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Soudan : les civils rejettent l'offre de dialogue de l'armée

5 juin 2019

Après avoir déclaré caducs les accords conclus avec les contestataires, le Conseil militaire de transition se dit désormais ouvert à des négociations "sans restriction" avec les civils. Mais ceux-ci rejettent l'offre.

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Sudan Soldaten in Khartum
Image : Getty Images/AFP/M. El-Shahed

"On ne plus massacrer les peuples comme avant" (Michel Scarbouchi)

"Le peuple soudanais n'est pas ouvert aux négociations, ni à ce Conseil militaire qui tue des gens", a déclaré, le porte-parole de l'Association des professionnels soudanais. Amjad Farid promet que la contestation continuera "d'utiliser tous les outils non violents et la désobéissance civile" contre les généraux.

"Nous soutiendrons tout mouvement pacifique qui pourrait nous aider à avoir un nouveau gouvernement démocratique. Ou qui puisse convaincre le Conseil militaire qu'il est temps d'accorder aux civils ce qu'ils méritent et leur donner le pouvoir. Parce que c'est ce que nous voulons, c'est ce que les gens veulent", a ajouté Mahamoud Abdallah, l'un des représentants des contestataires en Allemagne.

Radicalisation de la contestation

Depuis la sanglante répression d'un sit-in lundi dernier, les leaders de la contestation ont adopté une posture plus radicale. Ils exigent notamment que toute la lumière soit faite sur cette répression qui a fait plus d’une centaine de morts et au moins 326 blessés, selon un dernier bilan annoncé, mercredi, par un comité de médecins, proches des manifestants. Ce dernier parle de 61 corps comptabilisés dans les hôpitaux et de 40 retrouvés dans les eaux du Nil.

Brûlés par les manifestants, ces pneus servent à ériger des barricades
Brûlés par les manifestants, ces pneus servent à ériger des barricadesImage : Reuters

Pressions internationales

Depuis lundi, les pressions continuent de s’accentuer sur les autorités de transition. Après les chancelleries occidentales et américaines, c’est autour des organisations de défense des droits de l’Homme de monter au créneau.

C’est le cas d’Amnesty International qui a condamné ces exactions. La FIDH, le Centre africain d'études sur la justice et la paix (ACJPS) et Sudan Human rights Monitor (SHRM) appellent dans un communiqué "les membres du Conseil militaire de transition à mettre fin immédiatement aux violentes attaques perpétrées par les Forces de soutien rapide (RSF) et d'autres forces de sécurité" contre les manifestants.

Les deux organisations soudanaise appellent au "déploiement urgent", au Soudan, d'"une mission d'enquête internationale dirigée par l'ONU et l'Union africaine" pour "enquêter sur la répression et obliger les personnes responsables à rendre compte". Aussi, appellent-elles "la communauté internationale à imposer des sanctions ciblées contre les responsables" de cette répression sanglante.

Michel Scarbouchi, ancien eurodéputé et spécialiste de l'Afrique du Nord, assure cependant que les militaires ne peuvent plus massacrer en toute impunité, comme par le passé.

"Internet, Facebook et les smartphone signent quelque part la fin des dictatures. On ne plus massacrer les peuples comme cela se faisait précédemment. L'information permet aujourd'hui de protéger les populations et de protéger la volonté de démocratie civile qu'elles expriment. Donc, ça c'est un atout. Et moi, j'espère beaucoup que grâce à ça, les manifestants au Soudan comme en Algérie finiront par triompher".

Des partisans soudanais du Conseil militaire de transition  au pouvoir
Des partisans soudanais du Conseil militaire de transition au pouvoir Image : Getty Images/AFP/A. Shazly

Mise en garde

Dans une déclaration retransmise par la télévision nationale, le numéro deux du Conseil militaire au pouvoir au Soudan, Mohamad Hamdan Daglo a prévenu qu'ils ne permettraient pas que le chaos s'installe au Soudan. Rappelons que celui qui est aussi connu sous le nom de "Hemeidti" a dirigé, dans un passé récent, la tristement célèbre milice Djandjawid sous le règne d’Omar Hassan el-Béchir, renversé le 10 avril dernier par la rue.

Ce sont les éléments de cette ancienne milice, regroupée au sein des Forces de soutien rapide (RSF) dirigée par Hemeidti, qui sont accusés d’avoir mené la répression meurtrière de lundi dernier. Les hommes de cette unité paramilitaire sont également accusés d’avoir commis des atrocités durant la guerre civile au Darfour, dans l'ouest du pays. 

Chine et Russie usent de nouveau de leur droit de véto au Conseil de sécurité de l'ONU
Chine et Russie usent de nouveau de leur droit de véto au Conseil de sécurité de l'ONU Image : Getty Images/D. Angerer

Tractations diplomatiques

La Chine, appuyée par la Russie, a bloqué au Conseil de sécurité de l'ONU un projet de résolution condamnant la répression de lundi dernier. Lors de cette réunion à huis clos, le Royaume-Uni et l'Allemagne ont fait circuler un communiqué qui appelait les militaires au pouvoir au Soudan et les manifestants à "continuer à travailler ensemble vers une solution consensuelle à la crise en cours". Mais selon l'ambassadeur russe adjoint aux Nations unies, Dmitry Polyanskiy, le communiqué proposé était "déséquilibré". 

Dans un communiqué commun, huit pays européens ont par ailleurs déclaré, dans un communiqué commun, "condamner les attaques violentes au Soudan par les services de sécurité soudanais contre des civils". La Belgique, le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne, l'Italie, la Pologne, les Pays-Bas et la Suède ont estimé que l'annonce unilatérale du Conseil militaire au Soudan "de cesser les négociations, de nommer un gouvernement et d'appeler à des élections dans un délai trop court" était "très préoccupante"

 

Photo de Eric Topona Mocnga
Eric Topona Journaliste au programme francophone de la Deutsche WelleETopona