Limogeage à la russe
29 septembre 2010
C'est une première. Depuis que le Kremlin a décidé de nommer et défaire les chefs de région en 2004, jamais un gouverneur n'avait été limogé pour avoir perdu la confiance du président. Il faut dire que depuis plusieurs semaines, Iouri Loujkov dérange le duo Poutine-Medvedev, respectivement Premier Ministre et président de la République Fédérale de Russie. Tout a commencé avec sa mauvaise gestion des incendies de fôret de cet été. Depuis, les médias s'acharnent contre le maire moscovite et rappellent les soupçons de corruption qui pèsent contre lui. Surtout, Iouri Loujkov s'était fait remarquer début septembre par des propos très critiques envers la présidence de Dmitri Medvedev. Dès lors, il ne pouvait qu'être démis de ses fonctions, selon Alexander Rahr, expert de l'institut allemand de Politiques Etrangères.
"Le maire de Moscou est un gouverneur de province et en tant que tel subordonné au président. Si Loujkov était resté à son poste, il aurait continué à proclamer son indépendance vis-à-vis du pouvoir central. Cela aurait entâché l'image du président russe et mis fin à l'autorité de Dmitri Medvedev non seulement en Russie mais aussi à l'étranger."
2012 en ligne de mire
Le premier ministre, Vladimir Poutine, s'est empressé de soutenir Dmitri Medvedev. Il a rappelé que "c'est le maire qui est un subordonné du président et non l'inverse". D'autant plus que Moscou est le poumon de la Russie. C'est une capitale économique au budget non négligeable de 23 milliards d'euros, et surtout une capitale politique. Boris Reitschuster, correspondant pour le journal allemand Focus :
"En tant que capitale, Moscou est une ville essentielle pour les élections présidentielles de 2012. Je pense que Poutine et Medvedev veulent un gouverneur qui leur assurera de remporter le scrutin à Moscou."
Un régime dictatorial ?
Il fallait donc que le duo Poutine-Medvedev écarte Iouri Loujkov au plus vite. La contre-attaque du maire déchu le prouve : dans une lettre publiée ce matin dans le journal de l'opposition New Times, Iouri Loujkov dénonce le manque de démocratie en Russie et la censure du président Dmitri Medvedev. L'ancien maire va même jusqu'à comparer la politique du Kremlin aux pratiques staliniennes, puisque selon lui, en Russie, on a peur d'exprimer son opinion depuis 1937! Selon le journal, cette lettre aurait été transmise lundi soir au président russe, soit la veille du limogeage. Une information démentie par le Kremlin.
Auteur : Cécile Leclerc
Edition : Mireille Dronne