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L'Ouganda veut taxer les réseaux sociaux

4 mai 2018

Le président ougandais entend mettre fin aux commérages. Autres sujets de l'Afropresse: le Cameroun au bord de la guerre civile et une résistance polémique lors de l'interpellation d'un migrant togolais en Allemagne.

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Image : Getty Images/AFP/I. Sanogo

Die Welt commente le projet de taxe que le chef de l'Etat ougandais veut imposer aux utilisateurs de réseaux sociaux. Selon le projet de loi déposé début avril, les utilisateurs de plateformes comme Facebook et Twitter devront s'acquitter d'un impôt équivalent à deux centimes d'euros par jour.

Cela fait tout de même plus d'un demi euro par mois, ce qui représenterait un poids financier conséquent pour de nombreux Ougandais, constate le journal. Officiellement, c'est pour renflouer les caisses de l'État, mais c'est surtout une nouvelle tentative d'agir contre le "lugambo", le commérage.

Yoweri Museveni, 32 ans au pouvoir et l'intention d'y rester
Yoweri Museveni, 32 ans au pouvoir et l'intention d'y resterImage : Getty Images/AFP/G. Grilhot

Pour Yoweri Museveni, depuis 32 ans au pouvoir, toute critique contre lui s'apparente à du "lugambo". Et en ce moment, il y en a beaucoup, selon Die Welt. Le président a fait sauter la limite d'âge pour une candidature à la présidentielle, une mesure à laquelle s'opposaient trois quarts des Ougandais.

Celui qui, jadis, considérait les chefs d'État qui s'accrochent au pouvoir "responsables des maux de l'Afrique", ne laisse plus aucun doute sur sa prétention à être dirigeant à vie. Et contrairement à d'autres pays comme le Rwanda, le Burundi ou la République démocratique du Congo, où les présidents ont eux aussi modifié la constitution pour rester au pouvoir, la décision n'a provoqué aucun tollé international.

L'Ouganda, explique Die Welt, fournit le plus gros contingent dans la lutte contre le groupe terroriste al-Shabab en Somalie et accueille 1,4 million de réfugiés sur son sol. Raison pour laquelle la communauté internationale le laisse tranquille.

En Ouganda, le vent commence néanmoins à tourner. Les dernières élections en 2016 ont été marquées par des irrégularités, les médias sociaux bloqués et le principal candidat de l'opposition placé en résidence surveillée pendant des mois. Yoweri Museveni n'a toutefois obtenu que 61% des voix, sept points de moins que cinq ans auparavant. Le temps travaille contre lui, estime Die Welt.

Le Cameroun "au bord de la guerre civile"

C'est la Frankfurter Allgemeine Zeitung qui s'inquiète, dans un article, de la situation dans ce pays. Le récit s'ouvre sur l'attaque d'un village, il y a environ deux semaines dans le sud-est du pays. Fuka, un éleveur de cochons raconte avoir été réveillé au petit matin par des tirs et des cris. Il réussit à s'enfuir en laissant tout derrière lui, y compris sa femme et ses enfants.

Des vidéos circulent sur les réseaux sociaux sur des violences de la part des forces de police et de l'armée camerounaise dans les régions anglophones
Des vidéos circulent sur les réseaux sociaux sur des violences de la part des forces de police et de l'armée camerounaise dans les régions anglophonesImage : DW/A. Kriesch

Huit villages, au total, ont été "pratiquement rayés de la carte" cette nuit-là. Fuka supplie le gouvernement "de faire quelque chose". Le problème, explique le correspondant de la FAZ, c'est que le gouvernement est peut-être lui-même derrière ces attaques. Les témoignages se contredisent. Certains accusent les rebelles sécessionnistes, d'autres l'armée. Le conflit dans les régions anglophones du Cameroun s'envenime et pourrait aboutir à une guerre civile, prévient le quotidien.

En mars, les rebelles ont pris en otage 36 passagers d'un bus. Ils voulaient obtenir en échange la libération du professeur d'université Ivo Leke Tambo. Le sort de 47 sécessionnistes présumés qui avaient fui au Nigeria avant les troubles et qui ont été livrés au Cameroun est lui aussi incertain.

Un rapport de l'International Crisis Group observe que les rebelles qui réclament la partition du pays et la création de la république d'Ambazonie sont de mieux en mieux armés et qu'ils contrôlent déjà plusieurs parties de la région revendiquée.

La crise actuelle, écrit encore la Frankfurter Allgemeine Zeitung, n'est pas seulement liée au conflit entre le pouvoir central francophone et la minorité anglophone, c'est aussi une crise de la présidence autocrate de Paul Biya. Après les affrontements de la fin de l'année dernière entre l'armée et les sécessionnistes, il a tenu des propos que de nombreux Camerounais ont considérés comme une déclaration de guerre, affirmant que le pays était de nouveau "victime d'une bande de terroristes qui prétendent appartenir à un mouvement indépendantiste".

Paull Biya considère les séparatistes comme des terroristes
Paull Biya considère les séparatistes comme des terroristesImage : picture alliance/abaca/E. Blondet

L'entêtement du président octogénaire risque de pousser le Cameroun à la ruine, prévient le diplomate allemand Volker Seitz. L'ancien ambassadeur d'Allemagne au Cameroun, auteur d'un livre critique sur les dirigeants africains, estime que le système Paul Biya est basé sur la manipulation, la corruption et le chantage. De moins en moins de gens croient que la "clique au pouvoir" sera en mesure de mettre un terme au conflit, d'autant que le pays est menacé au nord par le djihadistes de Boko Haram.

Selon l'ICG, il faudrait que l'Eglise catholique s'engage au Cameroun comme elle l'a fait au Congo pour engager des négociations entre les deux parties. Mais le temps presse, conclut la Frankfurter Allgemeine: des élections sont prévues à l'automne dans le pays et la situation risque alors de déraper totalement.

En Allemagne, l'interpellation d'un migrant togolais tourne à l'émeute

La Berliner Zeitung revient dans son édition de vendredi sur les événements qui se sont produits à Ellwangen, une ville tranquille du sud-ouest de l'Allemagne.

Des centaines de policiers et des forces spéciales armées jusqu'aux dents débarquent aux premières heures, jeudi matin, devant une ancienne caserne militaire devenue centre d'accueil pour primo-arrivants du Land de Bade-Württemberg.

Des centaines de policiers et des forces spéciales pour arrêter un seul homme...
Des centaines de policiers et des forces spéciales pour arrêter un seul homme...Image : picture-alliance/dpa/S. Puchner

Les forces spéciales sont venues chercher un demandeur d'asile togolais. Pour la deuxième fois. Dans la nuit de dimanche à lundi, la police avait déjà tenté d'arrêter le jeune homme de 23 ans qui devait être renvoyé en Italie, le pays par lequel il est entré dans l'Union européenne.

Cette mission de routine ne s'est pas déroulée comme prévu. D'autres demandeurs d'asile ont empêché que le jeune Togolais soit emmené. Selon la Berliner Zeitung, il ont "menacé massivement" les policiers et ont "aussi recouru à la violence", obligeant les fonctionnaires à repartir bredouille.

"Je ne sais pas ce qui se serait passé" si la mission n'avait pas été abrégée, a déclaré un peu plus tard le chef de la police, prenant la défense de ses collègues lors d'une conférence de presse autour de cette affaire devenue en quelques jours un événement national.

L'intervention policière de jeudi matin n'a pas calmé les esprits, confirme die tageszeitung, qui critique les réactions disproportionnées de la classe politique et un traitement exagéré des médias. Le quotidien remet d'ailleurs en cause certaines affirmations, notamment sur la présence d'armes dans le centre, évoquée ces derniers jours.

Le ministre de l'Intérieur, le conservateur bavarois Horst Seehofer, veut désormais instaurer des "centres d'ancrage" car il estime que "l'un des principaux problèmes du rapatriement est lorsqu'une personne a pris racine" en Allemagne. Les migrants, explique la taz, seraient donc encasernés dans ces centres depuis leur arrivée jusqu'à leur expulsion et cela serait, selon le ministre, une solution plus humaine, voire plus chrétienne.

Le Togolais est finalement emmené pour être expulsé vers l'Italie
Le Togolais est finalement emmené pour être expulsé vers l'ItalieImage : picture-alliance/dpa/S. Puchner

Le journal prévient: plus les structures d'accueil sont importantes, plus les risques de violence sont grands. Horst Seehofer le sait très bien. Et le syndicat de la police a déjà manifesté son désaccord de prendre en charge la surveillance des centres.

Les appels à ouvrir les frontières et à changer radicalement de politique d'accueil peuvent sembler naïfs, mais on peut tout de même s'interroger sur le bien-fondé des projets du ministre de l'Intérieur.

Entasser des milliers de personnes dans des camps, désœuvrées et bénéficiant seulement du minimum vital, et faire venir la police à chaque fois qu'il y a un problème, ce n'est pas seulement le contraire d'"humain" et "chrétien", c'est aussi un très mauvais concept sécuritaire, critique die tageszeitung.

Deutsche Welle Anne Le Touzé
Anne Le Touzé Journaliste au programme francophone de la DWnanetouz