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"Il faut veiller à ne pas appeler à la violence en RCA"

Jean-Fernand Koena
20 décembre 2023

Interview de Valentine Rugwabiza, la représentante du Secrétaire général de l’Onu en République centrafricaine, et cheffe de la Minusca.

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Notre invitée de la semaine est Valentine Rugwabiza, la représentante du secrétaire général de l’Onu en République centrafricaine, et cheffe de la Minusca. Dans son entretien avec notre correspondant, Jean-Fernand Koena, elle clarifie son appel au dialogue qui a été perçu par Bangui comme une stratégie de déstabilisation.

Valentine Rugwabiza revient aussi sur le travail des soldats de la paix parallèlement aux mercenaires russes du groupe Wagner, qui appuient l’armée centrafricaine. Enfin, elle répond aux inquiétudes de la République démocratique du Congo qui soupçonne le Rwanda de vouloir déstabiliser le pays à partir de la Centrafrique.

DW : Un nouveau mandat pour la Minusca? Qu'est-ce qui a fondamentalement changé et comment comptez-vous le mettre en œuvre?

VR : Nous nous réjouissons du renouvellement du mandat de la Minusca par le Conseil de sécurité des Nations unies. C'est un mandat qui s'inscrit il faut dire, dans la continuité, parce qu'il reconnaît les progrès qui ont été accomplis, tant sur le plan de la mise en œuvre de l'accord de paix, mais aussi sur le plan sécuritaire.

DW : Sauf que sur le terrain, il y a encore des poches d'insécurité la dernière date, c'est Kaga Bandoro, où la population a enregistré une attaque par drone sur la base des alliés du gouvernement. Qu'est-ce que vous savez de cette situation ?

VR : En réalité, dire qu'il y a progrès ne veut pas dire qu'il n'y a pas de défis qui demeurent. Il y a clairement eu progrès en matière de protection des civils. Les indicateurs, c'est qu'il y a une réduction importante des attaques massives sur les civils, mais il reste des défis. Et l’incident que vous venez de mentionner fait partie de ces défis, et l'un des défis sécuritaire en République centrafricaine, c'est l'utilisation des engins explosifs.

DW : À-côté de la Minusca, il y a les alliés du gouvernement que sont le groupe Wagner, qualifiés par les Nations unies comme des mercenaires, par les États-Unis comme un mouvement de criminalité transnationale. Comment est-ce que vous travaillez en tant que Minusca, sur le terrain, avec une organisation qui est qualifiée d'organisation criminelle ?

VR : Au niveau des nations unies, nous parlons plutôt d'autres forces de sécurité. En réalité, sur un terrain tel que la Centrafrique, que ce soit des forces conventionnelles ou des forces privées, il n'y a pas de forces importantes, à part les groupes armés, bien entendu, mais il n'y a pas d'autres forces qui n’interviennent pas sur l'invitation du gouvernement de la Centrafrique.

En ce qui nous concerne, nous n'avons aucun mandat de coordination ou de collaboration avec d'autres forces.

Il y a également des interventions de forces bilatérales, tant qu'elles sont mentionnées dans notre mandat, nous coordonnons avec ces forces.

Ça ne veut pas dire que, de temps en temps, il n'y a pas de difficultés qui sont liées à des dénis d'accès de patrouilles, par exemple, mais généralement, toutes ces difficultés, quand elles se posent, elles sont remontées au niveau du siège, nous les reportons à la partie centrafricaine et je dois dire que, dans la grande majorité des cas, il est apporté une solution.

DW : Vous avez aussi un mandat politique et, à ce titre, devant le conseil de sécurité, vous avez appelé à un dialogue en République centrafricaine. Cet appel n'a pas été bien accueilli par quelques proches du président de la république, notamment le conseiller spécial, qui pense que la Minusca cherchera à installer un "génocide" en République centrafricaine. Comment réagissez-vous déjà à ça et quel est vraiment le contenu de dialogue que vous voulez exactement ?

VR : Il faut être très attentif à ne pas utiliser des propos irresponsables et qui appelleraient à la violence. C'est ce que je dirais en premier lieu.

Ensuite, c'est que, clairement, il y a eu une mésinterprétation de ce qu'a été mon propos auprès du Conseil de sécurité. Il n'y a absolument aucune nouveauté.

J'ai fait un appel à ce qui constitue mes bons offices. Mon rôle de bons offices s'exécute essentiellement dans deux directions: dans la mise en œuvre de l'accord de paix et pour la facilitation d'un environnement qui permettrait des élections locales apaisées, inclusives et transparentes.

DW : Vous êtes originaire du Rwanda qui est aussi un contributeur de troupes au sein de la Minusca. L'année dernière, l'ambassadeur de la RDC en République centrafricaine, dans une note confidentielle à son pays, avait noté que le Rwanda préparerait l'attaque de son pays à partir de la République centrafricaine et il a noté le déploiement des contingents rwandais dans des zones stratégiques qui menacerait la stabilité du Congo. Comment avez-vous accueilli cette situation ?

VR : Je ne pense même pas que ce soit à moi de répondre à ce type de propos.

Comme vous le savez, je représente le Secrétaire général des Nations unies et je représente la Minusca.

J'ai mémoire que Son Excellence la ministre des Affaires étrangères y avait déjà répondu en son temps.

Il est clair que la mission que nous avons ici est une mission de sécurité et une mission de maintien de la paix, et cela ne peut être en aucun cas une mission de déstabilisation, que ce soit en interne ou externe.