été détenu et Victoire Ngabiré aussi, ils ont été accusés d'être négationniste du génocide, ils ont passé pas mal de temps en prison et maintenant nous sommes là avec cette triste histoire. La police est en train de dire que Kizito s'est suicidé dans son cachot.

DW: Est-ce qu’aujourd'hui si les autorités rwandaises essayent de faire taire toute voix qui qui veut parler de ce génocide, est-ce que ce n'est pas parce que les autorités rwandaises justement ne veulent pas que les gens sachent réellement ce qui s'est passé ?

Les autorités sur place veulent contrôler l'histoire. Elles veulent contrôler comment on discute du génocide. Et lorsque vous avez des groupes comme Human Right Watch qui sont en train d'essayer tout simplement d'énoncer des vérités, nous sommes considérés comme agents contre  l'Etat. Cela veut dire que la situation est complexe. C'est une histoire que le gouvernement souhaite continuer de contrôler parce que c'est leur raison d'être. Pour le fait qu'il n'y a pas d'espace démocratique au Rwanda, selon le FPR c'est  que le génocide a eu lieu ici, si on continue de donner la voix aux gens pour crier que le gouvernement ne marche pas, qu'il y a des choses qui ne marchent pas on peut avoir un génocide encore.

Nafissa Amadou Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welledw_afrique