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Me Cécile Marie José de Dravo Zinzindohoué

17 octobre 2018

Depuis quelques jours, la présidente de la Haute cour de justice du Bénin séjourne à Berlin, la capitale fédérale de l’Allemagne, à l’invitation de la Fondation Konrad-Adenauer.

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Dans cet entretien exclusif, Me Cécile Marie José de Dravo Zinzindohoué, aborde plusieurs sujets liés à l’actualité politique et judiciaire de son pays, le Bénin.

DW : Quel est l'objet de votre séjour à Berlin ?

Me Cécile Marie José de Dravo Zinzindohoué : Je participe à un voyage d'étude organisé par la Fondation Konrad Adenauer. Voyage d’étude organisé au profit des politiques et de la société civile et aussi de la justice pour échanger sur l'évolution du partenariat entre la Fondation et les pays d'Afrique par rapport à la thématique du développement et de la démocratie. 

DW : Depuis l'été dernier vous êtes à la tête de la Haute Cour de justice. Est-ce que vous avez déjà été saisi, dans le cadre de vos activités, de dossiers pendants ?

Me Cécile Marie José de Dravo Zinzindohoué : Au niveau de la chambre d'instruction de la Cour d'appel, nous avons des dossiers qui ont été instruits. On peut considérer que la Haute Cour, elle, fonctionne déjà dans son aspect procédural, au niveau de l’instruction. Il y a un autre aspect institutionnel, politique, qui est l’aspect du vote de la mise en accusation par l’Assemblée.

DW : Justement. En juillet dernier, trois députés ont vu leur immunité levée. Il s’agit de Valentin Djenontin, Idrissou Bako, et Mohamed Atao Hinnouho. Où en est-on leur dossier ?

Me Cécile Marie José de Dravo Zinzindohoué : Les mises en cause sont écoutées par une chambre spéciale. La chambre d’instruction de la Cour d’appel. Donc par un tribunal de droit commun. Les résultats de ces enquêtes et autres ne viennent pas directement à la Haute cour de justice. Après avoir écouté les mises en cause, le dossier est envoyé à l’Assemblée. Et c’est l’Assemblée, qui dit "ok, je suis convaincue, je suis d’accord que les mise en cause soient jugés".

DW : Donc, dans le cadre de ces trois députés, la procédure va encore durer ?

Me Cécile Marie José de Dravo Zinzindohoué : La procédure risque de durer. Parce que là où on en est, l’instruction n’a pas encore démarrée. Il y a des mises en cause qui ont fui le territoire, qui ne sont pas présents. Il y en a d’autres qui sont là, qui ne répondent pas aux convocations des juges. De toutes les façons, quelle que soit, comme on dit, la physionomie du mouton, la tabaski aura lieu : la chambre d’instruction instruira à charge ou à décharge. Et le dossier sera envoyé à l’Assemblée. Et la Haute cour, elle, se prépare. Elle attend. Si l’Assemblée décide de lui envoyer ces mises en cause, la Haute cour est prête.

DW : Que répondez-vous à certains acteurs politiques qui pensent que la Haute cour de justice, dans le cadre de l’affaire de ces trois députés, ne fera que suivre des injonctions politiques et politiciennes ?

Me Cécile Marie José de Dravo Zinzindohoué : Vous savez. Ces acteurs peuvent émettre ces opinions. Mais demain, quand ils seront dans un autre rôle, ça va être encore d’autres opinions. De toutes les façons, une juridiction qui se veut efficace a le droit de se mettre au-dessus de la mêlée. Les textes sont clairs. Il ne nous reste qu’à travailler en toute conscience. Parfois, il vaut mieux écouter, fermer les oreilles aux sirènes pour mieux avancer. (rit)

Benin Cotonou Sebastien Ajavon Kandidat Präsidentschaftswahl
Image : Getty Images/AFP/C. Placide

DW : Le 4 octobre dernier, Madame la présidente, Sébastien Ajavon (homme d’affaire et homme politique arrivé troisième lors de la présidentielle de 2016) a été convoquée devant la Criet, la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme, qui vient d’être créée. Ne pensez-vous pas que cette cour ne va servir qu’à régler de vieux comptes politiques ?

Me Cécile Marie José de Dravo Zinzindohoué : Chaque cour est autonome et chaque cour fonctionne selon des textes bien définis. Nous n’interférons pas. Nous n’apprécions pas. Nous n’émettons pas d’opinion les unes sur les autres. Bon. Chacun se fait son opinion.

DW : Est-ce que c’est un hasard que ça soit Sébastien Ajavon qui soit ainsi le tout premier client de cette cour ?
Me Cécile Marie José de Dravo Zinzindohoué : Ah non. Je ne serai pas d’accord avec vous, quand vous me dites que c’est le tout premier client. Il y a plusieurs dossiers qui ont été vidé par la Criet. Des Indo-Pakistanais, d’autres Béninois, qui étaient condamnés à de lourdes peines par la Criet. À travers les journaux, on le lit.

DW : Une cour similaire existe au Sénégal, la cour pour la répression de l'enrichissement illicite, la Crei, qui avait condamné le fils d'Abdoulaye Wade (Ndlr, l’ancien président sénégalais) Karim Wade. Beaucoup de Béninois craignent que cette cour crée au Bénin, la Criet, ne puisse également servir à écraser ou à faire taire des opposants gênants comme Sébastien Ajavon.

Me Cécile Marie José de Dravo Zinzindohoué : De toutes les façons, une cour, elle ne condamne pas sans avoir écouté. Je crois que nous gagnons tous, pour la crédibilité de la justice, pour que demain, il ne soit pas dit que c’est une justice à deux vitesses.